Algérie

«De la politique de la ville au développement local et durable... ou l?histoire d?un échange entre Villiers Le Bel et Ras El-Aïn...»



Des élections communales à forte implication partisane censées légitimer et réguler tout un processus de développement local d?une société civile, vecteur de besoins énormes exprimés par une population très jeune, tout cela aurait dû déclencher une dynamique nationale de développement, alimentée par des potentialités financières que nous envient beaucoup de pays par comptables interposés.La surprise de constater au niveau des médias- cette série  de «forfaits» que certains qualifient de «blocages» d?APC/municipalités, à cause de désaccords imputés à l?absence de quorums dans les assemblées communales, de négociations interminables et de tout un folklore populiste qui intéresserait plus d?un anthropologue, nous renvoie à diagnostiquer les causes réelles de cette paralysie qui risque de perdurer et de «chroniciser» la politique de l?émeute déstabilisant la société algérienne, non seulement du point de vue institutionnel mais aussi, au niveau culturel, avec la déstructuration, à moyen terme, de groupes sociaux qui avaient représenté un semblant de société civile.Cela nous renvoie au consensus de la presse sur ce constat de l?absence de programmes structurants chez la majorité des partis en lice pour les APC/APW, les décennies passées. La focalisation, aussi, de certains partis de l?opposition sur l?absence des nouveaux codes communal et de wilaya, présage de la présomption d?innocence aux futurs dérapages des «gestionnaires» locaux avec, comme non-lieu, le vide juridique.Toute politique de développement est déterminée par l?opérationnalité d?un ensemble de structures, tant du point de vue transversal que vertical; tout cela légitimé, codifié et réactualisé par les instances législatives, elles-mêmes interpellées, d?une façon constitutionnelle, par les centaines de réseaux associatifs, des dizaines de milliers d?associations qui maillent la société civile ayant exprimé ses besoins sociaux, économiques et culturels. Et il reste étonnant qu?une partie de l?opinion publique nationale n?ait pas intégré le postulat que le parti politique est, avant tout, une association à caractère politique comme existent d?autres associations à caractères syndical, sportif, environnemental, culturel, de jeunesse, corporatistes, de loisirs scientifiques, de femmes battues, en archéologie...; la liste est ouverte sous réserve du respect de la loi.Néanmoins, les prérogatives associatives ne doivent aucunement échoir aux seuls partis politiques «ayant pignon sur boulevard» et monopoliser, à elles seules, les doléances/besoins du peuple/société locale. Cela porterait atteinte aux idéaux démocratiques par la canalisation/récupération -par sous-traitance- des besoins/problèmes de milieux choisis et non ciblés méthodologiquement, suite à une analyse participative de la population. L?absence d?un diagnostic du territoire, sa monographie et ses problèmes restent le grand hic d?une politique locale qui ne peut fonctionner sans lui. Cette méthodologie de projet (1) reste, de par le monde, l?outil essentiel pour déterminer cette planification par objectifs (1), censée solutionner les problèmes réels et urgents de municipalités qui se limitent à être représentées dans notre inconscient collectif par les bennes à ordures de «la commine» tenue pour seule responsable d?une hygiène publique qui implique, de par le monde, un secteur associatif allant de l?environnement au culturel en passant par les professionnels de la médecine sociale et du tourisme vert. Encore faudrait-il que «la logique de la fourchette» soit respectée, c?est-à-dire que la «descente» des énormes budgets des structures du pouvoir central, engloutis dans le cadre de l?aménagement du territoire, rejoigne «la montée» les besoins des sociétés et les développements locaux exprimés par la pyramide des dizaines de milliers d?associations dont les doléances sont canalisées vers le haut par les dizaines de partis, associations, légitimées et représentées au niveau des deux chambres, pour être légiférées.Ainsi la démocratie participative retrouve toute sa raison d?être; il ne peut rester que les mécontents des minorités qui ne peuvent menacer l?équilibre socio-politique d?une nation ainsi que son avenir!Nonobstant le développement local purement économique ou à caractère industriel et commercial, il est à constater dans nos ensembles urbains où plus de la moitié de la population est concentrée, une tendance nette à la fracture du lien social menaçant la cohésion de notre société par des atteintes permanentes à cet espace public et aux moeurs que les Français qualifient, chez eux, d?«incivilités» et qui sont aggravées, chez nous, par les conflits/rapports de voisinage à forte connotation culturelle, pour ne pas dire idéologique et religieuse.Cette problématique de la gestion de la proximité est antérieure, en France, aux évènements de Villiers Le Bel et nous rappelle les Z.U.P. (2) de Lyon Vénissieux où deux cultures et modes de vie qui coexistaient se sont affrontés parce que l?une fût confinée dans un rôle périphérique et exclue du circuit économique (exclusion scolaire et chômage). D?origine algérienne, maghrébine et africaine, les fils de l?immigration, de nationalité française, revendiquent leur droit à l?égalité des chances. Le Plan Banlieues (3) de Fadéla Amara, porté et médiatisé par Nicolas Sarkozy, reste audacieux même si certains y voient un sursis aux émeutes. Néanmoins, il a le mérite d?exister et prouve que l?inter-culturalité ne peut durer que grâce à une méthodologie de projet issue de diagnostics de territoires qui ne se limitent pas seulement à la France.L?utilisation du modèle français de la gestion de la proximité, la cohésion sociale et la politique de la ville n?est pas fortuite de ma part. Il s?avère que la création au niveau juridique et structurel d?institutions à même de freiner cette contestation rampante qui fait peur aux Français des précédentes républiques, a été rendue possible sous l?effet de l?urgence d?une variable externe au paysage socio-politique qu?a connue la France avant la «décolonisation»: le transfert des harkis et leurs familles puis l?immigration principalement maghrébine.Ce bagage encombrant de la décolonisation s?avérera un engin à retardement que ne pouvaient ignorer les artificiers de la bombe sociale. La Délégation interministérielle de la ville (3) (DIV) reste une boîte à outils multidisciplinaire au niveau de la gestion des communes/municipalités, en imbrication avec les conseils régionaux et généraux de France, partenaires de nos wilayas et super-wilaya(s).L?interdisciplinarité et les compétences mobilisées en collaboration avec le secteur associatif, partenaire incontournable du développement local, font que la gestion de la société locale par une médiation sociale, presque professionnalisée, a acquis une expérience -grâce au partenariat associatif issu de l?immigration- qui se révèle être une opportunité déjà réglementée par l?Etat algérien dans le cadre d?accords de jumelage (Euromed, bilatéral) de ses villes avec leurs semblables en U.E., en France, en raison de fortes concentrations d?immigrés issus d?une même ville algérienne supposant de forts échanges de populations, familles et intérêts réciproques. Là aussi, la Planification de Projets par Objectifs (PPO) a son avis et ses régles. Les opportunités sont réelles là où les menaces pour un projet structurant et récurrent sont très faibles. Donc, telle ville ou wilaya a intérêt à signer un accord de jumelage avec une ville française (ou autre) où existe une forte proportion de ses fils émigrés. L?intérêt reste réciproque puisque la ville française pourra orienter l?investissement économique et culturel de ses entreprises vers cet espace où la communication reste disponible. La liste des retombées est ouverte -pour le développement local, selon les opportunités économiques et agro-alimentaires existant dans cette région du point de vue emplois, tourisme mémoriel d?anciens natifs d?Algérie par voie associative, échanges culturels entre la Nouvelle-Calédonie et des associations de jeunes lycéens, échanges entre jeunes issus de la troisième génération d?immigrés venant voir le lointain et mythique pays de leurs aïeux et des scouts surpris par un programme de visites de la commune de Verdun, les invitant au carré des anciens combattants que furent leurs arrière-grands-pères clôturé par une virée à la ville de Nice libérée par les tirailleurs nord africains pendant la Seconde Guerre mondiale...Régenter le tourisme de façons administrative, sécuritaire, avions spéciaux vers l?Assekrem, n?est d?aucune opportunité pour le développement local. Il exclut, des territoires, les jeunes et le tourisme populaire. Le trait d?union de l?émigration reste sous-exploité en tant qu?opportunité de la Gestion de Cycle de Projet.Des wilaya(s) ont été jumelées avec plusieurs villes de France où des élus, fonctionnaires et animateurs du monde associatif sont issus de l?immigration. Alger reste jumelée à Marseille (PACA) et le bilan est réel mais non médiatisé. Oran est jumelée à Bordeaux, dans des domaines d?activités qui se limitaient à la gestion des déchets, l?urbanisme et des spécialisations universitaires. La présidence de l?APC s?annonce méthodologique puisque occupée par un chercheur du Crasc (4) qui connaît son diagnostic du territoire. Sétif est jumelée à Rennes, Constantine à Grenoble, Béchar à Nantes...Beaucoup de villes et wilaya(s) ne sont pas jumelées comme Sidi Bel-Abbès qui a la plus grosse concentration de ses enfants en Ile de France (région parisienne) issus du monde ouvrier et des universités mais dont la société civile originelle peine à se structurer et ne peut, ainsi, influer sur un réseau associatif en pleine léthargie.Le développement durable reste assujetti à la volonté politique des pouvoirs publics obnubilés par la gestion de l?état d?urgence et l?omniprésence d?un terrorisme potentiel bien plus civil -selon mon analyse- qu?idéologique, puisque alimenté par l?exclusion de centaines de milliers de jeunes en situation d?angoisse pré-pathologique.Le développement local n?est plus un slogan. Il a fait ses preuves dans d?autres pays. Les collectivités locales doivent être aussi gérées par des experts multidisciplinaires, allant du docteur en biologie, architecte/urbaniste, anthropologue, économiste et professeur émérite en histoire des civilisations, à l?administrateur des corps communs.Terminons cette contribution de façon très pédagogique:«Pas de développement local sans société civile, pas de société civile sans réseaux associatifs, pas de démocratie sans société civile!»Â  * Psychologue, formateur en gestion de cycle de projet , INFSCJS (5) Aïn El-Turck/Oran: mouradhoussine@yahoo.fr


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