DE L'EAU QUI DONNE SOIF

L'innommable s'est produit dimanche à Tébessa. Un chef d'entreprise a tiré à balles réelles sur la population. Nous ne sommes pas là devant un acte déraisonné d'un désemparé qui aurait perdu la raison et l'acte n'est pas à ajouter au décompte des faits divers graves qui se produisent de plus en plus un peu partout.La population s'est présentée devant l'acquéreur d'une usine de conditionnement d'eau minérale pour le sommer de cesser de détourner cette sève vitale qui ne coule plus de leurs robinets. Les faits ont abouti à une usine incendiée et des citoyens dans des lits d'hôpitaux.
Ce drame avec sa grave déchirure sociale et son lot de blessés est à l'évidence d'essence politique. Par sa gravité, il interpelle moult interrogations. D'abord, à qui faudra-t-il faire endosser la responsabilité permettant à un quidam de s'approprier une réserve d'eau pour assoiffer une population ' Il n'est pas nécessaire d'aller chercher dans les recoins d'une réglementation virtuelle les causes de ce méfait et il est fort à parier que les attitrés de cette usine à eau disposent sûrement de citernes en or leur permettant de dispenser, à une administration docile ou retorse, du nectar à flots.
Quand on constate depuis quelques jours cette flambée généralisée de contestations qui n'épargne plus aucune parcelle du pays et qui s'amplifie en parallèle avec les marches populaires, on est en droit de déduire que l'eau du vase généreusement polluée a bel et bien débordé. La protestation s'élargit et ne se limite plus à des routes fermées par la colère et il est patent que le ras-le-bol prend dangereusement de l'étendue. Et il ne pouvait en être autrement.
Depuis l'indépendance, le tissage et le maillage de la vie économique et politique de l'Algérie ont obéi à un dictat infantile basé sur la force rigide et les mirages farfelus imposés par de petits faux prophètes qui ont usé de man?uvres des plus condamnables pour qu'une nation et un peuple soient un bien qui leur revienne de droit. Les données et les faits qui s'affichent à l'heure actuelle démontrent bien que les rafistolages politiciens ont définitivement trop abusé de leur temps et que l'Algérie a un besoin impérieux d'une autre profonde révolution.