Algérie

DECODAGES L'Algérie : un véritable «paradis fiscal» !



Par Abdelmadjid Bouzidi
abdelmadjidbouzidi@yahoo.fr
Les recettes de recouvrement des impôts (fiscalité ordinaire) auraient progressé de +13 % par rapport aux objectifs de la loi de finances complémentaire de 2011, si l'on en croit le DG des Impôts. C'est la nouvelle Direction des grandes entreprises (DGE) qui a réalisé les meilleures performances en matière de recouvrement d'impôts. Créée en 2006 avec 800 entreprises, elle traite aujourd'hui 2 034 sociétés pour moitié algériennes et l'autre moitié étrangères.
Les recouvrements de la DGE ont progressé de + 80 % entre 2006 et 2010 : 265 milliards de dinars en 2006 et 512 millions de dinars en 2010. Cette direction générale recouvre 50 % de la fiscalité ordinaire totale. Cette évolution positive du recouvrement des impôts ne doit pas cacher, cependant, que la fraude fiscale est encore chez nous très importante. Il est bien sûr extrêmement difficile de l'évaluer avec précision. La Direction des impôts signale, par exemple, que s'agissant du secteur privé soumis à l'impôt, sa contribution fiscale effectivement recouvrée est évaluée à quelque 1,2 % du PIB au moment où ce secteur réalise plus de 80 % de la valeur ajoutée globale (hors hydrocarbures). Les chiffres que rappelle de temps en temps l'administration fiscale pour répondre aux demandes d'exonérations ou d'abattements fiscaux que présentent régulièrement les opérateurs économiques privés, sont inquiétants pour nos finances publiques mais aussi bien sûr pour notre sens du civisme, de la citoyenneté et de la solidarité. Il y a, nous dit l'administration fiscale, un développement important de la fraude fiscale dans notre pays.
Quelles sont les formes de manifestation de la fraude fiscale en Algérie '
Mais, en premier lieu, qu'est-ce que la fraude fiscale ' C'est une «violation consciente ou non de loi fiscale». C'est, précise l'administration fiscale, «un ensemble de combinaisons juridiques, comptables ou de procédés matériels pour éluder l'impôt». L'évasion fiscale a un autre sens qui renvoie à un autre phénomène plus difficile à cerner car pouvant avoir plusieurs causes y compris celles provenant de l'administration des impôts elle-même qui peut délaisser des niches fiscales, sans évaluer l'assiette imposable ou encore tolérer les activités informelles. La fraude fiscale, contrairement à l'évasion fiscale, est un «délit passible de tribunaux et de peines privatives de liberté». Chez nous, hélas, fraude et évasion fiscale sont des réalités assez répandues.
Les formes de manifestation de la fraude fiscale en Algérie
L'administration des impôts cite :
1/ L'achat et la vente sans facture. Ce phénomène est, chez nous, très fréquent. Il porte préjudice à l'économie nationale sous deux aspects :
a) le Trésor public perd la TVA qui est prélevée par les commerçants et non reversée ;
b) la concurrence déloyale se généralise, les prix des commerçants sans facture étant nettement plus compétitifs que ceux pratiqués par les commerçants loyaux.
2/ L'administration des Impôts a aussi constaté une pratique particulière aux commerçants algériens : ces derniers louent leurs registres de commerce à des commerçants fictifs, insaisissables par le fisc.
3/ Les avantages fiscaux accordés par le code des investissements sont détournés par de faux investisseurs qui n'utilisent leurs agréments que pour bénéficier de ces avantages fiscaux.
4/ La multiplication des marchés informels entraîne des pertes considérables pour le fisc compte tenu de la masse importante des marchandises commerciales et des masses d'argent qui y circulent.
5/ Un marché immobilier non transparent et spéculatif. Des transferts de revenus importants y ont lieu à l'occasion de mutations de biens immobiliers. Cette non-transparence est aggravée par les sous-déclarations systématiques aussi bien lors des ventes des biens immobiliers que lors de leur location.
6/ Les activités libérales, en l'absence de mode de tarification réglementée, restent très faiblement fiscalisées.
7/ On peut ajouter à toutes ces pratiques frauduleuses, la non-utilisation des moyens modernes de paiement et notamment le chèque. Tout s'achète et se vend en espèces. C'est la pratique de la «ch'kara» (le sac).
Les causes de la fraude fiscale le plus souvent citées par notre administration des impôts sont celles qui ont trait à :
• l'ouverture commerciale
• la déréglementation du système des prix • les facilités d'obtention du registre de commerce
• la faiblesse du contrôle des administrations économiques (c'est, nous semble-t-il, surtout ici, que le bât blesse). Que peut-on conclure à la suite de ce tableau bien inquiétant ' Qu'une administration du fisc qui collecte très mal l'impôt est un signe alarmant de la fragilité de l'Etat.


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