COURSE ETONNANTE

Le curieux paradoxe des décennies à venir est que l'homme, encombré par le surnombre des digues qui ralentissent sa marche vers le futur, a créé une intelligence artificielle pour le suppléer. Après le robot de cuisine, il est en passe de remplacer le fantassin armé par l'automate en se payant entre-temps le luxe de marcher sur la Lune. La recherche et les inventions permanentes de tuteurs matériels sont depuis la préhistoire une seconde nature chez l'homme. Mais la drôle ingéniosité de l'heure est qu'il soit suffisamment intelligent pour inventer une intelligence artificielle capable d'effacer la sienne. Sa hardiesse à déléguer son pouvoir de réflexion à une machine savante a de quoi s'interroger sur les intrigantes limites de sa force intellectuelle tantôt époustouflante, tantôt désarmée.L'homme est un puits profond, sombre ou éclairé, mais il ne laisse souvent apparentes que ses prétentions. Mis au pied du mur, il dévoile ce qu'il est. Entre le dire et le fait, entre le virtuel et la réalité se plante régulièrement un immense fossé. Raser une montagne ou faire fleurir une forêt n'est pas donné à tout le monde.
La finalité de cette course étonnante démontre la complexité de son existence où il apparaît parfois génie et parfois zombie sans jamais pouvoir percer les mystères de la vie. Ce qui serait davantage significatif est que l'Intelligence artificielle décharge l'homme de ses responsabilités habituelles quand les compétences et le savoir viennent à manquer.
Les qualités humaines, de la pratique professionnelle à la gouvernance, de la représentativité électorale à la charge gouvernementale parfois délétères, il n'est pas écarté dans un avenir proche ou lointain que les gouvernances locales ou ministérielles soient mécaniques.
A défaut de dénicher les hommes les mieux indiqués pour assumer leurs pleines responsabilités, l'appel à la machine artificielle ne sera pas un palliatif à négliger.