Algérie

De l'anecdote au roman réaliste en passant par le fait divers



Pour se remettre d'une journée éprouvante et se ressourcer, il n'y a rien de meilleur que de lire un récit d'aventures extravagantes qui nous apportent un plus de connaissances tout en nous procurant des moments de détenteL'anecdote ne doit pas être confondue avec le roman, elle peut être développée au point d'avoir l'épaisseur du roman comme cela a été fait par Jules Verne, auteur de romans de science fiction intéressant pour leur contenu amusant et l'illusion du réel qu'il procure. Désormais on ne doit pas confondre l'anecdote et le roman. L'anecdote est un récit bref mais malgré sa brièveté, il a un contenu passionnant par l'histoire qu'il relate, alors que le roman est un long récit marqué par des étapes bien délimitées mais qui doit son côté amusant aux anecdotes qu'il peut comporter.
On adore l'anecdote pour se détendre
Elle permet de se distraire à des moments de tension tant ce qu'elle raconte intéresse par son caractère plaisant. L'homme en général a soif d'histoires drôles pour rire, tout le monde admet que le rire est une thérapie ; il a soif d'extravagance pour sortir de la routine du quotidien. En voici un exemple d'anecdote prise dans le répertoire des grands auteurs. Elle s'intitule : «Les moutons de Panurge» du nom d'un maquignon qui a fait embarquer un troupeau de moutons à bord d'un bateau. Une fois arrivés en pleine mer, un de ses moutons, probablement grand de taille se hissa sur le pont du bateau, il vit en bas une étendue de mer qu'il avait prise pour un vaste pâturage.
Et croyant pouvoir paître à satiété, le mouton sauta par-dessus bord et vous connaissez l'animal, il a été suivi immédiatement par ses semblables. Le maquignon essaya de les retenir ; mais en vain, en une minute, tous ses moutons se retrouvèrent au milieu des vagues sans pouvoir faire quoi que ce soit, la mer était agitée, elle avala tout son troupeau. A titre de référence, on vous a choisi une autre anecdote du genre insolite. Il s'agit d'un métayer qui va chez le propriétaire de la terre qu'il travaille, pour lui payer son loyer qui doit être assez important. Il lui paie la somme convenue et étonnamment, il lui fit savoir qu'il ne s'était pas acquitté totalement de sa dette et qu'il lui restait quelque chose d'important à payer : la moitié de ton pet, lui ajouta-t-il.
Pour ce faire il lui offrit un plat de haricot pour bien le faire péter. Le métayer péta. C'est trop fort lui dit le propriétaire et si fort que les murs ont vibré, et moi je veux la moitié de ce pet. Le métayer fit un deuxième pet. C'est trop faible lui dit le maître des terres avant de lui recommander de revenir le lendemain pour d'autres essais.
Le pauvre métayer retourna chez lui tout pensif, et sitôt arrivé il raconta tout à sa femme pensant que le propriétaire avait exagéré en exigeant de lui la moitié d'un pet, ni plus ni moins, en l'informant qu'il lui avait donné rendez- vous pour le lendemain pour un autre essai. Je viendrai avec toi lui dit son épouse, en femme dynamique. Ce qui fut fait et dès le lendemain, ils débarquèrent ensemble chez le riche et méprisant propriétaire.
Et après les avoir reçu courtoisement, ce dernier leur offrit un plat de haricot sec. Le couple s'empiffra jusqu'à être pleinement rassasié. Arriva alors le moment du pet. Je m'en charge dit la femme d'une voix ferme. Avant de quitter son domicile, elle avait pris la précaution de se munir d'un couteau. Elle s'assit dessus puis péta, voilà ta moitié de pet, dit elle au propriétaire, elle lui expliqua qu'elle l'avait coupé en deux avec ce couteau au moment même où elle l'avait lâché. Le propriétaire trouva raisonnable le partage, il libéra le couple.
Ce qui distingue le fait divers de l'anecdote
On vient de voir deux modèles d'anecdotes différents par le contenu et la longueur. Les deux ont relaté des faits insolites qui remontent aux temps anciens dans le même style que les autres genres narratifs. On raconte l'anecdote parce qu'elle est en rapport avec le sujet de discussion abordé au sein d'un groupe, soit pour donner du piquant à la discussion, soit pour apporter une preuve. Ce qui caractérise l'anecdote, c'est aussi sa brièveté, son caractère narratif, les faits sont rapportés avec les temps du récit et l'histoire a toujours une valeur d'actualité même si elle a eu lieu il y a de cela des siècles.
Quant au fait divers, c'est un texte court de genre narratif, il est bref comme l'anecdote. Cependant le fait divers a ceci de particulier : il relate un fait récent qui peut remonter à quelques heures ou à quelques jours en arrière. D'ailleurs il est raconté aux temps du passé récent. Le fait divers n'appartient qu'à l'un de trois genres : insolite, méfait, catastrophe naturelle.
Le roman réaliste
C'est un genre tout nouveau qui s'ouvre à toutes les expressions de l'homme et à tous ses besoins : soif de curiosité, d'imagination, de méditation, de documentation, d'exploration. Ainsi par le reportage, le fait divers, l'anecdote, l'humeur, de nouvelles techniques de peinture objective on crée les formes modernes du réalisme. On tient la littérature pour expression narrative de la vie dans tout ce qu'elle peut avoir de dramatique, d'étonnant, de curieux. On peut s'en tenir aux faits réels, rendus dans toute leur vérité et qui doivent intéresser par eux-mêmes.
L'expérience du fait divers et de l'anecdote qui piquent notre curiosité, qui nous présentent les vrais visages de la vie suffisent pour inspirer un roman réaliste. C'est vrai, des écrivains célèbres se sont inspiré d'un fait divers pour bâtir un gros roman. Et un fait divers pour inspirer un écrivain pour faire un best seller c'est inimaginable et pourtant, André Gide a écrit «Les Faux monnayeurs» de près de 500 pages à partir d'un fait divers.
En Algérie, il y a un grand nombre de romanciers talentueux et dont les livres sont d'une lecture agréable pour les petites histoires qu'on y trouve ça et là en parcourant les pages. C'est le cas de Ben Hadouga qui a l'art de greffer à son roman des scènes de la vie ancienne, des histoires de grand-mère ou émanant du patrimoine commun conservé dans les mémoires ; des petites histoires passionnantes et enrichissantes pour celui qui lit cet auteur qui avait le don de lier monde actuel et traditions, des expressions populaires qu'on peut relever de ses deux ?uvres romanesques dominantes : «Le vent du sud, La fin d'hier».
Comme autres romans réalistes, il y a ceux de Mouloud Féraoun qui fait la peinture objective de sa société d'appartenance à une époque donnée de son histoire. Il est resté prés de la population et a su décrire fidèlement son vécu au quotidien. A la lecture, on découvre avec plaisir des anecdotes et traditions populaires. Dans «La terre et Le sang, on a relevé une histoire intéressante d'un personnage du roman qui s'est trouvé devant un dilemme : tuer pour laver son honneur ou risquer d'être traité de lâche par la communauté. Il est allé demander conseil à un vieux sage. Celui- ci lui répond par une énigme : «Il y avait dans un village un très bon maître d'école.
Tous les élèves qui sortaient de chez lui après des années d'apprentissage, avaient tout appris et étaient devenus de bons citoyens. Le sultan de la région a appris la nouvelle de ses dons à faire acquérir à chaque élève un bon niveau d'instruction et une excellente éducation.
Il le convoqua immédiatement pour lui dire : «je t'ai appelé pour te confier un élève, tu vas faire de lui ce que tu as fait pour les autres. Je te donne trois ans. Si tu refuses d'accomplir cette mission, je te coupe la tête tout de suite. Le maître se dit en lui-même : si je refuse, je perdrai la vie maintenant. Autant accepter et m'accorder un sursis. Ainsi il répondit par oui au sultan qui envoya un esclave lui ramener l'élève. C'était un jeune chameau.
Le maître partit avec son nouvel élève sans dire un mot. Et en peu de temps, il y eut beaucoup d'évènements : le méchant sultan est mort, le maître a eu la vie sauve et il gagna un chameau.» La réponse énigmatique du sage se termina là. Le visiteur venu lui demander conseil comprit qu'il lui fallait temporiser avant d'agir.


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