Le délitement des industries culturelles contribue dans une large mesure au rétrécissement de l?espace culturel dans son ensemble. Il n?est par exemple pas possible de produire des livres sans imprimeries. La pratique musicale, dans le même sens, suppose la disponibilité d?instruments de musique et de structures intégrées susceptibles de les fabriquer. Il n?est pas évident, que ce soit à Alger ou dans d?autres villes du pays, de se procurer un instrument de musique quel qu?il soit. Il s?agit réellement d?une denrée rare et hors d?atteinte lorsqu?elle existe sur le marché. Il suffit de voir ce que coûte un instrument aussi traditionnel que le mandole, même produit en série. Il n?y a malheureusement pas d?industrie qui fabrique des mandoles et des luths à une grande échelle pour susciter la concurrence entre opérateurs et agir sur les prix. Reste un réseau d?artisans exposés à tant de contraintes qu?ils ne peuvent travailler que sur commande. Même les musiciens professionnels qualifient les prix à la vente des instruments d?exorbitants. Un mandole sorti de l?atelier d?un artisan vaut environ 40 000 dinars algériens. Comment un jeune Algérien pourra-t-il acheter cet instrument ? Il en va de même pour la guitare, le violon, la clarinette ou le piano auquel il est préférable de ne pas penser car sa cote atteint des sommets. Dans de telles conditions, comment est-il possible de faire naître chez les jeunes Algériens des vocations ? Même inscrits dans des conservatoires, ces jeunes doivent disposer de leur propre instrument pour pouvoir étudier la discipline musicale de leur choix. Cela, il faut bien le relever, ne favorise pas l?émergence de virtuoses dont le pays a autant besoin que par ailleurs des sportifs performants. Mais cette situation paraît non seulement normale, mais elle ne dérange personne tant la sphère culturelle se réduit à une peau de chagrin. Tout le monde se suffit d?une illusion de frémissement pour déterminer que tout va bien et que les activités sont bel et bien relancées. C?est un sentiment factice que contredit en tout état de cause l?indigence de la scène culturelle sevrée de spectacles dignes de ce nom. L?indice de fréquentation est à la baisse tant pour le cinéma ? d?ailleurs réduit à néant ? que pour le théâtre et les autres disciplines artistiques non moins importantes. En fait, tout concourt à indiquer que le film, le livre, le tableau pictural... ne présentent aucun intérêt et ne sont pas nécessaires à des citoyens qui sont poussés à faire abstraction de ce qui est beau et présente une part d?émotionnel. L?artiste, d?une certaine manière, continue d?être regardé comme un marginal accepté par charitable mais non moins hautaine condescendance. En quoi est-il utile de gratter les cordes d?un banjo ? Ce sont les postures rigoristes de ce genre, les replis dogmatiques sur-soi même qui momifient la sphère culturelle et la détachent de sa vocation à créer des richesses dont la plus essentielle consiste à l?épanouissement citoyen. Il faut, à cet égard, attendre des effets d?entraînement après la fin de la manifestation Alger, capitale de la culture arabe qui a fait la preuve qu?il y avait les moyens pour faire vivre un événement aussi grandiose dans la durée. Pour le reste, sans quitter l?univers musical, il ne faut pas que ce soit du pipeau.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 29/01/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Amine Lotfi
Source : www.elwatan.com