La soudaine recrudescence de la violence en Syrie ressemble, à s'y
méprendre, à l'idée du scénario libyen.
La réaction violente et insensée du colonel Kadhafi aux revendications
sociales et politiques du peuple libyen semble faire des émules parmi les
dirigeants arabes contestés par leurs peuples.
Le président yéménite Ali Saleh
Abdallah est revenu sur sa promesse de quitter le pouvoir en fin de cette année
et a annoncé, dimanche, aller jusqu'au bout de son mandat, soit fin 2013. Le
président syrien Bachar Al-Assad,
lui, a sorti la grosse artillerie (chars, canons) et intensifie la répression
contre les manifestants. Il ne parle plus à son peuple que par les armes et la
violence meurtrière. Les présidents yéménite et syrien ont compris que la communauté
internationale - en particulier les Occidentaux - est engluée en Libye pour un
bout de temps, sans doute assez long pour qu'ils aient le temps et les moyens
de s'occuper d'eux. Quant à la
Ligue des Etats arabes (22 pays), la Conférence des pays islamiques
(57 pays), le Conseil de coopération des pays du Golfe (6 pays) l'Union du
Maghreb arabe (5 pays) et jusqu'à l'Union africaine, toutes ont déserté, soudainement,
la scène diplomatique mondiale et se taisent honteusement sur les drames des
peuples syrien, yéménite et libyen.
La crise arabe a révélé la vraie
nature des organisations politiques arabes et maghrébines : leur insignifiance
politique, l'hypocrisie de leur fraternité et leur solidarité de façade. Dire
qu'excepté l'UMA et le CCG, les autres organisations
disposent d'un siège aux Nations unies ! C'est-à-dire qu'elles disposent d'une
tribune mondiale où elles peuvent faire entendre leurs voix.
En l'état des choses, il faut bien
admettre que l'entêtement du «guide» libyen donne des idées aux autres
dictateurs arabes : ils prennent exemple sur sa «résistance». Comme aveuglés
par des décennies de pouvoir absolu, ils ne voient pas le désastre dans lequel
Kadhafi continue d'enfoncer son pays. Ils n'entendent pas les cris des
suppliciés libyens et les larmes de leurs mères. Ils n'éprouvent aucune gêne
face aux boat people des jeunesses libyenne, tunisienne et autres pourchassés
par la marine de guerre européenne.
De quoi sont accusés les peuples
arabes pour mériter tant de mépris et de violence de leurs gouvernants ? Du délit
de demander un peu plus de respect, de dignité, de justice et de liberté. Malheureusement,
les dictatures sont incompatibles avec le désir de liberté et de justice. Ce
qui se passe en Libye aurait dû inspirer les régimes syrien et yéménite à plus
de raison et à ouvrir le dialogue, à défaut de partis d'opposition, avec leurs
jeunesses.
Imiter Kadhafi, c'est courir le
risque de livrer, justement, leurs pays aux appétits occidentaux. Plus
inquiétant pour la Syrie
est son positionnement dans le jeu géostratégique au Proche-Orient. Zone tampon
entre l'Irak, la Jordanie,
le Liban, la Palestine
et… Israël, avec lequel elle a un lourd contentieux territorial (le Golan), la Syrie n'a pas le droit de
s'enfoncer dans une crise interne violente. Israël et ses alliés occidentaux
sont aux aguets.
Par ailleurs, les Européens et les
Américains, pris dans la tourmente de la crise financière et économique, ne
pourront s'accommoder plus longtemps de la paralysie et de la fermeture des
marchés arabes. Ils ouvriront les marchés arabes par la force des armes. C'est
connu, la guerre est une autre façon pour les lobbies industriels et financiers
de réaliser des affaires. Ce ne sont pas les Occidentaux qui sont en train de
perdre en Libye ; au contraire, c'est la Libye qui est ruinée et chez laquelle les
Occidentaux se présenteront, dès la fin de la guerre, comme les premiers
bâtisseurs, entrepreneurs et amis, sans oublier de présenter la facture de la
guerre, comme ils l'ont fait pour l'Irak.
Pourtant, les régimes arabes disposent
d'un atout majeur pour s'ouvrir à la démocratie et au développement: une
jeunesse prête à relever les défis de la modernité. Dommage de ne pas l'écouter.
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Posté Le : 27/04/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Notre Bureau De Bruxelles: M'hammedi Bouzina Med
Source : www.lequotidien-oran.com