La répression, le droit et la délation
Azouz Begag est en colère. L?ancien ministre chargé de l?Egalité des chances est en guerre contre Nicolas Sarkozy. Il a rappelé s?être opposé à la « sémantique guerrière » du ministre de l?Intérieur de l?époque, et actuel locataire de l?Elysée. « On a voulu me faire disparaître dans les coulisses de l?oubli. Nicolas Sarkozy est allé chercher les électeurs en souffrance du Front national en s?attaquant à ceux qui excisent les filles, les polygames et égorgent leur mouton dans la baignoire. » « Les mots sont très importants. Celui qui les a traités de racaille est aujourd?hui chef de l?Etat. Dans le ciel de la République planent des hélicoptères et des drones », observe Azouz Begag. « Il faut que le président aille à Villiers-le-Bel et à Argenteuil faire acte de repentance », conclut malicieusement l?ancien ministre de la promotion de l?égalité des chances. Le maire socialiste de Clichy-la-Garennne (93), Gilles Catoire, insiste sur l?importance de la police de proximité. Dans sa ville, présentée comme modèle par la présidente du Club des journalistes algériens en France (CJAF), Nadia Bey, les rapports entre la police et les jeunes ne sont pas tendus. Le maire, avec beaucoup d?humeur, remarque que les quartiers où sévit la violence, les dealers n?ont pas encore pris leurs marques. « Les voyous n?aiment pas le désordre ! Ils sont même les alliés objectifs de la police dans ces quartiers. Ils ont besoin de paix pour continuer leurs affaires. La délation est dangereuse, il y a un grand risque d?escalade », note le premier magistrat de Clichy-la-Garenne. La police a distribué à Villiers-le-Bel (Val-d?Oise) des tracts appelant d?éventuels témoins de « coups de feu tirés contre des policiers » lors des violences qui ont éclaté dans la ville, à témoigner anonymement, contre une rémunération à hauteur de « plusieurs milliers d?euros ». Une méthode très critiquée par l?ensemble des participants. Très en colère, l?animateur de l?association AC Le feu, Mohamed Mechmech, s?indigne et accuse les autorités de vouloir pousser les jeunes à se révolter. « Pourquoi ne le fait-on pas pour les pédophiles ? On a envie d?aggraver la situation dans ces quartiers. On peut avoir des dénonciations calomnieuses. On va entrer dans un engrenage dangereux. Le ministre de l?Intérieur, censé rétablir l?ordre, apporte le désordre. La voyoucratie est en col blanc. Sarkozy constate qu?il descend dans les sondages. Que fait-il ? Il brandit à nouveau le spectre de l?immigration », analyse l?animateur social. Pour Mouloud Aounit, président du MRAP, « rien ne justifie qu?on prenne en joue un policier. Dans cet appel à la délation, il y a un prolongement irresponsable de ce gouvernement et de Nicolas Sarkozy. Il y a chez les jeunes, une expression qui revient beaucoup : ??on n?est pas des moins que rien.?? Le gouvernement est atteint d?une crampe mentale, il n?a rien compris à ce qui s?est passé en 2005 ». L?absence d?institutions dans ces quartiers oblige la police à être en première ligne à la moindre échauffourée. « La police est souvent tenue pour le premier interlocuteur quand les jeunes veulent s?exprimer publiquement, d?où un antagonisme violent. Dans certains quartiers, la police est la dernière institution à rester quand toutes les autres sont parties. En Europe, sauf en Angleterre et en Allemagne, la police est un instrument politique », explique, pour sa part, le sociologue Fabien Jobard.
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Posté Le : 10/12/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : Rémi Yacine
Source : www.elwatan.com