? Le désarroi et l'exaspération rongent les petits pêcheurs d'Aïn El Turck, propriétaires d'embarcations de moindre envergure, qui sont immobilisés, bon gré mal gré, sur le plancher des vaches en ces temps de confinement. «C'est vraiment dommage pour le consommateur, qui est obligé d'acheter du poisson confiné», a ironisé un pêcheur du village de Cap Falcon, avant d'ajouter avec un mélange d'amertume et de gaieté de c?ur : «C'est aussi dommage pour nous autres de rater cette période propice à la pêche. Les poissons doivent se frotter les nageoires et frétiller de joie à l'idée que ce sacré Covid-19 a eu raison de nos retrouvailles printanières».D'autres pêcheurs disposant également de petits bateaux, qui avaient quelques jours avant le confinement préparé avec un amour, proche du maniaque, leur matériel de pêche, avec un peu d'avance sur le calendrier officiel et le retour des hirondelles, marquant la fin des rigueurs hivernales et l'arrivée du printemps, synonyme de l'abondance du poisson, ont rapidement déchanté avec l'annonce de la crise sanitaire. L'interdiction de circuler et/ou de naviguer dans toute l'acceptation du terme, est très mal vécue par ces petits pêcheurs, qui se retrouvent subitement et durement au pied du mur, sans être en mesure de lever l'ancre. «Nous ne pratiquons pas cette activité uniquement pour nous remplir les poumons d'oxygène et le cerveau de liberté, ni encore pour les vertus anxiolytiques et les effets antidépresseurs empiriquement prouvés qu'elle procure. Nous pêchons surtout pour nourrir nos familles avec la vente rapportée par les prises. Le poisson que nous revendons n'est pas porteur du Covid-19», a argumenté avec un agacement non dissimulé un autre pécheur du même village. D'une patience stoïque, son compagnon a tenu à apaiser l'exaspération ressentie par les petits pêcheurs d'Aïn El Turck qui, pour la plupart, ont perdu leur unique gagne-pain. «Gardons notre sang-froid et évitons la polémique. L'égoïsme n'est pas de mise en pareilles circonstances. Plus nous resterons confinés, plus nous aurons de chances de vaincre le coronavirus et revenir à nos occupations habituelles en toute liberté», avant d'user d'un humour noir pour faire oublier les déboires à ses compagnons : «Nous autres, petits pêcheurs frustrés, nous pouvons toujours nous consoler en nous disant que le poisson s'ennuie ferme en notre absence et qu'enfin débarrassés du Covid-19, le bonheur partagé, que nous aurons à se retrouver, n'en sera que plus grand.
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Posté Le : 14/04/2020
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Rachid Boutlelis
Source : www.lequotidien-oran.com