De la Corée du Nord à l'Iran : seule la concorde peut éloigner la guerre

L'Est, le monde confucéen est en train de donner une leçon au Moyen-Orient, au monde musulman : « si vous ne vous occupez pas de vos affaires d'autres le feront à votre place ». Même si cela ne semble pas être le point de vue de la presse mondiale, il faut bien admettre que l'Est et le Sud-Est non musulman progresse dans la concorde. Les Etats-Unis reculent face à la Chine et à l'Inde qui réussissent à dominer leurs différends et à reconnaître leurs intérêts communs. Je serai étonné que la tourmente dans laquelle se trouve la Birmanie puisse faire évoluer la situation de pouvoir en faveur des Etats-Unis, si les deux géants voulaient bien renoncer aux dictatures pour servir leurs intérêts et accorder aux bouddhistes leur place dans la région. Les Corées du Sud et du Nord avancent à leur rythme, selon leur agenda politique et d'autres choses, mais on peut prévoir que la dernière frontière de la guerre froide ne tardera pas à tomber. Cependant, il faut craindre pour le monde musulman que la progression des deux géants asiatiques et leur nouvelle offensive industrielle (l'automobile pour la Chine et l'informatique et l'électronique pour l'Inde) n'attise les pulsions guerrières de la puissance américaine et des alliés européens. Il est aujourd'hui vital que la compétition entre chiites et sunnites ait lieu en faveur de leur monde, qu'elle puisse être gérée pour la paix et la justice. Il est vital que ce monde retrouve une certaine unité pour ne pas se retrouver satellisés par des centres mondiaux qui ne pensent qu'à leur propre consolidation et pour cela veulent imposer leur paix au monde afin de gérer du mieux qu'ils le peuvent leurs intérêts. Si le monde musulman ne constitue pas ses centres de gravité, leur coexistence, leur développement pacifique et ne participe pas à l'établissement d'une justice dans le monde qui puisse reconnaître les intérêts de chacun, il n'aura pas de réel pouvoir de négociation pour défendre ses intérêts. Ceux-là seront alors ceux de minorités soumises à des forces centrifuges, qui ne pourront recueillir de consensus et qui ne pourront les faire respecter qu'au prix d'injustices plus grandes. Le droit ne pourra s'établir sur leur territoire et nul ne pourra y faire respecter de paix réelle car chacun y ira de sa propre justice. Il ne restera plus alors aux puissances établies que de cantonner la guerre dans les « territoires ennemis ». Deux puissances sont particulièrement concernées : l'Arabie Saoudite et l'Iran. Si donc en Asie de l'Est et du Sud-Est, émergent les acteurs en mesure de donner à cette région son autonomie, cela n'est pas encore le cas pour le Moyen-Orient et le monde musulman. Mais il n'y a pas de quoi se lapider, que nos coreligionnaires chiites nous excusent. C'est l'Histoire de la décolonisation qui se poursuit. On ne saurait être plus avancé que l'Inde ou la Chine. Mais il reste qu'il faut sérieusement se démener pour avancer et ne pas reculer. Le dispositif de guerre contre l'Iran et les chiites est très avancé. La situation au Moyen-Orient peut être qualifiée de situation de pré-guerre. Deux analystes britanniques Dan Plesch et Martin Butcher, experts en matière de sécurité affirment dans une étude publiée le 28 août dernier que les troupes américaines, les bombardiers et les missiles à longue portée américains présents dans le Golfe Persique, en Iraq et en Afghanistan sont d'ores et déjà prêts à détruire en quelques heures 10.000 cibles (armes de destruction massive, énergie nucléaire, le régime, ses forces armées, son appareil d'Etat et son infrastructure économique) à l'intérieur de l'Iran dans les quelques jours, sinon les quelques heures qui suivraient un ordre donné par le président George W. Bush. Israël de son côté se prépare à attaquer Gaza, à neutraliser le Hamas, l'Angleterre à soustraire ses soldats de représailles chiites et iraniennes en cas d'attaque sur l'Iran. Au Liban on ne sait comment pourrait évoluer la situation et dans quelle mesure les acteurs pourraient déjouer le scénario de guerre américain et éviter une confrontation entre sunnites et chiites. Comme avec l'Irak et le Koweit, il s'agit de détruire les nouvelles potentialités d'autonomie apparues dans le monde musulman, maintenant en Iran et en Arabie saoudite. Il s'agit de semer les graines de la discorde pour en contrôler les ressources. Pour éviter que le processus de guerre engagé par la puissance américaine contre l'Iran, avec l'arrivée de Khomeiny au pouvoir, ne se termine par une confrontation directe avec les Etats-Unis et ses alliés locaux, il reste peu de temps et peu de moyens. Cela vient de loin et il est à craindre que ni la Chine, ni la Russie ne souhaitent que la confrontation avec les Etats-Unis ne déborde trop largement de ses cadres actuels. Les ressources de paix pourraient bien n'être que locales.