Emile Coué, vieux
pharmacien, demandait à ses patients de répéter à haute voix matin et soir,
vingt fois de suite, la phrase suivante : « Tous les jours, à tous points de
vue, je vais de mieux en mieux ».
On appelle cela «
prévisions autoréalisatrices ». En jargon économique, cela signifie que le
marché reposant sur la confiance, un discours alarmiste en cas de crise
économiste en accroît les effets alors que des propos rassurants ont toutes les
chances de calmer les tensions. « Prévisions autoréalisatrices », c'est plus
distingué que d'utiliser la vieille « méthode Coué » dont usent et abusent
actuellement les gouvernants de la plupart des pays. Il ne se passe pas, en
effet, un jour sans qu'un ministre américain, français, allemand ou anglais
annonce triomphalement la fin de la crise et la reprise prochaine de la
croissance.
La finance internationale
égale à elle-même
Quand on regarde
de plus près ces nouvelles magnifiques et porteuses d'espoir, on constate que
la moindre récession actuelle (par apport aux indices paniquards) est due aux
déstockages massifs des entreprises qui préfèrent vendre à prix cassés que
conserver des stocks coûteux de produits ; que les plus mauvais chiffres du
chômage attendus sont surtout causés par la radiation massive de demandeurs
d'emploi des fichiers des agences pour l'emploi...
Mais le sublime est atteint avec le
comportement de nos chers banquiers, et « chers » est à prendre au premier sens
du terme. Coûteux. L'essentiel des grandes banques, dont la faillite est à
l'origine de la crise actuelle, ont été en partie sauvées (et pour combien de
temps ?) par l'injection massive de fonds par les Etats. Les contribuables
seront donc appelés à combler les déficits budgétaires par leurs impôts,
c'est-à-dire par leur épargne et par une moindre consommation.
Ces mêmes banques ont présenté ces dernières
semaines pour la plupart des bilans excédentaires. Comment expliquer ce
redressement rapide et quasi miraculeux ? Elles ont préféré « garder le pognon
» et reconstituer leurs marges en réduisant les emprunts consentis aux
particuliers et aux entreprises. Bref, en refusant de jouer leur rôle, prêter
de l'argent à la machine économique, alors qu'elles sont les premières
responsables de la récession actuelle. Bref, les établissements captent les
fonds publics et les garde pour eux, alors que l'économie a désespérément
besoin d'argent frais pour redémarrer.
Pourquoi cette attitude irresponsable et si
peu soucieuse de l'intérêt général ? Parce que de gros bénéfices pour les
banques signifient de grasses redistributions (salaires, primes,
intéressements...) pour nos bons banquiers. Car ces messieurs de « la phynance
», comme disait le Père Ubu, n'ont rien appris, tout oublié de la crise dont
ils sont responsables, sauf la défense intransigeante de leurs intérêts privés.
Raison avancée en choeur par nos banquiers pris la main dans le sac : « il faut
bien récompenser l'intelligence et la performance » et empêcher les meilleurs
traders de passer à la concurrence. Voilà un raisonnement qui vaut son pesant
de stocks options !
Ceux qui ont prôné depuis trente ans un
discours hyper-libéral et mené par les spéculations permanentes la planète au
bord de la ruine, continuent à exiger en toute bonne foi que leurs intérêts
particuliers soient bien supérieurs à l'intérêt général. Il serait, à mon avis,
de bon sens d'encourager ces meilleurs traders à « partir » à la concurrence,
voire de les accompagner vers l'ANPE la plus proche.
Ce qui frappe le plus dans la situation
actuelle, c'est l'apathie des pouvoirs publics face à cette situation. Lors du
dernier G20 à Londres, les gouvernants adoptèrent une mâle résolution qui
exigeait une réglementation rapide et ferme, voire autoritaire du système
financier international. Depuis, plus rien ! Si ce n'est la mine agacée ou
consternée de nos gouvernants à l'annonce quasi hebdomadaire de bonus
munificents que s'accorde telle ou telle direction de banque.
Pis, en France, le sauvetage des principaux
établissements financiers s'est pratiqué sans les contreparties demandées, sans
nationalisation partielle ou totale des établissements faillis (ce qui a été le
cas aux USA et en Grande-Bretagne), sans même l'introduction de représentants
de l'Etat dans les conseils d'administration des sociétés concernées.
Nicolas Sarkozy a menacé tout l'été de «
mettre au pas » les banquiers français. Ces derniers en rient encore... Plus
prudente, sa ministre de l'Economie, Catherine Lagarde, estime que « la
désintoxication de la finance ne peut être qu'internationale ». Avant que le
consensus sur les méfaits de la drogue du pognon se réalise, des flots de
dollars, de livres et d'euros couleront dans certaines poches...
Une crise morale
autant que financière
Le gouvernement
français a moins d'hésitations quand il impose, ce mois-ci, l'obligation du
travail le dimanche (une absurdité en période de chômage), repousse l'âge de la
retraite ou propose une contestable « taxe carbone » qui va imposer un prélèvement
anti-pollution de 300 euros à tous les ménages !
On ne peut comprendre l'extrême prudence des
gouvernants vis-à-vis des banques que pour une raison idéologique : ces mêmes
gouvernants ont ânonné depuis trois décennies le dogme de l'indépendance
absolue de la sphère financière vis-à-vis des Etats. Ces derniers se privant
eux-mêmes de toute capacité d'intervention. On ne change pas facilement un
système hyper-libéral où le profit individuel est l'alpha et l'oméga de la
vertu, alors que l'intervention étatique dans l'économie est présentée comme
une tentation diabolique, voire une resucée du bolchevisme collectiviste.
Plus généralement, la montée de
l'individualisme, le calcul du talent par le seul argent gagné, l'affrontement
encouragé de tous contre tous et surtout des plus riches contre les plus
pauvres expliquent la brutale perte de tout sens de la réalité par une poignée
de financiers qui n'ont même plus conscience de l'immoralité, en période de
crise, de la situation personnelle de gagner chaque année individuellement
l'équivalent de dizaines de milliers des gains annuels de simples travailleurs.
Ces derniers étant bientôt menacés d'être au chômage.
Dans le même registre, on est stupéfait de la
très violente et ubuesque offensive menée par le Parti républicain américain,
sous la houlette de l'industrie pharmaceutique et des lobbies de la médecine
privée, devant «l'outrecuidant» projet de Barack Obama de reconstruire un
système médical public. Alors qu'un Américain sur six ne dispose d'aucune
couverture maladie ! Mais pourquoi ces foutus pauvres n'acceptent-ils plus de
rester comme ils sont ?
Ainsi va le vaste monde qui, chaque jour,
nous surprend un peu plus. Mais il me faut, à ce creux du mois d'août, vous
entretenir d'un sujet autrement plus sérieux.
La grande menace du
week-end anglais
L'Angleterre ? La
Grande-Bretagne ? Ce sont des îles, quelque part au-dessus de la Bretagne. Il
se trouve qu'en Bretagne, il existe un département qui s'appelle le Finistère,
littéralement « la fin des terres » ! Cela veut bien dire qu'au-delà, il n'y a
plus rien ! Vous imaginez, du coup, le sort chaotique des populations qui
vivent dans ces pays brumeux, bien loin de toute vraie civilisation et
notamment celles de notre « mer commune », la Méditerranée.
Dans cet ensemble confus, autoproclamé «
Grande-Bretagne » (comme si la Bretagne, la vraie, la nôtre, pouvait être la «
petite » Bretagne ?), coexistent avec difficulté depuis des temps immémoriaux
des Irlandais, des Ecossais, des Gallois, des Angles, des Saxons, des Pictes...
Pourtant, la France avait assumé sa traditionnelle mission civilisatrice en
envoyant, vers l'an 1066, un concitoyen normand mettre un peu d'ordre. «
Guillaume le Conquérant » prit rapidement le pouvoir, et sa cour et sa
descendance firent l'usage d'une langue concise, précise, tout à la fois
poétique et d'une rigueur grammaticale d'exception. Bref, ils parlaient le
français et avaient adopté les us et coutumes de la seule civilisation qui
vaille.
«L'Angleterre ?
Une colonie française qui a mal tourné...»
Hélas ! Cette
aube de la culture n'a guère duré. Non seulement les autochtones ont rapidement
repris l'habitude de parler leurs sabirs locaux, mais ils ont même osé réclamer
et occuper de larges parties de notre généreuse patrie, comme la Normandie et
l'Aquitaine. Il a fallu une guerre de « Cent Ans » pour les en chasser
définitivement. Et encore...
Par nature, l'Anglais est fourbe, égoïste et
méprisant. L'Angleterre, tout au long de son histoire, n'a eu qu'un seul projet
: contrarier le développement naturel et harmonieux de la France en Europe.
Waterloo, morne plaine...
Dans le même esprit de jalousie maladive,
l'Angleterre a même réussi à s'accaparer un empire colonial plus grand que le
nôtre !
Et ne parlons pas
de l'empire américain, construit indûment sur de vastes et solides possessions
françaises allant du Québec à la Louisiane, qui tire son nom de notre bien-aimé
Louis XIV.
Malgré un déclin certain, l'agressivité
anglaise persiste, notamment sous des formes insidieuses. Ils prétendent ainsi
concurrencer, sous la forme alambiquée du terme « humour », le domaine
traditionnellement français de la plaisanterie, déclinée sous de multiples formes
allant de l'ironie aristocratique à la « gauloiserie », bien souvent paillarde
et populaire.
Les Anglais affirment également avoir «
inventé » le football, qui signifie en réalité balle au pied, le rugby, le
golf, le volley-ball, la boxe.., tout en se contentant de codifier de façon
boutiquière des pratiques ancestralement françaises. Et qui c'est qui a inventé
les Jeux Olympiques ? C'est nous ! C'est nous ! Merci, Pierre de Coubertin. Et
qui c'est qui accueille les prochains JO ? Ces salauds d'Anglais !
Evitons d'aborder dans des termes encore plus
francs l'infâme influence anglo-saxonne sur notre jeunesse qui se voit
détournée des vraies valeurs françaises, l'accordéon, la musique religieuse,
les chants patriotiques, les chorales scoutes au bénéfice du jazz, du
rock-and-roll, de la pop, du disco, pour en finir avec le rap !
Le rock-and-roll
! Et ils nous traitent de «grenouilles» !
Car, de surcroît, le pernicieux complot
anglo-saxon s'exerce également sur le langage : les anglais sont «chic», «snobs»,
«fashion», ils sont des «VIP», toujours dans le «cool», le «move» et le «must»,
toutes expressions, signalons-le, d'origine anglophone. Attirés tels des
papillons par la lanterne qui va irrémédiablement les brûler, deux cents mille
(je dis bien deux cents mille !) de mes concitoyens vivent aujourd'hui à
Londres !
Pauvres et
malheureux otages !
Bien pire, imaginez-vous les conséquences
détestables d'un mécanisme inverse ? 200.000 Anglais à Paris ! J'en tremble
encore.
Mais la concision étant la première règle du
beau discours, venons-en aux faits.
Week-end algérien
Ce n'est pas sans
une certaine émotion que j'apprends qu'en Algérie une nouvelle décision
gouvernementale estivale modifiait les dates du week-end, trad.: «fin de
semaine». Horrible néologisme anglo-saxon désignant le repos hebdomadaire : le
jeudi-vendredi disparaissait au bénéfice du vendredi-samedi. Le choix est lourd
de conséquences. Dans tous les domaines d'activités.
Prenons par exemple le cas du Chroniqueur de
Paris. Devra-t-il toujours envoyer sa contribution hebdomadaire le mercredi
pour parution le jeudi ? Ou le jeudi pour parution le vendredi ?!!
Plus gravement, la terminologie anglo-saxonne
« week-end » semble avoir pris le « lead » dans l'expression gouvernementale.
Je rappelle à mes amis algériens que la tradition française dite des « jours
chômés », qui date du Moyen-Age, établissait « qu'hors le dimanche, un jour sur
trois est chômé ». Les différents gouvernements français de droite ou de gauche
qui se sont succédé depuis la Renaissance refusent obstinément d'appliquer
cette tradition aussi vénérable que vertueuse.
Dans le cas de l'Algérie, l'application de
cette vieille norme française aurait permis de conserver le jeudi, d'appliquer
le vendredi et le samedi, tout en gagnant le dimanche !
Bon Ramadhan !
Tout le monde
aura compris que je ne déteste pas vraiment les Anglo-saxons. Les Irlandais,
les Gallois, les Ecossais, les Anglais et leurs nombreux cousins
nord-américains sont le plus souvent des mecs « bluffants », toujours capables
de rebondir quand ils sont dans la situation la plus difficile. Et ils
n'hésitent pas à se moquer d'eux-mêmes. M'enfin, leur cuisine est vraiment
mauvaise. Ah ! Elle est fine cette remarque franchouillarde à la veille du
Ramadhan !
Mais je sais qu'après l'effort sur soi-même,
la rupture du jeûne est un grand moment de fraternité et de convivialité
amicale et familiale.
Bon Ramadhan à tous !
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Posté Le : 20/08/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Pierre Morville
Source : www.lequotidien-oran.com