Algérie

De la Constitution, à l'arbre des ancêtres



Le drame de Ghardaïa aura démontré, grandeur nature, un nouveauphénomène politique désormais validé : le « doublage » encouragé ou de fait del'Etat par des organisations sociales nouvelles. Et derrière le leitmotivtraditionnel d'une gouvernance qui a failli, d'organisations mises en échec oude gestion par le tamis, on aura surtout compris que l'Etat lui aussi a étéemporté par les eaux, n'y peut rien, se retrouve à chaque fois dépassé et qu'ilfaut compter sur soi, avant de compter sur les colis alimentaires de l'Etat.

Du coup, si vers le Nord l'Etat continue à refuser deperdre le monopole ou le contrôle strict et abusif sur les partis, beaucoupd'associations et les syndicats autonomes, une situation de faiblesse le pousseà accepter, désormais de plus en plus ouvertement, comme interlocuteurs et mêmecomme remplaçants titulaires les « conseils de notables » et les vieillesstructures longtemps dormantes qui assuraient la cohésion de la sociétéalgérienne depuis des siècles.

Au M'zab où ces structures ontbien négocié le virage et ont survécu à leur effacement ailleurs, les Algériensreviennent en force vers ces organisations de plus en plus politiques, de plusen plus indépendantes et fortes d'une légitimité et d'une efficacité démontrée.L'enseigne de « société civile » arrange un peu, pour le moment, les réalités, mais,comme en Kabylie ou dans l'extrême Sud, il ne s'agit plus d'un corpssatellitaire mais d'un véritable noyau dur.

Au M'zab, les Ghardaouisont pu mobiliser des médecins, organiser des vigilances et les surveillancesdes biens et des personnes, acheminer des aides et secourir des rescapés, mieuxque les structures « noyées » de l'Etat, tout juste capables de servir de canauxbancaires et de « natures » pour les aides de l'Etat mais incapables d'assurerles secours et les survies mieux que les vis-à-vis locaux.

L'Algérie officielle, des décennies après la mise sousembargo des zaouïas que l'on fréquente, au sommet de l'Etat, aujourd'huiallègrement pour obtenir des soutiens électoraux et des tickets de « pardon », l'Algériebascule vers ce qu'elle connaît le mieux, ce qu'elle a éprouvé pendant dessiècles et ce qui la tient debout face à l'Etat qui s'écroule : les conseilstraditionnels des notables.

La mutation est profonde, désormais visible, et peutannoncer de profonds bouleversements. L'Algérie se « monarchise», mais curieusement par le bas et sous le parapluie d'un consensus d'échecgénéral à gérer la chose publique. De la Constitution onbascule peut-être vers l'olivier et l'arbre central des ancêtres. Faute demieux, faute de sécularisation douce. Faute d'avoir pu obtenir mieux pour gérerle pire.




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