Algérie

Derbal : le handicap de la confiance



En déclinant l'invitation de la Hiise, les partis politiques viennent, de nouveau, confirmer leur méfiance vis-à-vis d'une instance qu'ils ont dénoncée dès sa mise en place.C'était l'un de ses chantiers annoncés l'automne dernier peu après la fin des élections locales : consacrer l'année 2018 à la formation au service des formations politiques pour parfaire le processus électoral en perspective de l'élection présidentielle prévue au printemps 2019. "Avec la formation, l'amélioration des textes législatifs, nous avancerons, à coup sûr, vers l'organisation des élections selon des normes internationales", décrétait, en octobre dernier, Abdelwahab Derbal, le controversé président de la Haute instance "indépendante" de surveillance des élections (Hiise). Mais cette ambition semble, a priori, contrariée : hier à Alger, l'essentiel des formations disposant d'un gisement électoral n'a pas répondu à son invitation. Une trentaine de formations seulement a répondu présent. En déclinant l'invitation de la Hiise, les partis politiques viennent, de nouveau, confirmer leur méfiance vis-à-vis d'une instance qu'ils ont dénoncée dès sa mise en place. Non seulement en raison de sa composante humaine, constituée seulement de magistrats et personnalités de la société civile désignés par le président de la République, mais également au regard des limites de sa mission, comme ils ont eu toute la latitude de le constater lors des élections de l'automne dernier avec le rejet de nombreuses listes pour des motifs parfois saugrenus.
Abdelwahab Derbal, lui-même, n'avait pas omis d'appeler, à la mi-octobre, l'administration "à faire preuve de discernement", estimant que le rejet de certaines listes ou candidatures "ne s'appuyaient sur aucune base juridique". Il avait regretté que les tribunaux aient "souvent opté pour la facilité en s'alignant sur les décisions administratives" avant de renvoyer, quelques jours plus tard, la balle dans le camp des partis. "S'il y a eu fraude, cela s'est fait à l'intérieur des partis par les militants", avait-il estimé au lendemain de la proclamation des résultats, comme pour laver de tout soupçon l'administration, principal acteur dans l'organisation des élections, et souvent pointée du doigt par l'opposition pour son parti pris en faveur des partis du pouvoir.
Pis encore : la Hiise ne semble pas avoir pris en considération les recommandations de la mission d'expertise électorale de l'UE dont le rapport publié en exclusivité par Liberté en juillet avait agacé Abdelwahab Derbal. "Le nouveau cadre électoral n'a pas modifié la structure de l'administration électorale. L'organisation des élections demeure de la seule compétence du ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales (Micl). La création de la Hiise a permis une constitutionnalisation de la surveillance des élections. Toutefois, cette dernière ne joue aucun rôle dans l'organisation même des scrutins, et ses attributions de supervision et de contrôle restent, de facto, limitées", relevait le rapport de la mission d'expertise électorale de l'UE. "La composition de la Hiise exclut, de facto, les représentants de l'ensemble des candidats ou forces politiques en compétition, alors qu'ils sont les premiers concernés par l'organisation des scrutins", avait-il ajouté.
Il faut ajouter à cela la question de l'Etat de droit, l'accès au fichier électoral, la levée du monopole sur la publicité, la révision de la loi électorale et celle sur les partis et les associations.
En somme, les experts de l'UE suggèrent la mise en place d'une instance indépendante qui sera chargée de l'organisation et de la supervision des élections dans ses différentes étapes ; ce qui corrobore, par bien des aspects, la revendication de l'opposition.
Si elle se conforme à une disposition constitutionnelle, à travers cette session de formation au profit des partis, la Hiise apparaît, toutefois, handicapée pour susciter quelque intérêt de l'opposition.
D'autant que la démarche, aux allures paternalistes, dissimule difficilement le souci des autorités face à l'absence d'engouement, pour l'heure, au prochain rendez-vous électoral. C'est dire que la mission de la Hiise s'annonce, pour le moins, laborieuse.
Karim Kebir


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