Algérie

DÉCHETS MÉNAGERS, DÉCHARGES ANARCHIQUES, EAUX USÉES, POLLUTION DE L’AIR… L’Algérie malade de… son environnement !



DÉCHETS MÉNAGERS, DÉCHARGES ANARCHIQUES, EAUX USÉES, POLLUTION DE L’AIR…  L’Algérie malade de… son environnement !




La Gendarmerie nationale a traité, en effet, 18.541 affaires d’atteinte à l’environnement durant le premier semestre de l’année 2017 et interpellé 9.873 personnes, selon le bilan publié par ses services.

Une catastrophe écologique s’amplifie de jour en jour tout près de la résidence universitaire 3.000-Lits sise à Tamda, commune d’Ouaguenoun, dans la wilaya de Tizi Ouzou. Des eaux usées se déversent à fort débit dans l’oued qui longe toute l’enceinte de la cité universitaire. Une odeur nauséabonde se répand, des moustiques envahissent l’endroit pourrissant la vie des résidents et portant atteinte à la salubrité des infrastructures de cette cité, notamment les dortoirs mais surtout le restaurant!

Voulant protéger la résidence universitaire, la direction de l’hydraulique de Tizi Ouzou (DHW), a creusé une tranchée d’une longueur de près de 150 mètres dans une propriété privée, située près de cette cité. Cet acte, faut-il le préciser, a été réalisé par la DHW sans se soucier de l’appartenance du terrain en question. Les travaux ont été effectués sans autorisation ni permis, déviant le cours normal de l’oued et isolant de ce fait une partie dudit terrain. Pourtant, un cours normal et initial de l’oued existe et n’a pas été suivi par ces responsables au début des travaux. Les intempéries et la force de l’eau qui coule sur ce nouveau canal ont provoqué des éboulements de chaque côté de la tranchée. Une végétation sauvage pousse tout le long des deux berges de ce canal devenu une véritable zone marécageuse à un jet de pierre de la cité.

L’eau de cet oued, à la pureté avérée, exploitée jadis par les agriculteurs de cette localité pour irriguer leur champ, est désormais polluée. Certains fellahs malveillants n’hésitent pas à utiliser cette même eau contaminée pour l’irrigation de leurs exploitations agricoles, et ce, au grand dam des consommateurs. Cette atteinte à l’environnement à ciel ouvert se produit …naturellement devant le regard apathique, voire complice des autorités locales.

Sollicité, le chef de daïra d’Ouaguenoun, de l’époque, a informé verbalement le propriétaire terrien que les services de la wilaya avaient décidé de suivre le cours initial de l’oued et de supprimer la tranchée creusée sur sa propriété. Or, à ce jour, cette décision n’a jamais été prise. Cet exemple résume parfaitement le laxisme des responsables locaux et leur désintérêt total aux questions environnementales qui interpellent toute la wilaya. Des milliers de cas identiques sont, faut-il le souligner, constatés à travers tout le territoire national. La Gendarmerie nationale a traité, en effet, 18.541 affaires d’atteinte à l’environnement durant le premier semestre de l’année 2017 et interpellé 9.873 personnes, selon le bilan publié par ses services.

- 23 millions de tonnes de déchets au niveau national

La même source relève une augmentation de 59% des affaires d’atteinte à l’environnement (11.685 affaires) et de 50% de personnes interpellées (6.577 personnes) par rapport à la même période de l’année précédente. L’action des unités de la Gendarmerie nationale a porté sur les délits liés à la gestion des déchets qui représentent 55% du nombre global des affaires traitées. Les délits les plus répandus concernent le dépôt de déchets dans des lieux publics suivis de ceux liés à l’urbanisme avec un taux de 27% et, enfin, ceux ayant trait à la protection de l’environnement et au système forestier avec 11%. L'Agence nationale des déchets (AND) a enregistré près de 23 millions de tonnes de déchets au niveau national en 2016 dont 11,5 millions de tonnes de déchets ménagers, 11 millions de tonnes de déchets inertes, 0,4 million de tonnes de déchets spéciaux et 2% de produits dangereux. Le tissu industriel en Algérie génère annuellement plus de 325.000 tonnes de déchets tous types confondus, estime un responsable à la direction générale de l’environnement et du développement durable au ministère, soulignant que près de 50% de ces volumes peuvent être recyclés au sein même des unités industrielles.

- Gestion inefficace des déchets !

Le directeur général de l'AND a fait savoir que plus de 400 hectares de terre au niveau du littoral ont été affectés aux opérations d'enfouissement technique des déchets, sans compter les autres superficies attribuées dans le reste des wilayas. Le cas de la commune de Toudja, dans la wilaya de Béjaïa est également édifiant. Cette localité, très prisée durant la saison estivale pour ces endroits féériques, souffre, malheureusement, d’un manquement énorme aux règles d’hygiène et au bon développement de l’écosystème. Des dizaines de tonnes d’ordures ménagères, relate le journal El Watan, finissent sur les accotements de la RN24 reliant Béjaïa à Tizi Ouzou. Une vue affligeante, caractérisée par un amas de déchets jetés à même le sol s’offre à ces milliers d’estivants se rendant vers cette région. L’air qu’empeste la fumée émanant de ce tas de détritus incinérés les asphyxie et rend leur passage par ce tronçon infernal.

- Toudja asphyxiée !

Le ramassage des ordures sur cette côte nécessite des moyens logistiques plus appropriés. À Oran, la direction de l’environnement de la wilaya a lancé une étude visant à établir un plan d’urgence pour la gestion des stocks des déchets spéciaux et déchets spéciaux dangereux. Cette étude, réalisée par le cabinet d’études environnementales et risques industriels (Ceeri), a révélé que plus de 200.000 tonnes de déchets spéciaux et déchets spéciaux dangereux sont générées annuellement au niveau de la wilaya.

- Bousfer : une plage polluée par les eaux usées

À Bousfer, une agréable station balnéaire située tout près d’Oran, une magnifique plage prisée par des milliers d’estivants est polluée en ce moment par les eaux usées déversées chaque jour dans la mer par un centre de repos et de vacances construits pour les officiers de la Police algérienne. À Annaba, il est posé un problème de l’urbanisme environnemental. L’environnement urbain ne semble pas prendre en compte le problème de l’étalement de la métropole, au détriment des forêts, sites de plus en plus convoités.

- Annaba : des forêts phagocytées par le béton

En dix ans, des centaines de milliers d’hectares de forêt à Annaba ont été détruits et les montagnes grignotées au profit de l’urbanisation immobilière. D’où le déséquilibre créé suite à la poussée du béton sur la nature. La construction est considérée comme l’un des facteurs principaux de la destruction de la flore et la disparition de la biodiversité autour de cette wilaya. Dans la capitale, le constat établi quant au rejet et à l’abandon des détritus sur la voie publique est passé du simple au double. Plus de 2.438 interventions quant aux atteintes à l’environnement ont été signalées.

- Alger : déversement anarchique des eaux usées sur la voie publique

Les citoyens ne prennent pas la peine d’évacuer les détritus vers les endroits spécialement aménagés à cet effet. Cette opération a un coût et les gens rechignent à payer. Le bilan de la police fait encore état de la hausse des cas de déversement anarchique des eaux usées, souvent sur la voie publique à Alger. À Tizi Ouzou, les citoyens renâclent à consommer l’eau du robinet à cause de sa couleur qui tend vers le marron.

- Tipasa : deux millions de bouteilles ramassées !

À Tipasa, un citoyen volontaire a indiqué qu’après le calcul du rythme de deux bouteilles ramassées par seconde, le nombre total a avoisiné le million de bouteilles collectées. Dans cette même wilaya, le groupe Tonic, spécialisé dans l'industrie du papier, s'était engagé à traiter définitivement, en l'espace de deux mois, tous ses déchets industriels à l'origine de la pollution du littoral de Bou Ismaïl.

- Collo : l’oued Cherka, une menace pour l’environnement

À Collo, l’oued Cherka est en passe de devenir une sérieuse menace pour l’environnement. Des entreprises de bâtiment ne se gênent pas pour déverser du béton et d’autres déchets dans cet oued en dépit des panneaux d’interdiction se trouvant le long de la rivière. Cet oued est devenu un grand réceptacle de divers rejets d’huiles usagées, d’ordures ménagères et de déchets béton et de gravats.

A Ouargla, plus de 200 tonnes de déchets ménagers sont traités seulement sur 480 tonnes produites chaque jour dans cette wilaya. Ce qui signifie que le reste, soit 280 tonnes qui ne sont pas traitées, est constitué de décharges anarchiques formant des points noirs qui pèsent lourdement sur la santé de l’homme et l’environnement. Par ailleurs, dans un article publié le 22 août, par Ian Johnstone, correspondant au journal britannique The Independent, le carburant utilisé par l’Algérie se retrouve parmi les carburants les plus toxiques au monde. Il est composé de plomb-tétraéthyle: un liquide extrêmement dangereux pour la santé. Or, Greenpeace, avait déjà signalé auparavant au gouvernement britannique de la nécessité de bannir toute exportation, usage de ce liquide, pouvant causer la mort prématurée et des lésions cérébrales.

- Du plomb dans le carburant algérien

La problématique de la gestion des déchets ménagers et, plus généralement, de l’environnement urbain est parmi les plus complexes en raison de son lien avec la santé humaine, la planification spatiale et le développement durable. Si l’on se réfère aux statistiques inquiétantes des infractions commises en matière de protection de l’environnement en six mois, l’on doit accepter le verdict de l’inexistence de toute culture environnementale qui doit prévaloir en tous lieux dans notre pays. L’Algérie fait face encore à de sérieux problèmes de pollution. Les contaminations engendrées par le rejet des eaux industrielles non traitées, les émissions de gaz nocifs, la production de déchets dangereux, la déforestation, la désertification et la dégradation de l’écosystème, le jet anarchique des ordures, autant de calamités qui remettent en cause la stratégie adoptée jusque-là par les pouvoirs publics. Les sept ministres en charge de l’Environnement qui se sont succédé depuis 2012, faut-il le préciser, n’ont fait que déployer des solutions d’urgence sans définir une politique environnementale à long terme.

Cela dit, les pouvoirs publics, par le biais du ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement, ont mis en place un programme national de gestion des déchets solides municipaux (Progdem). Les résultats enregistrés en matière de protection de l’environnement et de lutte contre ces fléaux sont en deçà des attentes. Face à cette épineuse problématique, la ministre de l’Environnement a annoncé la mise en place d’un numéro vert destiné au signalement ainsi qu’à la lutte contre les infractions et les atteintes à l’environnement.

La ministre a annoncé également la mise en service d’une unité de transformation des sachets en plastique d’une capacité de 2 tonnes par jour. Fatma-Zohra Zerouati a cependant affirmé qu’“en Algérie, on consomme annuellement 7,7 milliards d’unités en plastique”. L’unité permettra la réduction de ces sachets de 24% dans la capitale. Face à cette alarmante situation, une nouvelle stratégie, fondée sur la concertation, la communication et la participation de tous les partenaires concernés doit être élaborée. L'Algérie devra se doter aussi d'un parc d'usines de traitement de déchets avec un système de tri sélectif, de valorisation et de recyclage des déchets.


Photo: Des eaux usées coulent à flots, pourrissant la vie des résidents. © D.R

Badreddine KHRIS







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