Quand les bruits de couloirs ne sont plus audibles, nous nous faisons un
plaisir de vous les faire parvenir. Musique.
Quelle est la langue officielle de l'Union européenne ? Les documents, discours
et débats sont traduits dans 22 langues officielles, vous répondent, non sans
grande fierté, ses dirigeants politiques. Sans doute, là est tout le problème :
l'Europe ne parle pas la même langue et peine à se faire comprendre. Tout de
suite un exemple : la cacophonie autour de la révision de la Convention de Schengen.
En raison de l'arrivée de quelque 25.000 migrants en Italie (25.400, annoncent
les services de l'immigration), tunisiens pour la plupart, un vent de panique
secoue les états-majors politiques européens, les poussant dans les bras d'un «
révisionnisme » politique mettant en péril les fondements de la longue
construction européenne que sont le droit, la justice et la liberté pour tous.
Ces fissures qui défigurent l'image de « l'Union » apparaissent et
s'aggravent, comble de l'ironie, au moment même où l'UE est admise au statut de
membre privilégié au sein de l'Assemblée générale de l'Onu. La représentante à
la politique étrangère de l'UE, Mme Catherine Ashton, sera la voix de l'UE à
l'Onu. Il lui faudra alors beaucoup d'imagination pour faire entendre la voix
d'une Europe qui ne parle pas du même avenir.
Autre exemple tout chaud : l'arrivée des frères bulgares et roumains dans
l'espace Schengen. Alors que la
Commission des libertés civiles du Parlement européen (PE) vient
de donner son feu vert à l'entrée de la Bulgarie et de la Roumanie dans l'espace
Schengen, voilà que la France,
l'Autriche, le Danemark et bien d'autres « démocraties » manifestent leur
opposition à ces deux membres de la famille européenne. Comme il faut l'unanimité
du Conseil européen (chefs d'Etat et de gouvernement) pour valider la décision,
il faut bien admettre que les Bulgares et les Roumains resteront encore un
temps exclus de la maison familiale européenne.
Dans ces conditions, que dire de
la question turque ? L'UE continue les négociations, chapitre par chapitre, avec
la Turquie
pour sa future adhésion à l'Union, pendant que plusieurs de ses membres
répètent qu'ils n'accepteront jamais la Turquie en Europe. Le président français Nicolas
Sarkozy a sonné, le premier, le pas de charge contre les « ottomans » dès son
arrivée au pouvoir : « La
Turquie n'est pas européenne et n'a pas le même héritage - entendez
judéo-chrétien - que l'Europe », a-t-il déclaré. Il n'est pas le seul à le
penser et à s'opposer à l'entrée des Turcs dans l'UE.
Mercredi dernier, à l'occasion de la tenue à Ankara d'une importante réunion du
Conseil de l'Europe (47 pays) dont la Turquie est membre, l'Autriche a rappelé son
refus d'admettre la Turquie
en Europe. Le gouvernement autrichien a annoncé que la question turque sera
soumise à un référendum populaire en cas de besoin. Cet avertissement
autrichien fait suite au soutien du Conseil de l'Europe à l'admission de la Turquie dans l'Union.
Le refus aux Turcs et les craintes et hésitations envers les Bulgares et
les Roumains se manifestent au moment des « angoisses » et sueurs froides dues
à la menace d'une invasion des peuples du Sud méditerranéen en terre européenne.
Conséquence : un délire politique qui noie la voix de l'Union dans des discours
populistes et nationalistes. Un dur exercice de style attend Mme Ashton à la
tribune de l'Onu pour parler au nom de l'Europe d'une seule voix.
Plus caricatural encore le débat
entre les Institutions européennes. Tandis que le PE dénonce les attaques
franco-italiennes contre le traité de Schengen, la Commission européenne, gardienne
des traités de l'Union, faut-il le rappeler, coupe la poire en deux pour dire
oui à une révision du traité de Schengen, tout en défendant son esprit (?). Les
gouvernements français, italien, allemand, belge… ont le mérite d'être clairs
dans leurs intentions. Pas la
Commission.
Pire : tout au long de cette
campagne contre l'arrivée des migrants tunisiens et autres en Italie, une
avalanche de mensonges et de contrevérités a été distillée dans l'opinion
publique. Encore des exemples ? Dire que l'Italie supporte seule le coût
financier de ces migrants est un mensonge. L'Italie (et nous l'avons écrit au
moment de la polémique) a reçu 10 millions d'euros du fonds d'aide aux réfugiés
entre janvier et mars de cette année. Elle a reçu 5 millions du même fonds en 2010.
Dire que seule l'Europe dépense de l'argent pour les réfugiés est un autre
mensonge. Le Haut Commissariat aux réfugiés de l'Onu participe dans une large mesure
à l'aide aux réfugiés. Dire que la Convention de Schengen est défaillante sur la
possibilité d'instaurer le contrôle temporaire aux frontières en cas de besoin
est faux. Le Traité de Lisbonne, signé en décembre 2007, dispose de cet
instrument dans son chapitre Schengen, article 2/2. Et la mesure a été mise en
application par la France
et l'Espagne au lendemain des attentats terroristes qui ont frappé Madrid en
mars 2004.
Pourquoi alors cette tempête médiatique qui alimente le repli sur soi de
l'UE ? En plus des enjeux électoraux, cela traduit un retour en force des
eurosceptiques à l'aune de la crise multidimensionnelle qui frappe l'Europe et
le monde. Du pain béni pour l'extrême droite. Chaque jour, l'UE lui offre une
opportunité d'entrer dans le jeu. Comme avec l'histoire des quotas ethniques
dans le football français...
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Posté Le : 08/05/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Notre Bureau De Bruxelles : M'hammedi Bouzina Med
Source : www.lequotidien-oran.com