Algérie

CRISE FINANCIÈRE EUROPEENNE Sarkozy en sauveur de la France et du monde



De notre bureau de Paris, Khadidja Baba-Ahmed
Il ne s'est pas déclaré candidat mais tout au long de son intervention de jeudi soir à la télévision, Nicolas Sarkozy s'est positionné comme l'homme providentiel, celui qui a sauvé l'Europe et qui sauvera la France. Quant à son bilan ' La faute incombe à la crise et à la gauche sur laquelle il s'est défaussé alors que, faut-il le rappeler, elle n'est plus au pouvoir depuis des lustres.
S'il ne s'est pas encore déclaré ouvertement candidat à sa propre succession, le président Sarkozy, qui intervenait jeudi à la TV après huit mois de silence, a tout fait comme. Intervenant à la suite de l'accord obtenu la veille au forceps par les chefs d'Etat et de gouvernement européens sur la restructuration de la dette grecque, le sauvetage de l'euro et le renforcement du Fonds européen de stabilité financière, Sarkozy a martelé qu'il en était l'artisan avec la chancelière allemande et suggéré, partant, qu'ayant sauvé l'Europe, il ne pouvait a fortiori qu'être le sauveur de la France. Il faut être modeste, a-t-il dit, sur la réussite du sommet de Bruxelles, mais en l'occurrence, il ne l'a pas été. Sachant qu'il ne peut gagner sur son bilan les sondages le donnant toujours au plus bas — il a tenté, durant 1 heure 15 minutes, de rebondir sur deux tableaux : d'abord sur celui de l'Europe. Ce n'est pas la seule Europe qu'il a sauvée par les décisions obtenues la veille, mais c'est le monde entier qui aurait sombré dans la catastrophe si les décisions de l'UE de la veille n'avaient pas été prises. Quant à l'origine de la situation dans laquelle l'Europe est embourbée, il a, là encore, son bouc émissaire : «Ni Madame Merkel ni moi-même n'étions en fonction lorsqu'on a décidé de faire rentrer la Grèce en Europe… ce fut une erreur». C'est dit et ce sont les Grecs qui ont dû se réjouir d'une telle déclaration ! Par ailleurs, lorsque Nicolas Sarkozy qualifie l'accord de Bruxelles «d'ambitieux », il ne dit pas tout et, entre autres, il évite de développer sur ceux que laissera sur le carreau cet accord par encore plus de contraintes et plus d'austérité, plus de chômage, et parallèlement plus de spéculations et d'enrichissement des acteurs financiers. C'est justement à plus d'austérité et à plus de gestion rigoureuse — le terme rigueur étant toutefois banni de son propos officiel — qu'il appelle les Français. Comme il s'est défaussé sur les anciens dirigeants de l'UE, il fait de même en se défaussant sur le Parti socialiste pour expliquer les difficultés actuelles de la France. «Les 35 heures et la retraite à 60 ans (qui date de 1983) sont des erreurs socialistes, dit-il, et expliqueraient le marasme actuel. Comme l'expliquerait aussi, selon le président, la pléthore de fonctionnaires. Pour sortir de la crise, mais aussi et surtout pour appliquer les directives européennes et notamment sauver son partenariat avec la chancelière Merkel, il annonce une croissance revue à la baisse pour 2012 (de 1,75 à 1 %) ce qui implique 6 à 8 milliards d'euros de manque dans le budget qu'il se propose de piocher notamment sur des réductions d'effectifs. Beaucoup de larmes en perspectives et de serrage de ceinture non pas pour les spéculateurs ceux-là sont épargnés mais pour les classes pauvres et moyennes qui n'ont pas encore fini de payer les pots cassés par la gouvernance financière. Quant aux affaires qui éclaboussent plusieurs de ses proches actuellement et sur lesquelles il a été interrogé, le chef de l'Etat les balaie d'un revers de main en les qualifiant de «calomnies » montées de toutes pièces.


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