L'éparpillement
des votes en Belgique lors des législatives du 13 juin a laissé les
nationalistes flamands maître du jeu politique avec 30 % des votes en Flandre.
Que faire avec
les 70 % restant des votes qui aiment toujours une Belgique unie et solidaire
avec les francophones ?
Et c'est reparti ! Flamands et francophones
ne parlent plus (au sens propre du terme) la même langue. Plus de trois mois
après les élections législatives anticipées du 13 juin, la Belgique n'arrive
toujours pas à s'entendre pour la formation d'un gouvernement. Et comme de
tradition, les partis politiques engagés dans les négociations se rejettent la
responsabilité de l'échec. Les francophones de Wallonie et Bruxelles,
soupçonnent les nationalistes flamands de la Nouvelle alliance flamande (NVA),
aidés par les sociaux chrétiens du CD&V, de velléités séparatistes, quand
ces derniers les accusent de frilosité pour une profonde réforme de l'Etat,
dont la principale pomme de discorde porte sur le statut de la capitale belge,
Bruxelles, et sa banlieue de Hall et Vilvorde (BHV). Le pré formateur, le
socialiste Elio Di Rupo désigné par le Roi des Belges, Albert II, pour mener
les négociations a jeté l'éponge, vendredi, en présentant pour la deuxième fois
en une semaine, sa démission au Roi. Comment et pourquoi ? Au sortir des
élections anticipées du 13 juin, les Flamands ont plébiscité la NVA avec près
de 30 % des voix, lui conférant le rôle de chef de file pour négocier la
réforme de l'Etat, attendue et revendiquée également par les Francophones du
sud du pays. Ces derniers ont plébiscité de leur côté les socialistes (PS) en
lui accordant un peu plus de 30 %. Le reste des partis politiques flamands et
francophones font figure d'outsiders. Après bien de tractations et une première
mission d'information confiée par le Roi au leader de la NVA, Bart Dewever, une
coalition de partis entre dans la négociation en juillet sous la houlette du
socialiste francophone Elio Di Rupo. Il s'agit de la NVA, du CD & V, du
S.PA (socialistes) et Groen (Verts) pour les Flamands ; et du PS, du CDH
(sociaux chrétiens) et des Verts côté francophone. Au total, sept partis
politiques belges entament les négociations. Si tout le monde est d'accord pour
une réforme de l'Etat, son contenu et ses objectifs différent entre Flamands du
Nord et Francophones du Sud (Wallons et Bruxellois). De Juillet à fin août, les
réunions marathon se multiplient et l'on annonce (plutôt on laisse entendre)
que les négociations sont, certes serrées, mais avancent quand même. On annonce
qu'un nombre important de compétences politiques (et de gestion) est transféré
du pouvoir fédéral vers les entités fédérées (les trois régions que sont la
Flandre, la Wallonie et Bruxelles – capitale). Conséquemment, la loi de
financement est adaptée. On parle de 15 milliards d'euros transférables du
fédéral vers les entités fédérées. Puis arrive l'épineuse question du statut de
Bruxelles –capitale et sa banlieue Hall et Vilvoorde (BHV). Là-dessus quelques
éclaircissements sont nécessaires pour que le lecteur y saisisse un peu de quoi
il s'agit. En fait, Bruxelles compose avec les arrondissements de sa banlieue
que sont Hall et Vilvoorde une même circonscription électorale. Hall et
Vilvoorde comprennent 35 communes situées en Flandre, mais sont habitées par
plus de 80 % de Francophones. Elles votent lors des élections législatives et
des européennes avec Bruxelles, habitée par 95 % de Francophones et située,
géographiquement, elle aussi en Flandre. Les Flamands souhaitent (exigent) la
scission de cet arrondissement (Hall et Vilvoorde) pour qu'il soit rattaché à
une circonscription électorale flamande. Les Francophones sont d'accord et
exigent en contrepartie un élargissement des compétences de Bruxelles, et
surtout un soutien financier à la capitale. Et c'est là-dessus que les
désaccords commencent : quelles compétences nouvelles pour Bruxelles et surtout
quel plafond de financement et par qui ? Flamands et Francophones se « crêpent
le chignon» là-dessus. 500 millions d'euros / an jusqu'à 2012 sont proposés par
les Francophones. Les Flamands se limitent à 250 millions / an. Vient ensuite
la question des navetteurs, ceux qui travaillent à Bruxelles et paient leurs
impôts en Flandre et en Wallonie. Les Flamands travaillant sur Bruxelles sont
plus nombreux avec un chiffre estimé à 300.000 navetteurs. En termes de revenus
fiscaux pour la capitale c'est une énorme perte. Vendredi soir, c'est le
«clash». Les négociations sont suspendues, le pré
formateur socialiste démissionne. Le Roi, chef de l'Etat, a convoqué durant le
weekend, chacun à son tour, l'ensemble des chefs de partis politiques belges.
Il décidera après d'une nouvelle formule. Laquelle ? Trois possibilités
s'offrent au Roi : la désignation du vainqueur des élections au nord du pays,
le leader de la NVA pour un énième round de négociations; l'appel aux libéraux
que sont le MR francophone et le VLD flamand qui, malgré un score appréciable
aux législatives ont été, jusque-là, en marge des négociations à les rejoindre
; ou enfin appeler à de nouvelles élections législatives. Dans les trois cas,
la donne centrale, c'est-à-dire un accord sur la forme et le but de BHV serait
le nÅ“ud gordien qui gripperait un accord final de gouvernement. Au-delà des
débats sur les aspects techniques, financiers et institutionnels de la réforme
de l'Etat, se cache en fait deux conceptions de gouverner et de gérer en
Belgique : un système libéral, pour ne pas dire ultra libéral voulu par les
nationalistes flamands et un système social démocrate préféré par les
francophones (et qui gère le pays depuis plus d'un siècle). Dans ce sens, les
nationalistes flamands plaident pour un système institutionnel confédéral,
c'est-à-dire l'inverse du système fédéral en place à ce jour. Dans ce climat
politique tendu maintenu par une presse dépassée par les événements faisant
dans la politique fiction, les citoyens belges sont, à juste titre, angoissés
par le devenir incertain de leur nation. Ils oublient, médias obligent, que
plus de 80 pour cent des Belges n'ont pas voté pour les nationalistes et autres
séparatistes. Ils tiennent à leur belgitude et ne sont pas prêts de laisser les
moins de 20 % d'électeurs au plan national entrainer le pays dans le chaos. La
démocratie respecte tous les avis, y compris la minorité nationaliste qui tance
ce beau pays. Mais pas à n'importe quel prix.
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Posté Le : 06/09/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Notre Bureau De Bruxelles: M'hammedi Bouzina Med
Source : www.lequotidien-oran.com