Algérie

De grandes espérances



De grandes espérances
«Ne soyez pas sentimentaux à l'égard du passé et n'ayez pas une vision trop enthousiaste de l'avenir. Scrutez, analysez, dégagez le réel et l'actuel.» Mao DunIl est des dates embarrassantes dans le cours de l'histoire qui nous concerne: embarrassantes non seulement en raison de leur importance mais aussi, en raison des diverses interprétations auxquelles elles donnent lieu. Ces dates compliquent davantage la situation quand elles donnent lieu à deux célébrations différentes. Bien que consacré Journée du moudjahid, le 20 Août est de ces dates à tiroirs. Certains analystes, partisans de l'histoire officielle qui fut en vigueur dans l'école fondamentale, donnent leur préférence à la commémoration de l'insurrection populaire du Nord Constantinois, la qualifiant de «grand tournant», parce qu'elle se veut plus rassembleuse, plus unanimiste et qu'elle donne une image valorisante du petit peuple algérien qui est sorti en masse avec des armes dérisoires pour affronter une armée puissante soutenue par l'Otan. L'ampleur du soulèvement entraîna bien entendu une répression féroce dont le bilan fut estimé à environ 20.000 victimes. Les partisans de cette sanglante épopée trouvent des arguments tactiques en expliquant que, sans véritable portée militaire, elle fut d'un grand bénéfice psychologique et politique: le fossé de sang s'est élargi davantage entre les indigènes et les colons et ensuite, cette insurrection fut une grande démonstration de la volonté populaire d'accéder à l'indépendance et qu'elle eut un retentissement international qui permit à l'ONU d'inscrire «la question» algérienne à l'ordre du jour.D'autres n'y verront qu'un subterfuge pour faire desserrer l'étau de l'armée coloniale qui pesait sur la région des Aurès-Nementchas. L'autre 20 Août à commémorer est bien entendu celui qui renvoie à l'année 1956 et au Congrès de la Soummam, planifié par le grand stratège que fut Abane Ramdane et organisé par l'intrépide et astucieux Amirouche: deux héros qui trouveront la mort dans des circonstances que les historiens tentent toujours de débrouiller les fils enchevêtrés.Certes il est plus facile de porter des fleurs à la tombe de Zighoud Youcef ou à celle d'Amirouche puisque leurs sépultures sont bien identifiées, mais on serait obligé de porter des fleurs sur le mausolée symbolique de Abane qui a le privilège de vivre encore dans la fosse commune de la mémoire collective.On n'a pas pardonné à la première victime du premier coup d'Etat militaire d'avoir posé les fondements d'une révolution nationale qui aurait pu donner à ce peuple les fruits des promesses contenues dans la déclaration du 1er Novembre 1954.Presque soixante années après ces événements marquants, les chercheurs en histoire ont toujours le devoir de prospecter les territoires des mémoires collectives ou des archives écrites pour offrir à ceux qui n'ont pas vécu ces moments dramatiques qui ont accouché d'une indépendance diversement vécue par les survivants, mais, ils ne doivent pas oublier, après avoir confronté les preuves matérielles et immatérielles qu'ils ont réunies avec grand peine, étant donné et le triste état de nos archives et la langue de bois qui a squatté le discours politique, de poser et le problème de légitimité de ceux qui ont si bien succédé à Naegelen et l'efficacité de gestion de ceux qui ont permis que les scandales financiers, le gaspillage et le tribalisme fassent encore partie du paysage quotidien d'un pays qui a tant souffert et qui a soulevé de si grandes espérances.




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