Algérie

De l'errance à la déception



Rares sont aujourd'hui les rédactions qui arrivent à garder leurs journalistes pour une carrière professionnelle bien prise en charge. Mahmoud Belhimeur, actuellement établi aux Etats-Unis et ancien rédacteur en chef d'El Khabar, a estimé hier que « d'une aventure intellectuelle pour une société libre et démocrate, les journalistes se retrouvent dans une aventure de business où l'on échange la liberté d'une presse et d'une société contre la rente de la publicité ». Le journaliste erre, très souvent, d'un journal à un autre car partout il subit une forme de pression qui le pousse à changer de rédaction. Salaire de misère, censure, hogra à l'intérieur des rédactions, en plus des pressions de pouvoir par voies interposées. Du coup, la transhumance devient une solution de rechange pour échapper un certain temps à ces formes de pesanteur. « Rien que ces trois dernières années, j'ai fait 5 journaux et là où je vais, je suis déçu », témoigne un journaliste totalisant une expérience de 17 ans.Certains journalistes ont rejoint d'autres secteurs comme les compagnies de téléphonie mobile, les agences de communication ou carrément les cellules de communication d'organismes publics. « J'ai tenté de résister malgré mon tempérament calme, mais j'ai fini un jour par quitter le monde de la presse », précise H. A., aujourd'hui dans le secteur public.Un ancien du métier estime, quant à lui, que les journalistes meurent aussi en raison de la grande déception qu'ils ont vis-à-vis de leur carrière qui n'existe réellement pas. « Un journaliste reprend à zéro quand il va dans une autre rédaction », s'accordent à dire les professionnels. C'est pourquoi certains rejoignent d'autres médias comme la radio ou la télévision, sinon ils travaillent pour des agences ou des sites internet de chaînes de télévision étrangères. Le plus grave est que les jeunes qui arrivent dans le métier papillonnent d'un canard à un autre et cumulent ainsi précocement une lourde déception. « J'ai été stagiaire dans 4 titres et on publiait mes articles pendant trois années, mais avec un salaire minable », avoue une jeune diplômé de l'ISIC. En l'absence d'un véritable plan de carrière pour les journalistes, la situation demeure dramatique.« La presse en Algérie : le métier de la mort », avait écrit Mahmoud Belhimeur en 1995. Aujourd'hui, cela reste valable pour d'autres raisons.


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