Algérie

DECODAGES



Par Abdelmadjid Bouzidi
abdelmadjidbouzidi@yahoo.fr
La démocratie est un régime politique, c'est-à-dire une certaine manière d'organiser les relations de pouvoir entre individus et groupes sociaux appelés à vivre ensemble. Dans ce régime politique, la démocratie, toutes les relations de pouvoir sont tissées entre ceux qui obéissent et qui acceptent de le faire parce qu'ils jugent de leur intérêt bien compris d'obéir aux ordres énoncés par des individus qu'ils ont librement choisis et qu'ils estiment compétents pour conduire des entreprises et des aventures collectives.
En démocratie, toute position de pouvoir résulte de délégations consenties par des «obéissants» à des «compétents » à titre temporaire, circonscrit et réversible. La démocratie est possible sous quatre conditions :
1/ La stabilité du cadre social. Si ce cadre ne cesse d'être bouleversé, l'expérience démocratique capote.
2/ La démocratie ne fonctionne pas dans des sociétés isolées. Le contexte mondial, démocratique est indispensable à la réussite de l'expérience démocratique nationale.
3/ La démocratie suppose l'existence de contrepouvoirs. Aucun pouvoir, en effet, ne se contrôle lui-même.
4/ Les acteurs de la démocratie doivent développer un certain nombre de qualités qui leur permettent de gérer une démocratie.
Au vu de ces premières observations, l'Algérie est-elle prête à la transition démocratique, à la construction de la démocratie ' La thèse qui a prévalu jusqu'à maintenant dans notre pays est celle qui défend l'idée selon laquelle «au commencement de la démocratie, il y a le développement économique». Il faut attendre, nous dit-on, que le développement ait atteint un certain seuil pour engager la transition démocratique tout en prenant le risque que celle-ci puisse se produire de façon spontanée et dévastatrice bien avant ce seuil comme les processus actuellement en œuvre dans les pays du printemps arabe nous l'enseignent et sans garantie de résultat probant.
• La seconde thèse qui semble s'imposer de plus en plus est celle qui consiste à décider d'engager sérieusement la transition démocratique pour donner l'assise la plus large aux efforts de développement. Avec l'arrivée de Bouteflika aux commandes de l'Etat, c'est la thèse de l'Etat fort et du report de la transition démocratique à plus tard qui a été en œuvre. Deux raisons sont avancées pour justifier cette approche :
1) L'ouverture démocratique de la fin des années 80 dans une Algérie non préparée au pluralisme politique a ouvert la voie aux islamistes radicaux qui auraient pu utiliser la démocratie pour tuer la démocratie. L'expérience a été courte mais dramatique et dévastatrice.
2) Bouteflika rappelait alors à ceux qui voulaient l'entendre, et dès sa première mandature, que le peuple algérien a besoin avant toute chose d'emplois, d'éducation, de logements, de revenu décent et non pas de démocratie dans la pauvreté ni de pluralisme politique qui au mieux «donnerait un sens à la misère». Il s'en est suivi la période que l'on vit actuellement avec fermeture politique, étatisme et effort de relancer la croissance pour justifier le déni de démocratie.
• L'autre point de vue qui est défendu dans le pays est celui qui insiste sur la nécessité d'engager sérieusement la transition démocratique dans une Algérie qui aujourd'hui est forte d'une jeunesse éduquée, ouverte au monde et qui entend prendre toute sa part dans la modernisation de la société. L'épisode islamiste tragique doit continuer à être analysé pour rectifier la démarche d'ouverture qui ne doit plus jamais déboucher sur une tragédie comme celle qu'on a connue mais dans le même temps, on ne doit pas brandir ce risque pour justifier le déni de démocratie. Au plan économique, l'échec du socialisme notamment sous les coups de boutoir du capitalisme mondial a sonné le glas de l'étatisme, de l'interventionnisme, de la gestion centralement administrée et mis à l'ordre du jour l'économie de marché. Même au nom du productivisme et de la gestion «rationnelle» de l'activité économique, l'économie de marché semble avoir prouvé sa plus grande performance, peut-être encore plus aujourd'hui qu'hier, dans un contexte de mondialisation libérale de l'économie. Les partis communistes chinois et vietnamien l'ont bien compris, eux qui ne rejettent plus l'ouverture, la propriété privée et les mécanismes de marché dans la gestion de leurs économies. Chez nous, le débat croissance, économie de marché et démocratie ne peut plus être reporté sous peine d'être «ce cycliste qui doit son équilibre à sa vitesse mais qui risque une collision grave au premier obstacle incontournable». L'étape qui s'ouvre ne peut être que celle de la démocratie. Nous avons l'argent, les ressources, les hommes et les femmes... il nous manque la démocratie qui aujourd'hui est, chez nous, l'unique mode d'emploi pour réussir l'envol.




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