Algérie

Côte d'Ivoire : Gbagbo fait de la résistance



Atmosphère surréaliste hier dans la capitale économique ivoirienne. Après les violents combats de la veille autour de la résidence-bunker, dont des tirs de la force de l'ONU en Côte d'Ivoire (Onuci) et de la force française Licorne contre les positions des pro-Gbagbo, la situation était trouble hier mercredi en milieu de journée. Comme une atmosphère de fin de règne. Personne, ni les menaces de la France, ni l'assaut donné par les forces de Ouattara, n'a pu convaincre le président ivoirien sortant de quitter le pouvoir et éviter au pays un bain de sang et une crise politique aux conséquences désastreuses pour le pays.

Hier, les forces du président ivoirien reconnu par la communauté internationale Alassane Ouattara ont lancé à Abidjan l'assaut final contre le bunker où est retranché le chef de l'Etat sortant Laurent Gbagbo, qui refuse de se rendre malgré l'effondrement de son régime. «On va sortir Laurent Gbagbo de son trou et le remettre à la disposition du président de la République», a annoncé Sidiki Konaté, porte-parole de Guillaume Soro, Premier ministre de M. Ouattara. Mais vers 13h00, les tirs à l'arme lourde avaient cessé depuis environ une heure près du palais et de la résidence, alors que des hélicoptères de l'Onuci survolaient à basse altitude le quartier administratif du Plateau, où se situe le palais présidentiel, après avoir survolé les environs de Cocody, qui abrite la résidence. «Le président Ouattara a estimé que les négociations engagées pour obtenir la reddition de Gbagbo traînaient en longueur. Il a donc décidé d'intervenir militairement pour essayer de régler le problème, c'est-à-dire de capturer Gbagbo en vie», selon une source gouvernementale française.

Les tirs à l'arme lourde avaient débuté en début de matinée au lendemain d'une journée d'intenses mais infructueuses tractations, au cours desquelles M. Gbagbo a refusé de jeter l'éponge. «Moi, je ne suis pas un kamikaze, j'aime la vie», a affirmé M. Gbagbo mardi à un journaliste français. «Ma voix n'est pas une voix de martyr, je ne cherche pas la mort mais si la mort arrive, elle arrive». L'assaut lancé par les combattants pro-Ouattara «est une tentative d'assassinat du président Gbagbo», a affirmé le porte-parole de son gouvernement, Ahoua Don Mello, accusant la force française Licorne d'avoir fourni «un appui aérien et terrestre».

Un porte-parole de l'ONU a indiqué que le président Gbagbo continuait mercredi de négocier sa reddition avec des représentants étrangers. ‘'Les négociations continuent, l'ONU offre ses bons offices autant que possible», a expliqué à l'AFP à New York Nick Birnback, porte-parole des opérations de maintien de la paix des Nations unies. Mais, selon le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé, les négociations auraient échoué. Il a affirmé que les conditions de la reddition de Laurent Gbagbo ont été fixées par le président Alassane Ouattara et non par la France, qui avait réclamé la veille un document de renonciation de l'ex-chef d'Etat. «Les conditions fixées par le président Ouattara sont très claires: il exige que Laurent Gbagbo accepte sa défaite et reconnaisse la victoire du président légitimement élu, nous en sommes là aujourd'hui et hélas la parole est revenue aux armes», a-t-il ajouté. Hier, le ministre français a mis l'échec des négociations de mardi sur le compte de «l'intransigeance de Laurent Gbagbo». «Naturellement, ni l'Onuci ni la force Licorne ne participent (aux) combats qui se déroulent en dehors du champ de la résolution 1975" de l'ONU, réclamant la neutralisation des armes lourdes, a-t-il aussi rappelé.

Gbagbo-Ouattara: un bras de fer lourd en pertes humaines

Depuis le scrutin présidentiel du 28 novembre, Laurent Gbagbo n'a jamais reconnu la victoire d'Alassane Ouattara, au terme d'un processus électoral pourtant certifié par l'ONU. Son régime s'est écroulé, les chefs de son armée ont appelé au cessez-le-feu, les frappes de l'ONU et de la France ont détruit une grande partie de son armement lourd, de nombreux fidèles ont fait défection, mais il a obstinément refusé de signer sa démission. «Il faut que la comédie cesse car le pays s'écroule», a conclu le responsable des forces de M. Ouattara. A Abidjan, les habitants traumatisés par les récents combats restent pour la plupart terrés chez eux. Dans certains quartiers, les rues quasiment désertes étaient abandonnées aux pillards, l'eau et l'électricité sont coupées par endroits, les provisions de nourriture s'amenuisent. Mais dans le quartier des 2-Plateaux (Cocody) par exemple, certains étaient sortis faire quelques courses, et des transports en commun roulaient.

Les affrontements à l'arme lourde dans Abidjan ont fait, selon l'ONU, des dizaines de morts et la situation humanitaire est devenue «absolument dramatique», la plupart des hôpitaux ne fonctionnant plus. Le bilan des morts pourrait être beaucoup plus lourd, les équipes de secours n'ayant pas pu sillonner la métropole en raison de la grande insécurité qui y règne. Par ailleurs, l'ONU estime que les massacres de la semaine dernière à Duékoué, dans l'ouest du pays ont fait, selon les sources, de 330 à un millier de victimes - et révélé l'existence d'un charnier contenant 200 corps. Les forces pro-Ouattara ont notamment été pointées du doigt. L'Union africaine a condamné les «abus» et les «violations des droits de l'homme» et a de nouveau appelé à «la protection impérative de la population civile».

Une polémique a également éclaté sur les frappes de l'ONU et de la France. Le président en exercice de l'UA, le chef de l'Etat équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema, les a condamnées et la Russie a dit étudier leur «légalité». Par contre, le Nigeria a soutenu cet engagement. Pour le Sénégal, autre allié majeur de M. Ouattara, l'intervention répondait à une demande de l'Afrique de l'Ouest.




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