Algérie

De La Laïcité En Islam Selon Mohammad Abid Al-jâbirî.



Le terme de «laïcité», attribut de la modernité dans le monde occidental, est frappé d’anathème dans le Monde arabe et islamique. Il est même pris curieusement pour synonyme d’athéisme. Mohammed Abid Al-Jâbirî, philosophe marocain, lui consacre un article entier et semble, probablement dans une visée tactique, vouloir contourner ce terme fortement connoté en proposant de le remplacer par «démocratie» et «rationalisme». Pour montrer que ce terme suscite une fausse problématique et est «inadéquat» au Monde arabe et islamique, il cherche une validation de sa visée dans l’histoire islamique ancienne : celle de la période inaugurale, précisément l’épisode du conflit politique dit de saqîfat banî sâ’ida, relatif à la succession du Prophète et la manière dont celui-ci a été résolu ; puis celle des califes bien-guidés et la manière dont la succession, sous des formes très diverses a eu lieu, pour enfin culminer durant la période dite de Mu’âwiyya et son célèbre discours sur sa gouvernance débarrassée de tout fondement théologique. La multiplicité des formes historiques de succession en pays d’Islam corrobore l’absence effective d’une forme d’Etat prescrite dans les textes sacrés (Coran et Sunna). De plus, l’Etat théocratique correspond à une sociologie politique que l’on ne peut reproduire aujourd’hui. Jâbirî a, sans doute, raison d’affirmer que l’Islam n’a pas d’église pour qu’on ait à le séparer de l’Etat. Il n’en demeure pas moins cependant, que la fatwa - décret religieux rendu par une autorité musulmane reconnue- est censée être exécutoire pour tout Musulman, quel que soit le lieu où il réside. Des expériences récentes ont rendu cette idée plus précise. On le voit bien, pour la conception religieuse, l’autorité suprême en pays d’Islam, ce n’est point l’Etat ou la Loi fondamentale positive, mais c’est la norme théocratique telle que comprise et représentée par la nomenklatura des fuqhâ’. En fait, dans ces pays, la question de l’autonomisation de la sphère politique par l’assignation de la sphère religieuse au domaine privé, se pose aujourd’hui plus que jamais, car il ne faut pas perdre de vue que l’autocensure a sans nul doute plus d’efficacité que la censure institutionnelle.

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