Si le code de
travail constitue un texte de loi servant de bouclier aux travailleurs contre
toute atteinte à leurs droits en milieu professionnel, ce même texte ne prévoit
rien pour protéger ce personnel en cas de harcèlement moral exercé par des
supérieurs à l'intérieur de l'entreprise. Les victimes de ce phénomène, négligé
jusque là et pas reconnu, sont nombreuses et livrées à leur sort en absence de
textes de loi définissant et sanctionnant cet acte qui, généralement, porte
préjudice à la personne de l'employé et le pousse, parfois, au suicide. Ce
n'est que maintenant que les chercheurs universitaires commencent à
s'intéresser de plus près à ce malaise. Pour définir cet acte et donner la
possibilité aux victimes de déposer plainte et se défendre, un nouveau code de
travail est en préparation pour introduire des articles sur le harcèlement
moral. Pour sortir ce phénomène, galopant dans notre société, de l'anonymat et
faire entendre les cris sourds des victimes, une équipe de recherche au Centre
national de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC) d'Oran a
étudié la violence en milieu de travail et s'est intéressée en particulier au
harcèlement moral, vu les cas enregistrés au service de psychiatrie, nous dira
M. Benahmed, professeur chercheur à l'université de Mostaganem, qui a présenté
hier, avec les autres membres de cette équipe, des communications sur
«L'approche méthodologique de prise en charge de la violence psychique en
milieu de travail».
Comment définir le harcèlement moral ? Qui
sont les victimes de cet acte ? Comment se défendre contre cette violence
psychique ? Voilà des questions que l'équipe de chercheurs a tenté de répondre
tout en faisant des propositions sur la prise en charge psychologique des
victimes. Bien que ce phénomène soit réel et constitue un vécu quotidien de bon
nombre de travailleurs, il reste, cependant, un sujet presque tabou pour la
simple raison, explique M. Benahmed, les victimes sont incapables de présenter
des preuves matérielles de cette violence considérée illégitime et subjective,
exercée par un patron d'entreprise qui dit toujours «je suis le chef, je fais
la loi». Ce chef, souligne le professeur chercheur, agit avec esprit de
domination, d'autorité et d'intérêt individuel. Il n'agit jamais dans le bon
sens de l'entreprise, puisque par ce harcèlement moral, l'employé commence à
subir des pressions, à souffrir moralement. Résultat, il est fragilisé et frôle
souvent la dépression ou le suicide. Le plus grave, estiment les spécialistes,
est que toutes les victimes, une fois malades n'ont qu'une issue de secours,
partir chez le psychiatre pour se soigner. Mais pour le préjudice moral causé
au sein de l'entreprise par un supérieur, il n'existe jusqu'à présent aucun
moyen de défense ou possibilité de déposer plainte à la justice et présenter
des preuves matérielles.
Pire encore, bien que ce phénomène n'est pas
nouveau, aucune étude n'a été faite, nous dira notre interlocuteur, pour
évaluer son importance et avoir des statistiques sur les cas avérés.
Pour avoir une idée de son ampleur, le
chercheur se réfère à des études et statistiques européennes qui montrent que
10 % de la population du monde du travail sont victimes de harcèlement moral.
64 % des victimes sont des femmes, 25 % des cadres supérieurs, 60 % ont un
niveau d'instruction supérieur au bac, 65 % sont dans un état de stress
post-traumatique et 18 % ont fait des tentatives de suicide. «Ces chiffres
restent un indice qui nous permet d'évaluer l'ampleur du phénomène dans notre
pays», dira, M. Benahmed, qui voit comme solution au problème de faire des
institutions de travail un espace pédagogique et de penser à des stratégies de
thérapie pour le personnel.
Quant au Dr Hachelafi, médecin du travail et
enseignant hospitalo-universitaire à l'EHU, il a fait une étude sur le
harcèlement moral en milieu hospitalier et relevé que les victimes, par peur de
perdre leur emploi ou, vue leur situation sociale, se taisent sur ce phénomène
et préfèrent ne donner aucune suite en cas de harcèlement moral exercé par un
supérieur.
Les femmes divorcées sont les plus exposées à
ce phénomène. Les femmes mariées préfèrent la patience et le silence. Les
contractuels, de peur de se retrouver sans emploi, ne dénoncent pas cet acte.
Les femmes de ménage, le personnel paramédical et aussi administratif sont
aussi touchés et ne trouvent aucune issue pour se défendre. Ce constat a été
fait dans les établissements publics.
Dans les
établissements privés, ce travail a été impossible pour la simple raison que
les travailleurs ne sont pas tous déclarés, autre problème que vivent de
nombreux travailleurs.
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Posté Le : 21/10/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Mokhtaria Bensaâd
Source : www.lequotidien-oran.com