Algérie

Court métrage /«Le hublot»Quand la jeunesse est privée de ses rêves



Court métrage /«Le hublot»Quand la jeunesse est privée de ses rêves
Drame - Le hublot est l'intitulé du film d'Anis Jaâd, un court métrage qui, durant 20 minutes, raconte le désarroi de la jeunesse algérienne.Cette jeunesse se sentant au plus profond d'elle-même délaissée, rejetée, ignorée, une jeunesse livrée à elle-même, le regard toujours tourné vers la mer, le c'ur serré, mais la tête pleine d'espoir.
Le film, condensé d'images réelles, sincères, poignantes, raconte l'histoire de deux jeunes, Adel et Walid, des zaouali, qui, perdus dans un total dés'uvrement, n'ont rien à faire que de rester sur la terrasse de leur immeuble et passer leur temps à regarder la mer. La vue sur la mer constitue leur seule échappatoire, une parenthèse d'oubli et de sérénité...
Ils regardent la mer, et leur regard se perd dans l'horizon, avec l'espoir de traverser, un jour, cette frontière liquide. Ils passent leur temps à rêvasser de l'ailleurs, cet ailleurs qu'ils espèrent à tout prix trouver ' aidés en cela par le joint qu'ils se passent et repassent. Un rituel journalier qui permet aux deux copains d'oublier, voire de s'oublier. Toutefois, cette évasion est éphémère.
Tous deux sont en prise avec l'ennui, le chômage et la mal vie, donc avec le désespoir. Leur vie est un drame social.
Le hublot, c'est surtout l'histoire de Walid qui nourrit ce désir de quitter l'Algérie. C'était son projet puisqu'il entretenait une relation ' par Internet ' avec une beure. Son projet était de la rejoindre à Marseille et de se marier avec elle. Mais voilà qu'un jour une nouvelle inattendue brise son rêve, elle zappe carrément son moral : celle sur qui tous ses espoirs étaient fondés, s'est mariée avec son cousin. Ses illusions se sont brusquement effondrées. Frappé de plein fouet par cette nouvelle, Walid, désespérément accablé, se donne la mort. L'issue ne pouvait donc qu'être fatale, notamment lorsque le destin s'en mêle pour sceller même les portes de l'imaginaire. En effet, si Walid se suicide en se jetant de la terrasse, cette même terrasse qui lui servait de moyen à cultiver ses rêves, à s'évader, donc à s'oublier, c'est parce qu'un futur projet immobilier allait barrer la vue sur la mer, jusque-là seule consolation pour échapper à un monde dans lequel les personnages semblent ne pas avoir de place. Et de ce fait, le coup de grâce est donné.
Ici, dans ce film, Anis Jaâd explore la jeunesse algérienne dans sa détresse. Les silences à répétition et le peu de dialogue font la force du scénario et poussent l'exploration jusqu'au bout. Jusqu'à l'ultime dénouement. la mise en scène, elle, surprend par sa recherche du beau dans le moindre détail, notamment les lumières à la fois subtiles et mélancoliques qui enlacent l'intégralité du film. Par ailleurs, l'image est sublime, conférant au film une teneur visuelle très forte. La musique ' 'uvre de Safy Boutella ' quant à elle, est une continuité du scénario et de la vision cinématographique du réalisateur.
- S'exprimant sur le titre du film, Anis Jaâd dit : «Le hublot n'est pas une fenêtre en fin de compte, si on peut regarder beaucoup de choses à travers, il se trouve qu'on n'arrive pas à y passer.» Le hublot devient alors une métaphore. Il représente l'inaccessibilité à l'autre côté de ce que l'on perçoit de l'intérieur. Il représente aussi une (première) frontière, une barrière (infranchissable) à l'accomplissement de soi. «Je montre cette impossibilité d'aller vers ce que l'on voit, et ce dehors où l'on ne peut accéder, nourrit l'imaginaire et les espoirs, ceux de pouvoir un jour passer par cette ouverture», explique-t-il. Cette ouverture se transforme en obstacle. L'obstacle est insurmontable. Cette frontière est invisible. Même si Adel et Walid sont assis sur leur chaise, sur la terrasse, même s'ils sont en plein air, ils se sentent cependant pareils à des prisonniers. Interrogé sur la genèse du scénario, il répond : «J'étais sur un balcon chez un ami et j'ai vu construire un immeuble qui m'a perturbé, car il m'a obstrué la vue sur la mer.» Cela renvoie à ce moment où Walid, déstabilisé par le projet immobilier, voit qu'il est même arraché à ses propres rêves ' et fantasmes. «En effet, on lui ôte même ce droit de rêver, ce droit d'espérer», souligne le réalisateur. Anis Jaâd, pour qui ce film est un hymne à la jeunesse algérienne, estime qu'il faut parler de cette dernière qui constitue 75 % de la population. «Ce film est un SOS de la jeunesse algérienne en mal de perspectives, un cri de détresse auquel les autorités doivent répondre. C'est une réalité à laquelle il faut remédier», dit-il. Pour lui, il s'agit bel et bien d'une tragédie sociale, un drame auquel il faut trouver au plus vite une solution. La jeunesse est l'avenir de l'Algérie, et cet avenir il faut le protéger.


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