Algérie

Corruption, des noms et des non-dits



Corruption, des noms et des non-dits
Demain s'ouvre le procès de l'affaire dite de l'autoroute Est-Ouest. Qualifiée tour à tour de scandale de la corruption depuis l'indépendance, d'affaire d'Etat où seraient mêlés ministres en fonction ou anciens, cadres supérieurs de l'Etat, des intermédiaires douteux étrangers, dont certains détiennent la nationalité algérienne, de sulfureux vendeurs d'armes à l'échelle internationale, l'affaire continue à faire couler beaucoup d'encre, le tout sur fond d'intrigues, passe-droits et pots-de-vin?On y trouve aussi un «espion» alors que sa mission est précisément d'éviter toute intelligence avec d'éventuels corrupteurs. Bref, tout ce beau monde se serait acoquiné à une camarilla de rejetons «fils de» et «neveux de» pour piller le Trésor et amasser des fortunes dans des paradis fiscaux hors d'atteinte des autorités algériennes.Mais le plus inquiétant dans ce feuilleton digne d'un roman de John Le Carré, c'est le choix fait par la justice, à la veille de l'ouverture du procès, de limiter les poursuites qui ont épargné, pour l'instant, des personnalités actuellement en fonction, dont Amar Ghoul, aujourd'hui ministre des Transports, qui au moment des faits détenait le portefeuille des Travaux publics, ou d'anciens ministres ainsi que des membres de leurs familles installés à l'étranger.Tout ce «beau monde» serait, selon ceux qui ont dénoncé le «pot aux roses», les véritables artisans de cette entreprise de corruption à grande échelle. Ces cadres, soucieux de l'intérêt national, croupissent en prison, accusés de complicité, voire de maître d'?uvre dans la mise en place de cette «pompe à fric» qui a permis l'enrichissement illicite de personnes aujourd'hui établies en dehors des frontières et à l'abri de la moindre accusation.Encore une fois, comme on l'a vu avec l'affaire Sonatrach qui doit, elle aussi, repasser dans les prochains jours devant les juges, l'enquête judiciaire a choisi de s'arrêter aux lampistes et de ne pas pousser «plus haut» et plus loin ses investigations. C'est là, le gage à l'impunité, désormais le maître mot et la ligne de conduite d'un pouvoir politique dont certaines oligarchies d'affaires se réclament la proximité, pour se livrer à une série d'opérations de prédation tous azimuts à l'encontre du patrimoine national et du Trésor public. Le premier assurant la couverture des autres est la logique de fonctionnement du système mis en place, par lequel sont préservés les intérêts de clans.On a tous en mémoire le témoignage de l'ancien ministre de la Justice, Mohamed Charfi, dans lequel il rappelle l'intervention de l'actuel patron du FLN, Amar Saadani, intercédant en faveur de l'ancien ministre Chakib Khelil, cité dans l'affaire Sonatrach, afin qu'il soit à l'abri de toute poursuite, «comme un cheveu qu'on extirperait de la pâte». Pour donner plus de crédit à sa démarche, le secrétaire général du FLN s'est présenté à son interlocuteur comme étant «missionné» par la plus «haute autorité du pays». Si une telle affaire n'a pas en soi toutes les caractéristiques d'une «affaire d'Etat», en tout cas elle y ressemble.




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