De cœur et d’esprit : pour une spiritualité musulmane effective
D’après Abou Horeira, le prophète a dit : « Renouvelez votre foi! » On lui demanda: O envoyé de Dieu, et comment allons-nous renouveler notre foi? Il répondit: Multipliez la mention de la formule Lâ ilaaha illa Allah (Il n’y a nul dieu que Dieu) ». L’association des mots et des notions dans ce hadith n’est ni fortuite ni gratuite. La fonction du renouvellement ici a comme champ d’action le cœur et a pour but d’y revivifier la foi, le moyen étant spécifié : « Dites en grand nombre, La ilaaha illa Allah. !! ». C’est une franche invitation au Dhikr. Cette association entre le renouveau et le Dhikr est un mélange détonnant qui nous montre la piste et lève le voile sur le vrai travail de réforme qui commence par …la réforme des cœurs, notamment par le biais du Dhikr.Le Dhikr est une notion-clé en islam. Il représente un état spirituel et les moyens y menant. Il recoupe plusieurs vérités. En arabe, ce mot désigne pêle-mêle le rappel intime de Dieu, la prière, la méditation, la réminiscence, l’évocation de Dieu, le souvenir de Dieu, la mention de Dieu, la répétition de formules incantatoires, la pratique de l’invocation, les réunions de remémoration de Dieu…Toutes ces expériences sont un faisceau de pratiques convergeant vers la même finalité : celle d’être présent à Dieu. La purification spirituelle est en grande partie le fruit de l’exercice du Dhikr. C’est un passage obligé et une sorte de thérapie que Dieu a mis à notre disposition pour préparer notre cœur, notre âme et notre esprit à recevoir les effluves divins et à arpenter la route menant à la Vérité. Le Dhikr n’aura l’effet escompté, pour celui qui veut cheminer, qu’accompagné d’un autre facteur déterminant.
Les deux Hadiths qui suivent introduisent cette nouvelle notion, celle de la «Sohba» (la bonne compagnie) sans laquelle aucune démarche spirituelle ne pourra prétendre coller au modèle prophétique: «Chacun aura la même intensité de foi que son ami le plus intime. Choisissez donc vos compagnons avec soin». «Dieu suscite pour cette communauté à la tête de chaque cent ans, qui lui rénove sa religion ». Le premier hadith fixe une règle : les fréquentations peuvent être un plafond de verre comme un vrai tremplin pour un épanouissement spirituel. Elles peuvent aussi bien être limitatives quant à l’horizon du cheminement que permettre un véritable envol spirituel. En d’autres termes, cela peut aller plus vite pour certains que pour d’autres : le chemin est le même mais l’allure, la progression et même la régression sont tributaires (entre autres !) des compagnons de route.
Le deuxième hadith se lit sous le triple aspect de trois projections:
La première est une information: l’existence de garants du renouveau,
La seconde est une recommandation: l’incitation à être en leur bonne compagnie, La troisième est une promesse: l’engagement de la part de Dieu que Sa miséricorde ne dédaignera aucune génération, pour autant qu’elle s’y expose. Il y a donc des personnes qu’il faudra côtoyer et fréquenter pour ne pas s’exclure de cette Miséricorde. Elles sont définies dans le hadith par le pronom relatif «qui», «mine» en arabe, qui supporte aussi bien le singulier que le pluriel. Ceci reflète la dualité de la «Sohba» qui recoupe une double dimension :
Une première dimension qui renvoie à l’apport et au soutien de la communauté des croyants et plus spécifiquement au cercle de ceux qui s’aiment en Dieu. Tels des engrenages qui ont besoin les uns des autres pour pouvoir fonctionner.
Et une autre dimension beaucoup plus intimiste, plus élitiste, qui se situe sur les hauteurs du «ihsan», le plus haut degré de l’islam et qui requiert un maître spirituel, un guide capable de faire un vrai travail d’initiation. Sans cela, le candidat au cheminement risque de perdre pied et de se perdre. Historiquement, ce sont les soufis qui ont su et pu transmettre cet héritage, mais ce n’est pas de leur seul apanage. Et c’est justement le défi lancé aux musulmans de réussir l’éducation spirituelle sans passer par les formes contraignantes de la voie initiatique soufie. Non pas que les soufis soient dans l’erreur ou la perdition, mais leur modèle est devenu caduc et inadéquat au vu de la réalité contemporaine. Le retrait, l’isolement, considéré comme un fondement pour l’accomplissement spirituel, revient, en ces temps, à démissionner au regard des enjeux actuels…
Hatim I. Belfkih
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Posté Le : 17/02/2007
Posté par : sofiane
Source : www.voix-oranie.com