Algérie

De l'obligation citoyenne de dénoncer!



De l'obligation citoyenne de dénoncer!
«On vit une période où l'on voit resurgir dans le monde toute forme de racisme, anti-musulman et un renouveau de l'extrême droite, ce film, Train d'enfer, qui a plus de 30 ans est hélas d'une grande actualité», a déclaré Isabelle Hanin.La Cinémathèque algérienne continue sa série de rétrospective cinématographique en hommage à Roger Hanin et ce, jusqu'au 26 mai. Dimanche, elle fut marquée en début d'après-midi par la projection du film La Sentence, réalisé par Jean Valère et sorti en 1959. Un film dont la fille de Roger Hanin, Isabelle, dira qu'elle venait de le découvrir derechef et de confier son émotion de voir son père aussi jeune car il avait à l'époque à peine 35 ans. C'était d'ailleurs, pour la petite anecdote, sur ce plateau de tournage que Roger Hanin avait rencontré la productrice du film, celle qui devait être sa femme pendant plus de 40 ans.Ce long métrage en noir et blanc raconte l'histoire de quatre résistants arrêtés par des soldats allemands, durant la Guerre mondiale sur une côte du Nord de la France. Ils sont rapidement jugés et condamnés pour être exécutés dans une heure. On suit, en temps réel, leurs derniers moments passés dans la prison qu'ils partagent avec un autre détenu. Un film qui dénonce la shoha et parle toujours de résistance comme on le verra dans le second film projeté en soirée où là l'engagement de Roger Hanin contre tout sentiment d'injustice est bien clair et arrêté.Dans La sentence, l'intrigue se passe en fait en juillet 1944, en Normandie. Un colonel allemand réputé pour son sadisme est tué dans un attentat. Quatre résistants, deux hommes et deux femmes, et un pêcheur étranger à l'affaire sont arrêtés et conduits dans la cave de la Kommandantur. Au terme d'un procès sommaire, ils apprennent qu'ils vont être exécutés une heure plus tard donc. Laissés seuls, ils imaginent s'enfuir en creusant sous les fondations du bâtiment... en entendant le son des bombardement américains, ils croient être sauvés mais tout ne se passera par comme ils le voudraient. Entre drame et espérance, le film évoque aussi l'amour, les confidences, aborde les rebondissements et la lâcheté humaine.Tout ceci forme le suspense d'un film auquel on s'attachera forcément, en ayant à chaque fois à l'oeil de la caméra le regard soit concupiscent, fort, décourageant, ou amoureux de l'un des acteurs. La scène finale du film rehaussée d'une musique aérienne est à vous couper le souffle. Ici l'acteur qu'est Roger Hanin se révèle déjà comme un grand acteur qui crève l'écran. Dans ce huis clos intime, l'histoire se noue entre discussion, larmes, joie, bagarre, espoir et désespoir. Le spectateur assiste à cette défaillance humaine et prend à témoin cette tragédie historique.Train d'enferProfondément politique cette fois est le film Train d'enfer réalisé par Roger Hanin en 1984. Sorti au cinéma un an après, en France, ce film est tiré d'une histoire vraie. Le 14 novembre 1983, un Algérien de 26 ans, Habib Grimzi, est battu à mort et défenestré du train Bordeaux-Vintimille par trois jeunes candidats à l'engagement à la Légion étrangère.«Je tenais particulièrement que ce film participe à cet hommage parce qu'hélas, 30 ans après, il garde toute sa connotation et pour mon père ça a été comme un devoir de le faire, une obligation citoyenne.Tiré d'un fait réel, en 1984, un jeune Oranais qui rentrait chez lui dans un train a été battu à mort et défenestré. Ça avait suscité un grand rebondissement en France, devant cette horreur et ce crime de racisme abominable. Quand mon père l'avait lu dans les journaux, cela l'avait tétanisé, révolté, surtout que beaucoup de gens n'ont pas bougé et ont laissé faire. C'était quelque chose qu'il voulait absolument dénoncer. Quand il était jeune il a beaucoup souffert d'antisémitisme, tout ça a forgé son combat contre toutes les discriminations. Il sentait la montée du Front national puisqu'un an après ce meurtre, les premiers députés du Front national ont siégé. Ce film est vraiment contre l'extrémisme en France. On vit une période un peu trouble, y compris dans le monde où l'on voit resurgir toutes formes de nationalisme, de racisme, anti-musulman et un renouveau de l'extrême droite, ce film qui a plus de 30 ans est hélas d'une grande actualité», a déclaré Isabelle HaninUn film antiracisme toujours d'actualitéEn préambule à cette séance projection. Le synopsis: un soir de bal dans une petite ville, une bagarre éclate dans un climat fortement teinté de racisme. Trois des meneurs se retrouvent au poste de police. Le lendemain, dans un train, les trois hommes rouent de coups un jeune Arabe avant de le défenestrer. Une jeune femme, témoin du meurtre, alerte la police. L'enquête commence dans un climat de tension extrême. En ville, les provocations et les agressions se multiplient... le fait que ce film ait souffert de quelques critiques, l'ayant jugé de manichéisme, car mettant en avant d'un côté les bons et les méchants de l'autre, n'a pas altéré la détermination de Roger Hanin d'avoir fait ce film, même dans l'urgence. L'on ne pourrait reprocher évidemment au réalisateur d'avoir fait un film résolument engagé tant par la thématique qu'au niveau du traitement du sujet lequel est abordé frontalement et sans ambages, y compris dans sa forme basique et violente, à la fois autant physique que verbale. L'on sent en effet cette envie viscérale chez le cinéaste de dénoncer et de dire des choses qui viennent des tripes. Une révolte et une rage au coeur qu'il a tenu à soumettre au plus grand nombre de personnes via le grand écran, quitte à ce que ça passe ou ça casse!Toutefois si le film gagne à être ressenti d'une telle façon, à l'éprouver humainement dans sa chair et prendre parti littéralement contre le racisme abject envers les Arabes, voire les Noires et d'ailleurs contre le racisme ordinaire, l'on pourrait juste signaler la façon un peu télé qu'a eu le réalisateur à filmer ses personnages, mais aussi un peu caricaturale, dessinée, à travers laquelle le portrait de l'homme politique qui entend dire tout haut ce que le peuple même si très mal informé, veut entendre, juste pour monter dans les sondages et profiter pleinement du pouvoir et assouvir enfin ses désirs d'oligarchie. «Pour montrer avec évidence ce racisme latent, il fallait justement montrer de façon assez forte et caricaturale cela» acquiesce Isabelle Hanin qui fera remarquer de plus, qu'après ce fâcheux incident dans le train, la France avait extrêmement réagi avec cette grande marche, mais son père «ne savait pas exactement ce qu'il fallait faire, comment il fallait le traiter. Mais il tenait à le faire».A notre question de connaître les relations tendues entre Roger Hanin et le Front national, sa fille reconnaîtra qu'il eut de nombreuses affaires qui l'ont mené en justice, et dont certaines n'ont pas été gagnées, «Mais ce n'est pas grave!» dira t-elle avec fierté, histoire de souligner davantage le caractère entier et franchement engagé de son père qui se plaisait à dire qu'il était communiste et juif tout en défendant les Arabes et tous les opprimés sans distinction.




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