Pour tenter de mettre de l'ordre dans le marché de l'or, le gouvernement multiplie les mesures : rétablissement de taxes douanières pour les produits en provenance de la Zone arabe de libre-échange (ZALE) et augmentation du capital social des importateurs d'or, d'argent et de platine. Mais ces décisions font déjà peur aux professionnels et aux bijoutiers.S'ils ont applaudi la levée de l'exonération des taxes douanières pour l'or importé dans le cadre de la ZALE, en vigueur depuis le 1er octobre, ces opérateurs se montrent très inquiets concernant la seconde mesure incluse dans le projet de loi de finances 2014. Celle-ci fait obligation aux importateurs de ces produits de définir la base de leur valeur qui doit être égale à deux fois et demie le prix du marché local et d'augmenter leur capital social, qui ne devrait pas être inférieur à 100 millions de dinars.
Cette augmentation de capital sera, si elle est avalisée par les députés à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances, la condition sine qua non pour l'obtention de l'agrément d'importation. «Le rétablissement de la taxe pour l'or importé dans le cadre de la ZALE est une bonne chose. Cela va permettre de freiner ou d'éradiquer le secteur informel qui inonde le marché de tonnes de marchandises dont la provenance reste douteuse. Cette brèche a été exploitée par les gens qui travaillent dans l'informel pour s'enrichir et procéder à l'exportation de devises en recourant à la surfacturation. Ces derniers importent souvent leur marchandise à partir de Dubaï (Emirats arabes unis) qui n'a pas à sa disposition toute cette quantité importée par des Algériens. Dubaï devient juste un pays de transit pour l'or», explique Dani Kouider, président de la Fédération des bijoutiers affiliée à l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA).
Or importé de Dubaï : une enquête est en cours
Le rétablissement de la taxe sur l'or importé de la ZALE, à la faveur de la révision de la liste négative des produits exclus de la franchise des droits de douane, intervient pour mettre un terme à l'anarchie qui règne dans ce domaine. Les autorités ont constaté, expliquent des professionnels rencontrés, une forte augmentation des importations. «Les bijoutiers et les artisans n'importent pas des quantités aussi importantes. Ce sont les professionnels de l'informel, étrangers à ce métier, qui le font. Cette brèche ouverte grâce à la ZALE leur a permis de s'enrichir au détriment des artisans. Ils ont réussi à en importer une tonne par mois, c'est énorme !» confirme Dani Kouider.
C'est pour retrouver ces quantités d'or qu'une enquête a été ouverte. «Cette pratique frauduleuse porte atteinte à la profession et aux professionnels car les mesures prises par le gouvernement vont pénaliser surtout les bijoutiers honnêtes», précise pour sa part un bijoutier activant à Alger. Ce dernier évoque même des pressions exercées actuellement sur tous les importateurs de l'Or, y compris les artisans qui importent leur matière première d'Italie et des autres pays qui ne font pas partie de la ZALE. «Les autorités ont ouvert le marché d'une manière anarchique et, maintenant, elles mettent tout le monde dans le même panier. Au lieu de mettre la pression sur tout le monde, il faut réguler le marché et faire respecter les règles d'importation», ajoute-t-il.
Les artisans bijoutiers risquent de «disparaître»
Si la réactivation de la taxe pour la ZALE est saluée par les bijoutiers, l'exigence d'une augmentation de capital social est pour eux un véritable danger. «Ce sont les bijoutiers qui subiront les conséquences. Il n'y a pas de bijoutier qui soit en mesure de relever son capital à 10 milliards de centimes. Nous avons été invités par la commission des finances de l'APN et nous leur avons exposé cette problématique. Mais si la mesure est maintenue dans la loi de finances, les bijoutiers vont fermer boutique», met en garde Dani Kouider. Selon lui, «ce sont encore une fois les gens qui agissent dans l'informel qui bénéficieront de cette situation». «Nous sommes d'accord pour la protection de l'économie nationale, mais il faut mettre en place un cadre réglementaire qui favorisera la production nationale. Il faut aussi limiter l'octroi d'agréments d'importation aux professionnels pour neutraliser les intrus», souligne-t-il.
Le président de la Fédération des bijoutiers relève également l'insuffisance de la production nationale, qui ne peut répondre aux besoins du marché local, estimés à 8 à 10 tonnes par an. «L'une des solutions à cette problématique qui pourrait être envisagée serait de permettre aux banques publiques d'importer de l'or en lingots. Celles-ci approvisionneraient pas la suite les professionnels. Cette mesure permettrait de contrôler la marchandise et d'avoir une identification et une traçabilité de l'or importé. On pourrait même instaurer une taxe interne pour les produits importés, si l'on veut protéger la production nationale», suggère-t-il.
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Posté Le : 31/10/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Madjid Makedhi
Source : www.elwatan.com