Algérie

«D'autres scénarios de type Bab El Oued sont à craindre» Djilali Benouar. Professeur et expert dans la gestion des risques majeurs



«D'autres scénarios de type Bab El Oued sont à craindre» Djilali Benouar. Professeur et expert dans la gestion des risques majeurs
-Un certain nombre d'études et des experts mettent en avant la vulnérabilité de l'Algérie, notamment la capitale, face aux risques de catastrophes naturelles. Qu'est ce qui accroît cette vulnérabilité '
Il est vrai que l'Algérie, comme beaucoup de pays, est vulnérable à certains risques naturels. Tout d'abord, il y a deux types de vulnérabilités : physique (infrastructures) et sociale. Lesquelles, si elles ne sont pas évaluées et réduites, ne feront que s'accroître et donc seront les causes de catastrophes futures. La vulnérabilité physique de nos bâtiments est en constante augmentation par le vieillissement, les mauvaises réparations, la dégradation de l'environnement, la négligence et l'absence d'entretien.
Ce degré élevé de vulnérabilité est vu et su par les autorités ainsi que par la société civile, sans faire appel à des études de vulnérabilité, en plus faites par des étrangers. Aussi de même que la vulnérabilité sociale qui englobe en plus de la pauvreté, le chômage, le manque de sensibilisation de la population aux risques, la non-préparation et l'absence de système d'alerte précoce, par exemple pour les inondations, ne font qu'augmenter la vulnérabilité de notre pays aux risques de catastrophes.
-Le séisme de Boumerdès et les inondations de Bab El Oued ont causé beaucoup de dégâts, mais on a l'impression que les leçons du passé n'ont pas été retenues. L'Algérie est-elle préparée à la gestion de ce type de risques '
Il est clair que les leçons si elles sont apprises ne feront que réduire les conséquences et non les éliminer complètement. Il faudrait aussi dire que les catastrophes que nous avons subies n'ont pas été analysées d'une manière intégrée et responsable pour déterminer les causes ayant contribué à leur survenue. Comme il est reconnu aujourd'hui que la catastrophe n'est pas prise comme un événement mais comme un processus qui a commencé bien avant que celui-ci n' arrive. Il se peut qu'une loi qui a été promulguée dans le passé ou une décision mal réfléchie puisse être le déclencheur de l'aggravation du désastre.
Par exemple, regardons les inondations de la capitale de mercredi (22 mai dernier, ndlr), et posons nous la question suivante : Est-ce qu'il était possible de réduire ou d'éviter tous ces désagréments à la population ' Je pense que la réponse est bien entendu, oui. Le manque d'entretien, la mauvaise réalisation de nos chaussées, les mauvaises réparations de nos routes, le système d'évacuation des eaux pluviales toujours bouché, absence de système d'alerte, etc. Même la radio, qui peut jouer un rôle très important dans de telles situations, ne s'est pas impliquée.
-Pensez-vous que des scénarios comme ceux de Boumerdès et Bab el Oued soient encore à craindre à l'avenir '
Sincèrement, je pense que la réponse est oui, que ce soit en Algérie ou dans d'autres pays, tant qu'il n'y a pas une action concrète sur le terrain pour réduire la vulnérabilité de la société. Dans ce cas-là, il faudrait renforcer les moyens d'intervention (pompiers, hôpitaux, etc.), c'est-à-dire accepter un certain niveau de risque en termes de pertes en vies humaines et économiques, en d'autres termes, malheureusement, des catastrophes sont encore à craindre à l'avenir.
-Quels sont les meilleurs moyens d'anticipation et de prévention de ces risques'
Les meilleurs moyens de prévention contre les risques sont bien entendu la réduction des vulnérabilités (physique et sociale) par la formation et l'application des mesures de renforcement de toutes les structures pour mieux résister aux aléas probables, renforcer les capacités de nos institutions et construire la résilience de notre pays dans tous les domaines. Aujourd'hui le mot clé de la prévention est résilience. Il est bien accepté aujourd'hui que la formation à la réduction des risques de catastrophes et la sensibilisation de la société civile et des autorités publiques permettent la diffusion d'informations vitales et l'acquisition de compétences qui permettront à la population d'être mieux protégée contre les risques de catastrophes. Les autorités publiques doivent collaborer à tous les niveaux avec les collectivités et les associations de la société civile en vue d'une meilleure gouvernance globale des risques et de leur réduction.


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