De l'arrogance culturelle !

On l'appelle «le butin de guerre», vous devinez certainement de quoi il s'agit. Il s'agit de la langue de Voltaire, parlée couramment par plus du tiers des Algériens selon l'Organisation mondiale de la francophonie. Si les syndicats du secteur saluent l'interdiction de l'enseignement du programme français dans les écoles privées, comme «une chance de renforcer l'égalité des chances des élèves pour l'accès à l'enseignement pour tous», le ministre Abdelhakim Belaabed a voulu mettre fin à la polémique. «Les écoles privées doivent se conformer au programme établi par le ministère de l'Education nationale», a tranché le ministre. «C'est une question de souveraineté, d'autant que les programmes du ministère de l'Education sont issus de la culture et de l'histoire algériennes et ne devraient pas être éclipsés par la culture d'autres pays», a encore argumenté le ministre, non sans préciser qu'une «minorité d'écoles privées ont adopté des programmes étrangers sans autorisation (...) et ont été convoquées par l'Inspection générale du MEN pour se conformer au programme national». L'interdiction du programme français dans les écoles privées algériennes a déclenché une tempête médiatique en France. Certains éditocrates ont même poussé le bouchon jusqu'à affirmer que cette mesure représentait une «attaque contre la France» et une «provocation à l'encontre de la communauté française en Algérie». De nombreux médias de l'Hexagone sont montés au créneau pour verser dans une véritable cabale contre la décision souveraine des autorités algériennes.A commencer par le journal «Le Figaro», pour lequel «Alger ordonne la chasse au français dans les écoles». Pour Belaabed, cette affaire «a été déformée» et ne repose pas sur des bases factuelles, rappelant que son département ministériel «n'a pas interdit l'enseignement du français, bien au contraire, l'Algérie reste ouverte à toutes les langues». Pour certains parlementaires algériens, cette démarche s'inscrit dans le cadre de la «nouvelle Algérie», qui «exprime une vision indépendante loin de l'arrogance culturelle que la France s'est efforcée de consolider depuis l'occupation».