"Celui qui ignore la poésie ne connaît pas la route de l'intelligence qui conduit à la sagesse par les degrés de la science et de l'art." Chanson par Embarek Es soussi. Un poète n'est pas qu'un artiste au sens où on l'entend. Il participe de l'histoire de son temps et de son pays, de la famille et de la société qui l'ont modelé sans parvenir à le corrompre, des injustices et des bonheurs de ses contemporains. Un poète se doit sans doute plus encore d'être vivant parmi les vivants. Seuls des enfants immatures peuvent encore se demander si la poésie, si l'art sont utiles. La chanson populaire serait le chant par lequel les Bédouins rythmaient le déhanchement des caravanes pour animer les soirées étoilées autour d'un gîte d'étape. A ces chants, même les chameaux sont sensibles, au point qu'ils oublient le poids de leurs charges et la longueur du voyage et, ainsi excités étendent leur cou pour le chanteur : pour exhiber une très folle farandole. Ces chants de chameliers ne sont rien d'autre que des poèmes pourvus de sons agréables qui ont donné naissance au fameux mode «Ayaia» dans lequel le vénéré maître Khelifi Ahmed excelle pour exprimer dans un lyrisme sans pareil le message des Ouled Naîl. Même les paroliers tel que Cheikh Ben Guittoun n'ont point lésiné sur cet héritage pour compléter la plus belle œuvre d'amour de Hizia. En effet, cette poésie populaire est un art musical qui aboutit à l'extase. La culture populaire au Maghreb revêt une immense richesse, bien qu'elle fut surtout transmise oralement. Depuis l'ouverture à l'université de Tlémcen (Algérie), d'un troisième cycle spécialisé en "culture populaire", des écrits qui sont surtout des thèses de Magister ou doctorat, sont venus enrichir la connaissance de ce patrimoine poético musical qu'est le chaâbi qui est la plus élaborée des formes de versification écrite en arabe dialectal. L'origine de ce nouveau mode musical dit lyrique est un poème mélodique issu d'une culture authentiquement maghrébine qui remonte au XIIe siècle, et emprunte ses modes à la musique arabo-andalouse en simplifiant ses modes et se développe sous une forme littéraire, ne respectant pas la structure grammaticale classique (la Qasida). Il est un imposant corpus de poèmes et de chants véhiculés par une double tradition orale et manuscrite, représentant un art plus élaboré des formes de versification notamment en arabe dialectal. Les exodes de populations ont eu toujours de grands impacts sur la vie culturelle des sociétés et notamment sur leur production musicale. Ces impacts peuvent aussi revêtir la forme d'une mutation linguistique. On peut puiser de multiples exemples dans l'histoire socioculturelle du Maghreb. La venue des tribus hilaliennes en Afrique du Nord sous les Almohades a eu pour conséquence de féconder la musique, cela avait donné naissance à la poésie chantée dite «Chi'r al-Malhoun» laquelle devait sceller la communion arabo-berbère. Quand vint le moment de conquérir l'Andalousie, un grand mixage se produisit alors dans cette rencontre entre trois cultures, l'ibérique, l'amazighe et l'arabe qui finit par accoucher de la musique andalouse.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 22/11/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Mohamed Bentaleb.
Source : www.horizons.com