Celui par lequel on se permet de vivre au-dessus de ses moyens et de dépenser aujourd'hui ce qu'on devrait gagner demain. En 2008, ce sont les ménages qui avaient fait faillites aux Etats-Unis en finançant leur surconsommation par le crédit faute d'une hausse réelle de leur pouvoir d'achat. En 2011, c'était au tour des pays de la zone euro de sombrer dans la crise après avoir cru bon de financer par la dette des services publics normalement alimentés par les revenus fiscaux. A force de transgresser les lignes rouges, les gouvernements surendettés recourent à une cure d'austérité dans l'espoir de redresser la barre. Nouveau cheval de bataille des politiques européens, les coupes budgétaires inscrites sur les programmes à venir risquent toutefois d'emporter le modèle social européen et son Etat-providence.
La question s'invite déjà dans les débats électoraux en cours, notamment en France où les échéances présidentielles seront fortement déterminées par la crise. Celle-ci a d'ailleurs eu raison de 11 gouvernements européens sans préférence particulière pour la couleur idéologique (gauche ou droite), remplacés d'ailleurs par d'austères et gris technocrates. Les hommes de pouvoirs colorés, symbolisant «une certaine réussite bling bling», n'ont plus la cote. En panne de solutions, les politiques s'évertuent à trouver des formules pour «dire la vérité» à leurs administrés. A droite, le discours se base sur le fait qu'il faudra désormais travailler plus et plus longtemps, renoncer à certains acquis sociaux pour espérer àªtre compétitif, renouer avec la croissance et dépenser plus.
D'ailleurs, Michael Burda, économiste à l'université Humboldt de Berlin, a, dans une approche libéraliste, estimé, dans une déclaration à l'AFP, que de nombreux pays européens devraient s'inspirer du modèle scandinave qui «combine des éléments d'Etat-providence avec du libéralisme».Toutefois, la social-démocratie fait partie de l'identité européenne. C'est l'avis d'Henri Sterdyniak, directeur du département économie de la mondialisation de l'OFCE. Il considère que «la protection sociale de l'Europe fait partie de son identité, il n'y a aucune raison de la remettre en cause. Il fallait à l'inverse prendre des mesures pour continuer à la financer». Car un monde sans Etat-providence, qui laisserait sur le bord de la route les démunis, est actuellement inacceptable dans les démocraties européennes.
Et la gauche est là pour le rappeler. Celle-ci soutient que la problématique est la croissance. Une croissance menacée par les plans d'austérité. Un argument qui attend d'être testé à l'épreuve du terrain. Car jusqu'à preuve du contraire, des gouvernements de gauche ont eux aussi échoué à trouver des solutions. Jean-Claude Périvier, rédacteur en chef de Défis & Profits et spécialiste du marché américain pour la Chronique Agora, est clair à ce propos : «Depuis des dizaines d'années, les politiciens de tous les pays du monde ont fait la même chose pour àªtre élus : vendre “un lendemain meilleur”. Ils ont vendu des promesses que l'économie réelle ne pouvait pas payer.» Et il est aujourd'hui difficile de faire payer plus les riches, selon lui, car le système est tel qu'ils peuvent toujours se réfugier dans des paradis fiscaux.
Son confrère de la Chronique abonde dans le même sens. L'Etat-providence a longtemps profité de la croissance de l'économie réelle poussée durant les Trente Glorieuses «puis quelque chose a mal tourné. Les zombies ont augmenté leur pouvoir... et ont fait passer de plus en plus de ressources vers des secteurs improductifs», a-t-il rappelé dans l'une de ses tribunes. Il expliquera ainsi que les taux de croissance réels ont baissé et les salaires réels n'ont marqué depuis aucune amélioration significative. Ce qui a induit le recours à la dette aussi bien pour les Etats que pour les ménages. Le résultat on le voit aujourd'hui. Les riches s'enrichissent et les démunis s'appauvrissent chaque jour un peu plus.
Le mouvement des «indignés» est l'expression même du ras-le-bol. Les voix qui se sont élevées sont un temps muselées. Or, la colère gronde en Europe. L'Union et l'euro font jaser.
Le souverainisme de l'Etat-nation revient à la charge. Les prochaines échéances électorales en Europe promettent bien des surprises en termes de vote-sanction. Les populations ruminent le peu d'importance accordée par les grands de ce monde à leurs préoccupations réduites à une quantité infinitésimale. On redoute déjà une percée de l'ultraconservatisme et ce ne serait pas la première fois. On sait déjà ce que l'injustice a engendré au cours du Printemps arabe.
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Posté Le : 29/12/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Roumadi Melissa
Source : www.elwatan.com