Algérie

Dans les marges de la Nouba



Dans les marges de la Nouba
Bénis soient les oublieux, car ils l'emportent même sur leurs bévues ( F. Nietzsche, Au-delà du Bien et du Mal )
L' évènement « Nouba ,hommage aux maîtres » organisé il y a quelques mois à Tlemcen «Capitale de la culture islamique » , n'aura pas répondu hélas à l'attente des nombreux mélomanes mostaganémois . Et pour cause . Certains « parangons » de la culture , n'ont pas jugé utile d'inclure dans cette cérémonie , Hadj Ahmed Moulay Benkrizi , l'icône mostaganémoise de la musique andalouse .
Faudra t-il avouer que cette mise à l'écart nous aura tout autant offusquée que déconcertée ' Sidéré par cette inconvenance, l'on s'était alors posé la question : pouvait-on honnêtement programmer un tel évènement en «oubliant » d'y intégrer un cheikh de la carrure du maître mostaganémois, connu pour avoir été un formateur dévoué dont le prodigieux parcours ressemble à bien des égards à une véritable épopée ' Car par-delà le rêve qui irise le regard et par-delà la passion qui fait frémir le c'ur , cette aventure de l'andalou qui tiendra en haleine Hadj Moulay et une poignée d'ingénus mélomanes tout aussi rêveurs , tenait bien assurément de l'épopée , épopée dont se souvient encore Mostaganem .
C'est en 1967(*) que s'ébranlera vers les sommets féeriques des Noubate éternelles , cette grisante et mémorable expédition portée tout feu tout flamme par un quatuor «farouchement andalou » , mené par un « Sherpa » au grand c'ur : Hadj Bouzidi Benslimane. C'est cet homme providentiel doublé d'un fervent mélomane qui sera en effet à la fois l'initiateur et le catalyseur de cette merveilleuse aventure , après avoir longtemps « gambergé » cette idée quelque peu chimérique - mais à laquelle il croyait mordicus - de créer une section de musique andalouse à Mostaganem . Cette idée prendra corps quand le destin réunira des « enfiévrés » de la Nouba qu' étaient Hadj Bouzidi Benslimane , Hadj Moulay Benkrizi , Benyahia Benyahia et Ismet Benkritly . Et ce rêve sera matérialisé par la création ,durant cette même année, de la SMACC ( Section de Musique Andalouse du Cercle du Croissant) , laquelle constituera une première étape dans un itinéraire qui s'annonçait dors et déjà ô combien palpitant . Hadj Moulay alors frais émoulu d'« El Djazairia-El Moussilia » , sera tout naturellement appelé , du fait de sa maîtrise des arcanes de la Nouba et en sa qualité de musicien accompli , à prendre en charge cette toute nouvelle section musicale dont il sera la cheville ouvrière et bien évidemment , le professeur et le maestro attitré .
L' extraordinaire engouement que porteront les mélomanes mostaganémois à cette pimpante section est tel , qu'il encouragera les responsables , à chercher comment consolider cette Nouba toute frémissante. Manifestement aiguillonné par cette première réussite et l'expérience aidant, notre groupe auquel se joindront avec beaucoup d'enthousiasme , notables, artistes et autres mélomanes , caressera désormais l'ambition de passer de la modeste « section » à une véritable «association » de musique andalouse qui puisse dignement représenter la ville de Mostaganem , cette belle cité des Arts .Et c'est dans cette optique que sera fondé en décembre 1972 , avec la « bénédiction agissante » des vétérans du « Cercle » , le prestigieux « Nadi El Hillal Ettaqafi » et dans la foulée , la première école de musique andalouse où pendant de longues années , Hadj Moulay Benkrizi s'y investira à corps perdu, donnant toute la plénitude de son art , puisqu'il sera à la fois l'éducateur, le superbe formateur et le père prodigue qui dispensera avec une admirable abnégation et une générosité débordante ,l'héritage de Zyriab à plusieurs générations d'élèves musiciens.
C'est donc avec une ardeur soutenue que Hadj Moulay poursuivra obstinément son rêve, ce qui lui permettra de transcender maints aléas et maintes incertitudes .Et la réussite , on le devine , fut longue à se dessiner . Elle ne fut palpable en effet , qu'après des années d'un effort sublime , qui continue encore aujourd'hui de susciter dans l'aréopage mostaganémois, une fascination mêlée à une profonde admiration. Et au final , c'est grâce à cette exaltante épopée que la Nouba s'en trouvera définitivement enracinée dans cette terre féconde d'où bourgeonnera , peu de temps après , une belle gerbe d'associations qui font présentement le bonheur de nombreux mélomanes.
Cette formidable épopée pouvait-elle « rêver » d'une aussi belle apothéose '
En tout cas , le bouquet est bien beau Monsieur Moulay !
Alors, devant cet « oubli » à tout le moins surprenant , nous avions voulu comprendre ' quoique l' oraison soit déjà faite - le pourquoi du comment de cette intrigante éviction qui toucha même par un pernicieux ricochet, la fringante association « Ibnou Badja » - dont le ci-devant maître est le président d' honneur - et qui fut elle aussi tout bonnement « laissée sur le carreau» par la commission hôte .
Et si les «commissions» sont libres d'inviter ou de boycotter qui elles veulent selon le sacro-saint « charbonnier est maître chez soi » , libre à nous alors de répondre à ce que nous continuons de qualifier ici comme étant un véritable déni. Toutefois et en dépit de cette indélicatesse qui frise l'irrévérence , la réponse à cette « omission » qui avait soulevé ,en s'en serait douté ,un tollé dans le microcosme mostaganémois, sera faite avec notre pondération coutumière , sans nous hasarder - par fidélité à notre culture - dans les bas-fonds glauques de l'invective et du dénigrement .
Et comme un maître qui porte des appréciations dans les marges d'un cahier d'écolier , nous porterons nous aussi ces quelques observations dans la marge de cette manifestation ,dont la raison d'être était pourtant de rassembler et d'honorer tous nos chouyoukh sans exclusive - du moins le croyions nous - noble initiative qui ne pouvait qu'avoir notre plein assentiment et notre totale adhésion . Last but not least . Cette fête n'aura pas été , déférence gardée envers tous nos maîtres , à la mesure de nos espérances . Et ceci est bien regrettable car tout bien considéré ,nous pensions béatement que cette fête était aussi la nôtre. Mais en grands seigneurs , nous aurons la magnanimité de contourner cette inélégance, pour aller féliciter tous nos maîtres consacrés lors de cette cérémonie « nouba , hommage aux maîtres».
Et afin que le lecteur sache de quoi il retourne , rejoignons sans plus tarder la vieille cité d' El Eubbad .

La vieille cité d' El Eubad , d' El Ourit et du Méchouar , Tlemcen , la ville d'art , d' histoire et berceau de la musique andalouse , a connu pendant ces derniers mois des manifestations culturelles de premier ordre .
La belle cité des Zianides , élue capitale de la culture islamique pour l'année 2011 , s'était drapée pour cette heureuse circonstance , de ses plus beaux atours et le programme qu'elle avait élaboré fut à la hauteur de son prestige , donnant à voir de magnifiques palettes d'une fresque éclatante , dont le moins que l' on puisse dire , est qu'elle a illuminé notre ciel de ses plus belles couleurs. Cette heureuse opportunité a permis à l'Art de s'exprimer dans toute sa plénitude au grand bonheur de nombreux artistes et férus de culture. Décidément , Tlemcen - et c'est devenu une tradition bien ancrée - nous en a mis plein la vue , nous offrant un menu aussi alléchant que consistant : théâtre, cinéma , poésie, chorégraphie , arts plastiques , musique andalouse 'et tout notre riche patrimoine matériel et immatériel étaient conviés à cette superbe noce , sans oublier bien sûr -et c'est là à notre avis le point d' orgue - la série des hommages consacrés à quelques uns de nos illustres hommes de culture , véritables figures de proue de cette grandiose épopée de l'Art .
Et dans le cadre de cette belle initiative , nous avions suivi avec grand intérêt et hautement apprécié ,l'hommage qu'elle a tenu à rendre à nos vénérés maîtres de la musique andalouse dont quelques uns ne sont plus hélas de ce monde , emportant dans leur dernier asile , comme c'est malheureusement souvent le cas , d' appréciables pans d'un inestimable trésor. Ainsi , quelques figures emblématiques des trois écoles, augustes disparus ou ceux encore qui continuent - comme d'infatigables arpenteurs de la nouba - de nous entourer généreusement de leur immense connaissance accumulée une vie durant , ont en effet reçu les égards et la considération qu'ils méritaient . Mais bien que célébrée assez tardivement - mieux vaut tard que jamais dira le sage - cette reconnaissance est à marquer néanmoins d'une pierre blanche et restera , à non point douter , gravée dans les annales comme étant la quintessence et l'évènement phare de ce grand rassemblement culturel que la ville de Sidi Boumediène a eu le privilège d' abriter. Le v'u longtemps formulé et «stoïquement » espéré par les nombreux artistes et mélomanes venait d'être enfin exaucé .Merci Tlemcen d'avoir auréolé cette fête d'un moment aussi inoubliable ,en célébrant quelques uns de nos illustres machaïkhes et quelques distingués chercheurs, dont le travail colossal pour la préservation et la transmission de ce legs andalou ne cessera jamais d'être assez souligné ni assez souvent rappelé, afin que les nouvelles générations puissent s'imprégner de cette école de l'abnégation et mesurer un tant soit peu , l'effort titanesque accompli par leurs illustres prédécesseurs .
Car encore une fois , c'est grâce à la magnifique prodigalité de ces hommes d' exception , à leur dévouement et parfois aussi à leur pugnacité , que l'héritage de Zyrieb ait pu éviter les déperditions, voire même le naufrage et les abysses de l'oubli . Et si dans le passé , il y avait comme à Tlemcen , des familles d'artistes toutes vouées à la sauvegarde et à la diffusion des merveilles du tarab el andaloussi (les Bensari, Bekhchi , Aboura , Belkhodja , Dib ') , ce sont aujourd'hui , Dieu merci , les associations de musique andalouse - qui constellent depuis peu de larges franges du territoire national- qui en sont les légataires attitrées , continuant par esprit d'émulation ou par l'entremise de festivals institutionnalisés par le ministère de tutelle , à en perpétuer la mémoire avec , faut-il le souligner , une admirable ténacité et souvent aussi avec beaucoup de réussite .
Cette musique arabo-andalouse parvenue jusqu'à nous comme on le sait , par le miracle de la transmission orale , continue encore aujourd'hui par une alchimie dont elle a le secret , de re-créer dans les tréfonds de l'âme, dés les premiers frémissements de l'archet et des premières caresses du plectre , un émerveillement toujours recommencé , suscité par de langoureuses et chatoyantes variations , vestiges o combien vivants de l'âge d'or de Qortoba (Cordoue), Ishbilia (Séville) , Gharnata (Grenade), ces fragments d'Eden , ces écrins de la Nouba d'avant les « hauts faits » de la reconquista et la cruauté d'une inquisition de sinistre mémoire , décrétée , bénie et absoute par la toute omnipotente église catholique .Ainsi donc , le fanatisme et la barbarie unis sous la bannière d'un christianisme devenu inquisiteur , iront « sacraliser » la terreur et la dévastation , exterminant avec « bonne conscience » les derniers îlots de lumière de l'Andalousie et anéantissant des siècles de raffinement .
Fuyant les supplices de la persécution ,arrachés à leur patrie et jetés sur les chemins de l' exode , nombre de rescapés parviendront après une éprouvante traversée à atteindre les rives du Maghreb où ils trouveront refuge et sécurité.

Et dans leur dure et périlleuse retraite , ces déracinés emporteront avec eux ,par instinct de survie , une mémoire , un patrimoine multi-séculaire et des pans entiers d'une civilisation arabo-judéo-andalouse qui aura rayonné pendant des siècles ,sur tout le bassin méditerranéen et éclaboussé de sa lumière , une Europe médiévale grelottante , plongée dans les abîmes de l'obscurantisme et livrée au charlatanisme et à la chasse aux sorcières.
Une déchirante complainte composée en terre maghrébine , viendra rappeler plus tard les souffrances de ces rescapés et graver pour l'éternité cette poignante détresse et ce douloureux exil , amère et oppressante mélopée qui laissera couler au fil des siècles ,son intarissable fiel « ya assafi âla ma madha » '


Nous avions souligné dans l' article précédent , notre intérêt pour la « belle série des hommages » que Tlemcen « capitale de la culture islamique » avait réservé aux grandes figures de la musique andalouse . Nous nous attellerons dans cette suite , à exposer les raisons qui nous ont incité à écrire cet article . Et c'est dans la marge de cette « Nouba , hommage aux maîtres » que nous consignerons ces quelques réflexions .

Le rideau qui vient de tomber sur le grand évènement « Nouba , hommage aux maîtres » aura laissé toutefois, comme une pointe de désenchantement à Mostaganem car en effet son seul et unique maître , Hadj Moulay-Ahmed Benkrizi en l' occurrence , n'eut pas droit au même honneur sans que l'on ne sache trop bien pourquoi .C'est ce qui fera dire aux mélomanes mostaganémois et sur un ton on ne peut plus sentencieux , qu'« il y avait comme une fausse note dans cette suite symphonique » .Cet état de fait a donc donné lieu ,du côté de la cité de Sidi Benhaoua , à diverses interprétations et à de nombreuses supputations. Et ce n'est point ergoter ni tomber dans une polémique de mauvais aloi que d' essayer de s'expliquer les raisons de cet « oubli » ( si s'en est un ) qui aura suscité parmi l'aréopage mostaganémois , un regret teinté d' amertume , entraînant dans son sillage un tourbillon d'interrogations parmi lesquelles , cette question liminaire qui nous a longuement turlupinée : aurait-il fallu pour être « nominé » que le nom de Hadj Moulay figurât au préalable dans le hit des (ex) interprètes de la nouba ' Car c'est la nette impression que nous avions ressenti lorsque nous nous sommes mis à compulser le listing concocté pour la circonstance et à éplucher les correspondances et autres pages spéciales des médias, où hormis une bien maigrichonne poignée de chercheurs , le reste du palmarès regorgeait d'une kyrielle d' anciennes gloires du tarab el andaloussi .Mais là encore , en nous attardant sur ces illustres noms , une autre surprise nous attendait.

En effet ,ce fameux « répertoire » censé inclure les ténors des trois styles , n'aura fait en gros que battre le rappel des adeptes d'une certaine école , jamais « oubliés » et bien souvent portés au pinacle .L'on comprendra en conséquence, que dans le respectable carrousel , il n'y eut point de place pour notre ci-devant maître . Bref ! passons'Tlemcen , bastion reconnu et respecté de la musique andalouse aurait-elle succombé à un péché mignon ' Pour de nombreux mélomanes, il ne devrait pas y avoir de prétendue prépondérance d'une école sur telle autre, car à chacune ses spécificités et les « différences » devraient être considérées comme une richesse plutôt que comme une aléatoire échelle de valeur, somme toute bien hasardeuse et dont certains seraient tentés d' en arborer l'oriflamme. Mais entendons nous bien . Que l' on fasse honneur à l'auguste procession des interprètes de la chanson gharnati , nul ne peut en disconvenir et nous avions même été les premiers à applaudir cette belle initiative , mais là où le bât blesse , c'est lorsqu'on «oublie » de rendre le même hommage à ces authentiques maîtres de la nouba , à ces pédagogues et à ces professeurs émérites dont toute la vie fût vouée à la formation de générations entières de musiciens auxquels ils tenteront de transmettre , patiemment , généreusement et au prix d'un travail acharné , un inestimable héritage.
Alors exit ces formateurs de l' ombre qui , comme Hadj Moulay ont toujours travaillé loin des feux de la rampe et du « microsillon » pour préparer la relève et les virtuoses de demain ' Pour notre part et eu égard à ce qui précède, nous aurons la faiblesse ( ou la naïveté ) de croire qu'il ne s'agit nullement de querelles de clochers et encore moins ' concernant Si Moulay- d'une mise en quarantaine « ostensiblement » décrétée par quelques « tâcherons » de la culture.
En fait , cette mise à l'écart qui s'apparenterait à une véritable exclusion , fera réagir certains mélomanes lesquels iront exprimer - ab imo pectore - leur profond mécontentement : ce maître de la çan'âa serait-il devenu subitement persona non grata ' Ou ferait-il les frais d'un ostracisme pusillanime qui ne veut pas s'assumer ' D'autres, profondément désillusionnés , ajouteront sur un ton badin, que l'hommage au cheikh était « virtuellement » programmé ,mais que de multiples contraintes l'auraient fait reléguer aux 'calendes grecques ! Certains enfin ,se voulant plus conciliants ,auraient même évoqué un problème de fond , lié plus prosaïquement à un manque 'd' oseille 'etc.,etc.
Mais dans tout ce fatras de conjectures , tout homme sensé relèverait de facto une profonde déception , dont l' expression parfois débridée , ne transgressera jamais pour autant les règles de la bienséance , étant intimement convaincu par ailleurs que « Ahl el andalous yafhamou el ichara ».

Quoiqu'il en soit et nonobstant cet état des lieux , replaçons nous dans le domaine strict du « Fen » pour rappeler aux mémoires oublieuses que
Si Moulay est :
'L'un des créateurs en 1967 , sous les auspices de Hadj Bouzidi Benslimane et avec le précieux concours de benyahia Benyahia et ismet Benkritly , de la SMACC (Section de Musique Andalouse du Cercle du Croissant )
'L'un des fondateurs en 1972 du prestigieux Nadi El Hilal Ettaqafi (*)
sous la baguette duquel le Nadi aura culminé , avec à la clé , un brillant palmarès qui est resté dans les mémoires
' Un professeur infatigable , dont l'enseignement didactique , aura profité , de 1967 à 1992 , à plusieurs générations d' élèves-musiciens , c'est-à-dire depuis la création de l'école jusqu'à sa retraite - bien relative celle là - puisqu'il continue encore à l'automne de sa vie , à partager sa riche expérience avec les jeunes sociétaires et à leur communiquer son inaltérable enthousiasme , l''il aussi brillant et l'esprit aussi vif qu'autrefois
' Celui qui représenta dignement cet art sous d' autres cieux , sillonnant avec la troupe du Nadi El Hillel Ettaqafi , plusieurs pays ( la Syrie en 1981 ; le Maroc en 1989-1990-1991 ; la France et l' Italie en 1990') qu'il fera vibrer aux sons de la kouitra et de la mandoline .


(*) Suivant le procès verbal de l' assemblée constitutive établi le 13 décembre 1972 , les membres fondateurs du « Nadi El Hillel Ettaqafi » sont :
Karakache hadj mostefa, Chali Hadj Ahmed , Maati hadj mohamed ,Benghali hadj sadek, Benatia maamar ,Benmaamar hadj tayeb, Benslimane bouzidi ,Benkrizi moulay ,Benyahia benyahia , Belayachi hadj abdelkader , Belbachir hadj abdellah , Saci messaoud , Bendani mohamed , Benkhaouane mohamed , Ould bey hadj smaine , Ould bey hadj ghali ,Guellati hamida, Benmansour mustapha , Benameur abed , Benatia noureddine , Tahar mohamed , Benbernou mohamed , Benbernou yahia ,Benghali mansour , Khelifa abdelkader , Benhaoua abdelkader , Benbrahim charef , Benkredia aissa , Hamdani tayeb , Benkrizi Fodil .

Nous continuerons dans ce qui suit , à retracer les grandes lignes de l'oeuvre du maître Benkrizi Moulay , sans renoncer pour autant à nous questionner sur le pourquoi et le comment d'un oubli que certains « zélateurs amnésiques » auront commis à l'encontre du maître mostaganémois lors de l' évènement « hommage aux maîtres » qui s'était tenu à Tlemcen « capitale de la culture islamique » , un « oubli » qui aura laissé pantois l'ensemble des mélomanes mostaganémois .
En somme , cet « oubli » aussi énigmatique que troublant ,nous interpelle et nous pousse tout naturellement à nous poser trois bonnes questions :
-1ére :Comment peut-on «oublier » ,un maestro récompensé par «l'Académie Arabe de Musique » (lors de son 16éme congrès tenu en 2001 à Alger )'
-2éme : Comment peut-on « oublier » un maître qui porta haut l'étendard de la musique andalouse et qui reçut les gratifications du « Ministère de la Culture » (lors du Festival National çan'âa en 2008 )'
-3éme : Comment peut-on enfin « oublier » un cheikh dont la baguette et la maestria étaient sollicitées par les chevaliers de la musique çan'âa d' Alger et de Blida , tels Ahmed Serri , Mohamed Khaznadji , Zerrouk Mokdad , Mustapha Benguergoura '...
Ainsi ,cet ardent serviteur de la Nouba , qui forma des générations de musiciens, fut contre toute attente laissé en rade et pour ainsi dire « ignoré » comme un vulgaire ménétrier , lui dont toute la vie fut consacrée d'abord à l'enseignement puis à la diffusion de cette çan'âa , jusqu'à ce qu'elle devienne après des années de patience et au prix d'un travail colossal , un art intra-muros incontournable , au même titre que le chaabi ,le bédoui , le chant aissaoui , la peinture ou le théâtre, ce dont Mostaganem , carrefour de la culture et berceau de Sidi Lakhdar Benkhlouf et de Cheikh El Alaoui , ne peut que s'en enorgueillir .
Et si l'on considérait le chapitre diffusion , l'on notera que c'est grâce à Hadj Moulay Benkrizi qu'une belle gerbe d'associations verra le jour dans sa ville ,soit directement sous sa houlette, soit sous son instigation , dans la mesure où ses anciens élèves créeront à leur tour d'autres formations de musique andalouse, parmi lesquelles se détache l'association d'El Fen Oua Nachat devenue elle aussi une véritable école ,suivie par un florilège de sociétés musicales et culturelles de création plus récentes (El Wifak ; Mesk-el-ghanaïm ; El Wichah ; Afaq ( Azur) ; El Amel de l'association Cheikh El Alaoui ') ce qui constitue avouons le , la plus belle des offrandes et sans doute le plus bel des hommages à un cheikh dont la poigne et la rigueur sont restées par ailleurs célèbres ( ce dont se souviennent avec beaucoup de nostalgie ses anciens élèves ) ,contrastant pour ceux qui ont le bonheur de l'approcher, avec un altruisme débordant et une affabilité légendaire. En vérité, monsieur Moulay est une source pétillante de générosité, dans laquelle nous puisons notre vitalité.
Et nous ne terminerons pas ce chapitre sans signaler que le maître ,qui a ficelé ses mémoires depuis quelques années - mémoires que le « département du patrimoine immatériel et chorégraphique » pourrait faire 'uvre utile en parrainant sa publication ' avait fait connaître au grand public, grâce à une série d' articles publiés dans la presse , les sommités de cette musique savante. Car monsieur Moulay a le culte du partage . Et aussi loin que remonte la mémoire , cette propension au partage a toujours été son credo et son sacerdoce .
Mais avant de survoler quelques repères du parcours de l'actuel président d'honneur de la sémillante « association d'Ibn Badja » , levons d'emblée les équivoques et précisons que :
'Cet écrit n'est point une supplique et encore moins une sollicitation d'une quelconque grâce , mais plutôt une sorte de mise en point - faite en catimini eu égard au respect filial que nous vouons à notre maître - et qui ne répond en fait qu'à un élan du c'ur .
'Le distingué directoire sache qu'il n'est pas dans notre intention de jouer aux rabat-joie ou aux trouble-fêtes .Que nos amis de Tlemcen ,avec lesquels nous partageons de nobles valeurs se rassurent et en soient convaincus .
'Du haut de ses quatre vingt ans , Si Moulay , connu pour sa modestie et sa grande humilité ainsi que par une moralité forgée dans nos traditions , n'est pas homme à quémander une quelconque faveur . Sa culture , sa probité et sa dignité , comme des anges gardiens , en banniraient jusqu'à l'idée même
inférant à tout ce qui précède , cette démarche qui coule donc de source, a simplement pour but de rappeler à l'honorable cénacle , que monsieur
Moulay-Ahmed Benkrizi mérite bien - in fine - qu'il soit récipiendaire de cette même reconnaissance, pour les raisons déjà évoquées , mais surtout aussi pour le rôle primordial qu'il joua dans l'enracinement de la Nouba sur les rives de Mesk -El -Ghanaïm . Et un hommage posthume , aussi faste soit-il , reste toujours entaché de regret car la '« camarde vigilante » ne nous ferait peut-être pas la grâce de nous accorder une aussi belle opportunité, quoique le fringant octogénaire semble , Dieu merci , avoir un « coeur qui n'a pas de rides » , puisqu'il continue , pour notre bonheur , à battre encore la mesure.
Une telle sommité n'est donc plus à présenter et si nous étions contraints de le faire , nous le ferions bien volontiers pour l'histoire et pour les pépinières qui bourgeonnent ici et là , et qui augurent d'un printemps merveilleux .


Nos grands-pères mostaganémois étaient-ils friands de musique andalouse ' D'après certains témoignages concordants et des sources dignes de foi , la réponse coule de source . C'est donc dans un environnement propice et sur une terre défrichée que prendra lentement racine la nouba , patiemment bichonnée par des artistes hors pairs , au talent admirable .

Mais pour avoir un aperçu sur cet environnement , il nous faudra nécessairement opérer un retour en arrière .
Depuis plusieurs décades , Mostaganem semble avoir eu un avant-goût de la Nouba depuis que la brise de la çan'âa est venue faire frissonner son anse turquoise . Depuis lors , ses suaves octaves ne cesseront de bercer l'âme de nos grands- pères et tenir sous le charme, la belle cité de Sidi Said. Les amoureux du legs andalou y étaient légion et parmi ces noms , l' histoire retiendra celui du regretté Habib Bentria (1902-1950) , grand admirateur de la çan'âa algéroise .Cet autodidacte chevronné (1) , un habitué du « çerk » ( Cercle du croissant) , était contraint pour peaufiner son art , de faire de longs déplacements vers cet Alger des années trente , où l'on assiste à la création des premières associations de musique andalouse. L'émergence de ce mouvement associatif est venue corroborer une intense activité artistique qui s'était mise en branle dans le microcosme algérois - activité que d' aucuns assimilerons à une véritable « résurrection culturelle » - et qui sonnait en fait , comme une réplique cinglante au grand charivari du centenaire . Cette effervescence donnera naissance , à des sociétés musicales (2) dont le point de mire sera la sauvegarde d'un patrimoine arabo-andalou multi-séculaire :
El Djazairia (1930) , El Mossilia (1932) puis El Gharnata (1933) seront en effet les remparts qui seront dressés pour endiguer le précieux héritage et lui éviter l'effritement .
C'est donc dans cet Alger marqué par un climat de réappropriation identitaire que débarque le jeune Bentria . Là des amis musiciens l'aiderons à parfaire sa technique musicale et l'introduiront dans l'univers naissant et déjà bouillonnant des associations . C'est ainsi qu'il effectuera quelques passages dans l'association « El Djazaïria »(3) où il aura la chance de côtoyer la future élite de la çan'âa , qui y fait ses classes , constituée par une cuvée prometteuse laquelle formera quelques années plus tard , la fine fleur de l'école algéroise : Mohamed Fakhardji ; Abderezzak Fakhardji ; Omar Bensemmane ; Abdelkrim M'Hamsadji ; Abderrahmane Belhocine ' des noms prestigieux qui donneront ses lettres de noblesse à la Nouba et surtout au mouvement associatif dont ils seront les figures de proue.
Cette quête musicale et ces allers-retours vont s'étaler sur plusieurs mois. Mais la maladie mettra fin brutalement à ces pérégrinations. Impotent et cloué dans une chaise , il arrivera grâce à la flamme de la Nouba à surmonter les affres de la solitude et la douleur de l'handicap .Pour meubler ses moments ,il prendra l'initiative de s'entourer , en son domicile même , de nombreux sympathisants et autres mélomanes auxquels il tentera de transmettre lors de chaque séance , des connaissances engrangées patiemment et enrichies par ses nombreuses virées en terre algéroise . Parmi cette pléiade de fidèles , il nous plaît de citer Mustapha Benhamou dit Sika ; Hadj bouzidi Benslimane ; benyahia Benyahia ; slimane Berber ; Benyahia belkacem ; ismet Benkritly ; belahouel Beladjine ; abdellah Maraf ; mejdoub Belkheira ; mustapha Ould Maamar ; lakhdar Benazeddine '
La graine de Nouba semée par « sissi » Bentria , attendra patiemment son printemps qui n'éclora qu'après l'indépendance , grâce notamment au dévouement et au sacrifice admirable d'un fidèle parmi les fidèles , le regretté Hadj Bouzidi
Benslimane, dont le rôle déterminant pour la promotion de cet art dans notre cité mérite d' être rappelé .
Au fait , pourquoi cette attirance pour la çan'âa algéroise ' En remontant aux sources , nous relèverons qu'au début du 20éme siècle , quand ce style commença à sortir des limites de son giron ,la çan'âa algéroise fut adoptée tout « naturellement » par nos grands-pères , sans doute charmés par son phrasé plus aéré , plus modulé , plus cadencé et pour tout dire plus « digeste » que le style gharnati , réputé plus austère et plus solennel , n'admettant en conséquence aucune fioriture ni aucun ornement .
D'autres parts , Il est établi que des liens de grande estime , d'amitié et même familiaux (à cette époque ,la famille Sfindja avait une alliance avec la famille Benyekhou de même que Ahmed Serri avec la famille Benkritly ), unissaient nos mélomanes à quelques chioukh de l'école algéroise.
Ainsi , les chanteurs Abderrahmane Belhoucine ,Ahmed Serri ,Dahmane Benachour ,Hadj Mahfoud 'étaient souvent sollicités pour célébrer des mariages ou étaient invités à titre privé par des familles mostaganémoises pour le plaisir de savourer une Nouba ou d'autres fois pour rehausser d'un panache andalou une fête familiale


De plus , nous remarquerons que Mostaganem et Alger , ces villes ouvertes sur la mer et vivant donc au rythme des échanges , semblent avoir forger à travers l' histoire , de solides passerelles entre elles , comme en témoigne ces nombreuses convergences et affinités en matière d'art et de culture .
L'on aura noté au passage que malgré la relative proximité géographique , les m'chaïkh tlemcèniens se faisaient plutôt rares à Mostaganem.
Par ailleurs , l' avènement des supports phonographiques et surtout de radio-Alger avec la diffusion de tranches de « musique classique algérienne » qui fera connaître les virtuoses de la çan'âa , viendront conforter ce goût immodéré pour cette musique raffinée. C'est dire, pour paraphraser un chanteur , qu'il y avait de la 'Nouba dans l'air à Mostaganem , mais que cette Nouba n'avait jamais été enseignée d'une façon didactique comme cela se fait aujourd'hui dans les associations , c'est-à-dire selon des canons d'apprentissage communément admis et à l' efficience nettement prouvée . Ce défi qui tient de la gageure ,sera superbement relevé par Hadj Moulay Ahmed Benkrizi lequel , conforté par son expérience dans la SMACC , présentera en 1972 à Alger , au troisième festival de musique andalouse , après d'harassantes années de formation et de travail , la première véritable association de musique andalouse de Mostaganem devant un parterre de connaisseurs, tout autant médusés que charmés par le doigté prometteur de ces musiciens racés venus de la petite ville de Mostaganem , cité où la grande culture fait florès avec les Hamada , Abdelkader Betobdji , Kaki, Benabdelhlim , Khadda ,Benanteur , Ali Benkoula , Maazouz Bouadjadj , Mohamed Tahar , Benaissa Abdelkader , Mohamed Chouikh , Okacha Touita ,Habib Tengour'
Cette troupe qui portera le nom de Nadi El Hilal Ettaqafi (sa dénomination ,tout comme sa devancière la SMACC ,se réfère et se veut un hommage au doyen Cercle du croissant ) (04) lequel gagnant en maturité , sera vite adoptée par la « famille andalouse » et ira étaler sa classe à Tlemcen (tous les festivals de la musique traditionnelle de 1974-1990) ; Constantine (tous les festivals du malouf ,de 1981 à 1987) ; Alger (tous les festivals du printemps musical , de 1985 à1989) '
Voilà succinctement exposées les grandes lignes de l''uvre du maître .
Et en guise de bouquet final , offrons nous ces quelques repères biographiques.
Hadj Moulay-Ahmed Benkrizi est né le 04 septembre 1931 à Relizane .
Quelques mois plus tard , sa famille retourne à Mostaganem où un certain frémissement culturel commence à se faire sentir dans la « communauté autochtone » (l' Union Littéraire Musulmane Mostaganémoise est créée vers la
fin des années vingt suivie par quelques « Sociétés » qui esquissent un timide éveil à la faveur de la loi sur les associations du 01 juillet 1901 ).

Son père Belahouel , cordonnier de son état , est un mélomane patenté qui s'entoure d'amis musiciens parmi lesquels le violoniste Hadj El Ghali Ould Bey qui jouait dans les orchestres châabi du cheikh Belkacem Ould Said (1875-1946) et du cheikh Abderrahmane Benaissa (1895-1958) .

Notes de renvoi :
(1)D'après le précieux témoignage de Mr . Slimane Berber
Voir également : http://rasdwamaya.skyrock.com/1776204966-Si-Habib-Bentria.html

(2) Soulignons qu'au delà de ce même élan salvateur qui animait les élites juives
( les juifs sont naturalisés français par le décret Crémieux d'octobre 1870) ) et les élites « autochtones musulmanes » , la situation particulièrement humiliante de l' algérien « sujet français » devenu apatride sur sa propre terre , poussera ce dernier à se démarquer pour affirmer pleinement son identité reniée . Alors que s'emballent les flonflons outrageants du centenaire , l'exacerbation de ce sentiment d'asservissement atteint son douloureux paroxysme . Ce qui viendra conforter l' irréversibilité d'une prise de conscience dont la traduction « artistique » se fera entre autres par la création d'associations musicales voulues spécifiquement algériennes . Tout ceci pour rappeler que si « El Andaloussia » (fondée en 1929 par Khrief ) est de création juive (tout comme sa devancière « El Moutribia » fondée en 1911 par Edmond Nathan Yafil) , par contre les associations «El Moussilia »( celle qui sera reconstituée en 1932) , « El Gharnata »(1933) et « El Djazaïria »(1930) dont l'appellation aura le mérite de revendiquer sans ambages une «algérianité» mise sous l'éteignoir depuis une siècle , seront elles de création viscéralement algérienne .Ces repères identitaires culturels s'intègreront dès lors dans un véritable éveil nationaliste qui va marquer ce trentenaire ( création en 1926 de
l' Etoile Nord-Africaine ; l'Association des Oulémas d'Algérie en 1931 ; du PPA en 1937 ) , et augurer d'un long processus de lutte de libération nationale.

(3) A sa création , « El Djazaïria » est présidée par l'illustre Mohamed Ben Teffahi
( disciple du grand maître Mohamed Sfindja) , principal professeur , secondé dans sa tâche par les maîtres Mahieddine Lakehal et Ahmed Essebti dit Ahmed « Chitane ».

(4) Le Cercle du Croissant est fondé en 1912 par MM. :
Dr. Queyrat ; A.Veller ; Hamidou Mohamed ; Belhamissi Abdelkader ; Omar Gaouar ; Benyekhou M'Hamed ; Alioua Abderrahmane ; Alioua Mostefa ; Benkritly Bensaber ; Benkritly Mustapha ; Bensmain Mohamed ; Bensafta Abdelkader.

Dans cette ultime épisode , nous poursuivrons la biographie de Hadj Moulay Benkrizi et nous verrons comment ce dernier ,avec une poignée de mélomanes à leur tête un fervent admirateur de la Nouba , le distingué Hadj Bouzidi Benslimane, réussiront au terme d'une aventure ô combien exaltante à implanter définitivement la çan'âa sur les rives fertiles de Mesk-El-Ghanaim.
Et nous conclurons , en espérant que l'écho de cette missive écrite avec une profonde sincérité, parvienne à qui de droit .
Ceci dit , ne faisons pas trop attendre le petit Moulay

Le petit Moulay a sept ans , quand l'ami de son grand-père ,le cheikh belkacem Ould Said ,une grande figure du chaabi mostaganémois, l'initie à la mandoline .
Et ce qui n'était qu'un jeu va devenir peu à peu son passetemps favori . Au lycée René Basset ( l'actuel lycée Zerrouki Cheikh Ben Eddine) , il poursuit avec sérieux et grande assiduité sa scolarité en « série lettres » , couronnée en 1950 par un Bepc .Dans le même lycée , il est élève chez Masvignier professeur de musique et chef du « Cercle philharmonique de la ville de Mostaganem » .Le hobby de la çan'âa lui colle à la peau .Il sera autodidacte s'appliquant à reproduire des airs entendus à la radio ou mémorisés lors des soirées animées par des célébrités algéroises et blidéennes invitées par des mélomanes mostaganémois ( Abderrahmane Belhoucine , Ahmed Serri , Hadj Mahfoud , Dahmane Benachour , et des chanteurs chaabi comme El Anka ,Hadj Menouer ...)
En 1954 , il obtient haut la main le baccalauréat .Il optera pour une carrière réputée difficile , celle des finances . Il est sous-directeur des impôts à Tiaret ; directeur des services financiers à Mascara '
En 1964 , il est muté à Alger au ministère des finances. Cette année constitue sans doute une date charnière dans son parcours artistique. Saisissant cette aubaine et le c'ur emballé , Il saute sur cette opportunité et s'inscrit à la célèbre association « El Djazairia- El Mossilia » (créée en 1951) , école prestigieuse , réputée tout aussi bien pour sa maîtrise de l'art de la çan'âa que pour la qualité de son encadrement .

Ses maîtres sont Hadj Abdelkrim M' Hamsadji , Hadj Mohamed Bensemmane et Hadj Omar Bensemmane . Ce sera ce dernier cheikh qui prendra véritablement en charge sa formation musicale . Hadj Moulay sera donc initié aux arcanes de la Nouba et le maître , décelant chez son élève des qualités et des aptitudes exceptionnelles, lui dévoilera peu à peu le riche trésor des noubate où scintillent de splendides et rares joyaux, accessibles aux seuls initiés .
Regagnant ses pénates en 1967 , Il va s'investir avec une rare ardeur dans la toute nouvelle SMACC, créée sous les auspices de Hadj Bouzidi Benslimane, avec l'inestimable concours des « mordus » de la çan'âa , benyahia Benyahia dit « Hamia » et ismet Benkritly ,
Dans un élan de fraternité , les « anciens » du Cercle du croissant accueilleront la jeune formation dans leur modeste local sis dans un bâtiment du centre-ville jouxtant le marché et les « trois ponts » ( l'actuelle place Emir Abdelkader), local qui ne cessera dès lors de vibrer sous les échos chavirants des octaves «andalouses » dont la puissance ne cessera de monter crescendo .
Cette Formation sera constituée au départ par un noyau de musiciens , pour la plupart des transfuges du chaabi (Bendaamèche Abdelkader, Benghali Hacène, Benmansour mustapha, Benghali Mansour ,Aoued Bacha , Hamdane , Mezadja Harrag ') lesquels bénéficiant d'un enseignement de premier plan dispensé par le maître , iront « taquiner » pour la première fois et de bonne grâce la Nouba, devenue comme par enchantement moins ésotérique '
En 1972 ,Il est , comme mentionné plus haut , professeur , directeur artistique et chef d' orchestre du tout nouveau « Nadi El Hilal Ettaqafi » crée après la dissolution de la SMACC.
L'Aventure de « l'andalou » venait de commencer.
Dès lors , la sirène des rivages bleus du Dahra , charmée par ces résonances lointaines mais aux consonances familières , replongera à corps perdu dans les succulences mélodieuses de l' Andalousie de Zyrieb et d' Ibnou Badja.
Dès 1974 , Hadj Mohamed Khaznadji , relayera avec spontanéité Hadj Omar Bensemmane décédé en 1972 , pour étoffer et affermir les connaissances du toujours jeune apprenant .Et la passion pour la Nouba va finir par sceller leurs destinées . Il en découlera une amitié sincère , généreuse , pérenne , bref de cette amitié intemporelle qui traverse les âges sans prendre une ride et qui se bonifie même , car désintéressée et toute dédiée à l'Art , c'est-à-dire aux arpèges envoûtants de l' éternelle Nouba . Le maître Khaznadji se produira souvent à Mostaganem où la Nouba , trouvant un humus à son goût , ne cessera d'y égrainer ses délectables gammes pour notre plus grand plaisir.

Et cette Nouba vient encore d' être fêtée , par la talentueuse association Ibnou Badja (*)' que notre maître parraine - en s'adjugeant avec éclat ,
le premier prix au festival national de la çan'âa, qui eut lieu récemment à Alger (novembre 2011), grâce à une mémorable prestation, toute en panache, qui emballa de nombreux puristes. Et triompher au pays même de la çan'âa, relève tout simplement d'un l'exploit difficile à égaler , prouesse saluée d'ailleurs avec fair-play par le gratin de l'école algéroise , composée par des associations brillantes telles « les Beaux Arts d'Alger » lauréate du même prix en 2009 ; (Essendoussia et Cordoba ) d' Alger ; (El Moutribia et El Fen ouel Adab ) de Blida ; ( Errachidia et El Kayssaria ) de Cherchell; (Djemîet El Youssoufia ) de Miliana; (El Djenadia ) de Boufarik ; (El Amel ) de Sougueur ; (El Rachidia et El Maghbiria) de Mascara ; (Djemîet El Fen El Acil) de Khemis Miliana 'toutes formèrent une superbe haie d' honneur pour célébrer et applaudir le nouveau lauréat 2011 qui semble avoir le vent en poupe , en témoigne ses belles prestations dans nombre de festivals nationaux et à l' étranger ( dont le sublime récital donné à l'Institut du monde arabe en décembre 2010 ').
Ce forum festif et convivial qui marie l'Art à la fraternité , ne peut que faire honneur à la musique andalouse dont le puissant souffle continuera d'élever cet art séculaire vers les hautes cimes de la pureté et du raffinement , jusqu'à « crever le ciel » comme dirait Charles Baudelaire .
Nous terminerons cet écrit ou plutôt ce bref rappel historique , en empruntant avec bonheur au vénéré Sidi Abou Mediene Choaib El Ghaouti cette merveilleuse stance , dont l'esprit pourrait parfaitement circonscrire l'objet de cette missive et en être en même temps la meilleure des conclusions :
« Mata ya kirami el hayi aïni tarakoumou Oua asmaoû min tilka diäri nidakoumou »


(*)L'assemblée générale constitutive du 24 février 2002 , établit la liste des membres fondateurs de l' Association Ibn Badja , laquelle est composée de MM. . :
Benkrizi fayçal mustapha ; Benalioua sid ahmed ; Benguendouz sid ali ; Kaid samir;
Boukhoudmi smaine nourine ; Benghali hacène ; Benhaoua abdelkader ; Benabdeloued m'hamed ;Hamiti abdelhafid ;Ould moussa hafid ;Hemarid chakib ; Ould Bey m' hamed ; Benkrizi moulay ahmed ; Benslimane m'hamed aoued ; Benkrizi sidi Mohamed fodil ; Benalioua belkacem .




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