Algérie

Crise sanitaire: Relâchement et calculs politiques



Les responsables et les spécialistes de la santé s'inquiètent devant l'augmentation sensible du nombre de cas atteints du coronavirus qu'ils rattachent «incontestablement» à l'absence de vaccin mais surtout à l'abandon des mesures barrières par les citoyens.Entre l'«immunité collective» dont des responsables et spécialistes de la santé affirment l'existence depuis près de trois mois, le «léger rebond» qu'ils constatent ces dix derniers jours pour la prise en charge duquel ils rappellent juste «qu'on est sur un plateau (technique), une «3ème vague» que beaucoup d'entre eux craignent mais que des responsables rejettent plus par calculs politiques que par réalités scientifiques, «l'absence inquiétante de vaccination» que nombreux spécialistes déplorent, le secteur de la santé -tous intervenants confondus- se perd en conjectures. Jamais les responsables du secteur de la santé tout autant que ceux qui lui sont affiliés par les structures, par la profession ou la formation, n'ont autant divergé que quand il s'agit d'apprécier la situation sanitaire et les faits épidémiologiques de la pandémie de la Covid-19. Certes, c'est un tableau qui ressemble grandement à ce qui se passe à travers le monde à ce propos.
Chaque jour a son lot d'explications, de contradictions scientifiques, de rejets de certains traitements et pas d'autres, de refus d'accepter l'existence même de la maladie, cacophonie autour de son origine, télescopages d'exigences de santé publique et d'intérêts financiers colossaux de laboratoires, dénigrement de certains vaccins et pas d'autres, querelles politiques autour de la nécessité ou pas de la vaccination... Le monde perd pied devant un virus qui semble encore réserver de mauvaises surprises à l'humanité toute entière. «Non, non, on n'a pas de pressions au niveau des hôpitaux», affirment des responsables à propos de cette nouvelle «vague» de chiffres élevés de cas atteints et aussi de décès. 199 cas contaminés et 9 décès, l y a 72h, 174 cas contaminés et 8 décès, l y a 24h, la situation sanitaire est pourtant en train de s'agiter.
Le constat unanime d'un terrible relâchement
Le chef de service médecine légale et directeur des activités médicales et paramédicales au CHU Mustapha, le professeur Rachid Belhadj, nous a déclaré la semaine dernière que «notre indicateur pour nous en inquiéter est le nombre de décès». Comparé à leur nombre d'il y a deux ou trois mois, les décès reprennent dangereusement depuis quelques jours. Face à toutes ces disparités entre les professionnels de la santé dans les analyses de la situation sanitaire et ces oppositions de thèses épidémiologiques, et bien que les responsables du ministère de la Santé refusent de répondre à nos sollicitations, l'on remarque qu'ils s'accordent tous sur le constat d'un terrible relâchement chez les citoyens. «Ce qui est regrettable, c'est que dehors, les gens ont oublié les mesures barrières, ils n'en font plus cas, ce qui ne rassure pas du tout», nous affirme un responsable. «Le virus ne va pas s'éteindre comme ça, on se doit de maintenir les mesures barrières quel que soit X, jusqu'à ce que la pandémie disparaisse, les pouvoirs publics semblent l'avoir oublié, aucune autorité ne rappelle personne à l'ordre, ce n'est pas normal», constate-t-il. Il estime ainsi que «les autorités doivent sévir pour instaurer cet ordre parce qu'on ne connaît pas exactement ce qu'il en est de ce virus et de son évolution, chaque fois, on est devant une nouvelle découverte qui, très souvent, contredit les toutes premières (...)». A ce point, la science a échoué ' demandons-nous à un spécialiste du secteur. «Il faut poser cette question aux panels spécialistes de la recherche....», nous répond-il. Quid alors de l'immunité collective ' «Elle existe, elle est là mais elle est relative dans le temps», soutient-il. Est-elle alors venue et repartie tout de suite ' interrogeons-nous. «Elle est venue, elle est restée un certain temps mais elle est repartie parce qu'elle demande à être entretenue, elle demande un renouvellement», nous répond un directeur au niveau de la tutelle. Alors qu'ils parlent ouvertement notamment aux médias publics, tous nos interlocuteurs choisissent l'anonymat «pour ne pas durcir des polémiques inutiles», nous disent-ils. Par quoi devrait être entretenue cette immunité ' demandons-nous encore. «Par la vaccination et les mesures de prévention», nous dit l'un d'entre eux.
«Quand les politiques font fausse route»
L'on note que le directeur général des services de santé et de la réforme hospitalière, membre du comité scientifique de la pandémie, le professeur Lyes Rahal, a déclaré récemment à un média public que la vaccination «grand public» sera entreprise entre avril et mai. L'on rappelle toutefois qu'en janvier dernier, période à laquelle la vaccination devait commencer, le professeur Belhadj nous avait précisé que «la période est vraiment propice pour, c'est une période calme, les chiffres ont baissé, il y a moins de demandes, le personnel a récupéré, nous sommes en train de nous organiser, c'est la période idoine pour commencer la vaccination, si on était en juillet ou en août, au moment de la 2ème vague, ça aurait été difficile de faire deux opérations en même temps, prendre en charge et vacciner». En cette période de «rebond» inquiétant, l'on demande à l'un des directeurs au niveau de la tutelle pourquoi alors, le vaccin n'a-t-il pas été élargi aux populations (depuis janvier, il n'est assuré que pour les corporations prioritaires comme les personnels médicaux, les corps constitués...) ' Le professeur Mustapha Khiati nous a affirmé la semaine dernière que «les citoyens qui se sont inscrits sur la plateforme pour être vaccinés, n'ont jamais été contactés à ce jour». Le directeur qui a accepté tant bien que mal de répondre à nos questions indique qu'«on est en train de vacciner avec le peu qu'on a, même le vaccin, ce n'est pas une mince affaire pour l'avoir, il y a des puissances qui sont coincées(...)». Il lâche en conclusion : «On est en train de payer le prix de notre ignorance des années passées sur le plan de la recherche scientifique, le recul dans l'acquisition du savoir, le choix des responsables pour diriger les grandes structures de santé publique (....)». Notre interlocuteur rappelle avec une grande amertume que «quand les politiques font fausse route, c'est tout le pays qui en pâtit, pour preuve, avant qu'on ne le lui interdise, dans les années 70 jusqu'aux années 80, l'Institut Pasteur Algérie fabriquait des vaccins, aujourd'hui, l'Algérie galère pour arracher quelques doses...».


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