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Décryptage des bons résultats de Wall Street Entreprises et banques abusent du «cost cutting» pour gonfler leurs profits


Décryptage des bons résultats de Wall Street Entreprises et banques abusent du «cost cutting» pour gonfler leurs profits
Les résultats du premier trimestre 2013 des entreprises américaines sont bons. De nombreuses sociétés battent le consensus des experts, les profits augmentent et les indices américains, S&P 500 et Nasdaq en tête, sont à leurs plus hauts historiques.
Le secteur des banques en est l'exemple : au bord de la faillite il y a deux ans, JP Morgan voit ses bénéfices bondir de 33% ce trimestre, Citi Goupe dépasse les espérances des investisseurs, Bank of America a dévoilé des bénéfices en forte progression, elle a réalisé un bénéfice net multiplié par 4 à 2,6 milliards de dollars à comparer avec une perte de 9,1 milliards de dollars un an plus tôt, tout va très bien madame la marquise...
Ce type de résultat semble contraster fortement avec le ressenti de la population américaine ou européenne où le seul horizon semble être le chômage qui augmente et le pouvoir d'achat qui décline. Mais il ne faut pas se leurrer, quand on regarde en détail les résultats des groupes financiers américains la situation n'est pas si idyllique.
Les bons résultats actuels reposent essentiellement sur une réduction drastique des coûts et sur des réorganisations en interne : ainsi, après avoir réduit ses effectifs de 7% l'année dernière (le chômage touche aussi durement le monde des traders), Morgan Stanley voit ses profits baisser de 1,4 milliard de dollars au premier trimestre 2012 à 1,2 milliard au premier trimestre 2013. L'exemple du secteur bancaire se répète dans toutes les branches de l'activité américaine : la «crise» a été une aubaine pour restructurer, dégraisser, rationaliser sans trop de contestation dans les entreprises américaines. Les bons résultats actuels sont en partie des effets d'aubaines liés à une diminution de la masse salariale via des plans de licenciement mais aussi des pressions sur les salaires. Beaucoup de cadres ont accepté de diminuer parfois de plus de 20% leur salaire pour conserver leur emploi.
Rappelons ironiquement qu'en 2005 et 2006, la principale crainte des économistes était la croissance trop rapide de l'économie américaine qui favorisait une situation de plein emploi. La productivité américaine était alors en danger car les salaires augmentaient plus rapidement que les gains de productivité et les craintes inflationnistes se faisaient jour. La Réserve fédérale américaine, avec Alan Greenspan, ne cessait de s'émouvoir de cette situation et l'objectif était de faire «atterrir en douceur l'économie américaine» (sic) qui croissait trop rapidement afin de stabiliser les salaires et l'inflation. Pour cela, la FED a augmenté les taux d'intérêts, trop rapidement, pour «ralentir» la croissance provoquant la crise des subprimes et son effet boule de neige à l'échelle mondiale. L'atterrissage en douceur de l'économie américaine a plutôt été un joli krach mais une partie de l'objectif est finalement atteint : la productivité américaine est revenue forte, Airbus n'hésite pas à ouvrir des usines aux Etats-Unis d'Amérique saluant la qualité des ouvriers américains qui sont bien formés et pas chers...
Le seul problème est que le «cost cutting» n'est pas infini et ne parviendra pas à préserver les marges de ces entreprises bien longtemps. L'économie réelle finira par se retrouver dans les comptes des entreprises. Il arrivera un moment où les coupes dans la masse salariale et les efforts de rationalisation montreront leurs limites... Par exemple, malgré une progression de 33% de ses bénéfices ce trimestre, JP Morgan annonce que son activité des prêts immobiliers continuent de baisser et que les activités bancaires de ses clients stagnent alors que celles-ci représentent 50% de son activité. Et oui, il faut des consommateurs avec un pouvoir d'achat pour faire tourner une économie...
B. R.
*Benoist Rousseau est informaticien et historien économiste diplômé de l'Université Paris Sorbonne.
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