Algérie

Convergence de sons


Convergence de sons
Il se produisait pour la seconde fois en Algérie après une représentation à Alger le 14 juin 2002 au festival Bledstock. En fait, comme nous le diront Michel Sikiotakis et Nasredine Dalil, les deux « créateurs » de ce groupe, la naissance de Mugar s'est pour ainsi dire « faite par hasard. C'était en 1996 lors du festival musical « le printemps Celte » à la grande Halle de La Villette à Paris que nous nous sommes rencontrés et avons donné naissance à ce groupe ». Michel Sikiotakis qui est d'origine grecque, mais breton d'adoption, nous dira à ce propos : « A l'origine, on nous avait demandé de faire un métissage de la musique celte avec une autre, pour mieux exprimer la diversité culturelle et le métissage de la société française en cette fête de joie et de bonheur. La demande était assez floue, alors du coup nous avons eu assez de liberté pour faire ce dont on avait vraiment envie. Cette demande a été faite à Youenn Le Berre et à moi-même, et dès le début, on a essayé d'avoir une troisième tête, un musicien berbère qui piloterait cette partie de l'opération. Nous avons donc demandé à Nasredine Dalil, spécialiste de ce style de musique, de nous rejoindre pour ce projet. Un projet dans lequel on n'a pas cherché à rentrer dans des critères commerciaux, ni dans des critères de succès ou de rentabilité, car il s'agissait d'une commande de trois concerts et dans l'esprit de tout le monde, cela ne durerait pas. Mais, depuis, cela dure. Et c'est comme cela qu'est né Mugar de l'éphémère au durable ». En fait, selon notre interlocuteur, les organisateurs du festival les avaient investis de deux missions, « faire quelque chose de différent, et utiliser des musiciens amateurs en travaillant avec les banlieues parisiennes ». Pour lui, le travail de prospection était difficile dès lors que les sonorités celtes et africaines ne pouvaient constituer cet amalgame recherché « C'est pourquoi nous sommes partis sur cette idée celtique-maghreb ». Et là encore et après « avoir rencontré différents musiciens, chanteurs, on a vite réalisé que ce serait plus intéressant de le faire avec les musiques berbères, plus particulièrement avec les musiques kabyles, du fait de l'importante existence de la communauté kabyle en région parisienne. Tout comme nous avons aussi relevé cette complicité au niveau musical, au niveau historique aussi, car ce sont des communautés qui ont été déplacées, qui ont subi l'immigration, ce sont des musiques qui ont été aussi opprimées pendant pas mal d'années », soulignera encore M. Sikiotakis. Mugar signifie rencontre en berbère. C'est aussi le lieu de convergences dans le sud des caravanes. Une sorte d'oasis. C'est là la rencontre, comme nous l'avons dit, de deux genres musicaux qui ont beaucoup de similitudes.SimilitudesA la question de savoir si réellement on retrouve des similitudes de jeux, ou de rythmes entre la culture musicale celtique et la culture musicale berbère, Michel Sikiotakis nous dira : « Il y a évidemment des similitudes entre la musique bretonne et la musique kabyle, entre la musique irlandaise et la musique chaouie, une autre forme de musique berbère. Mais, en ce qui concerne l'histoire, je ne suis absolument pas compétent dans ce domaine, je me suis vraiment placé en tant que musicien. Certains disent que les Celtes seraient passés par l'Afrique du Nord. Il est vrai que l'on retrouve des menhirs en Afrique du Nord, mais de là à échafauder des théories historiques, cela n'est pas de mon ressort. D'un point de vue musical, on retrouve des choses très proches qui sont troublantes : certains chants de femmes lors des mariages ressemblent étonnamment à des gavottes bretonnes, on se rend compte également que certains rythmes berbères vont bien sur des gigues irlandaises. En Irlande, les slow airs et les sean nös, chantés avec des styles vocaux sont assez proches finalement de ce que l'on peut entendre en Afrique du Nord, ou dans le monde oriental en général, avec tout le côté ornementé, les sonorités de la langue aussi. On a dans des morceaux « Kabily-Touseg » et « Mehdi » ou encore « Gwerzi-Ouzou », quelques paroles en breton qui s'enchaînent sur des paroles en berbère et on passe de l'une à l'autre des langues sans s'en rendre compte au niveau phonétique bien sûr, car les initiés connaissent évidemment la différence. Maintenant, je pense que l'on a déjà mis beaucoup de choses extrêmement différentes sous le chapeau « musique celtique ».Lors de cette soirée, le public a bien mesuré et apprécié toutes ces similitudes avec la participation de Djaffar Aït Menguelat ou encore Djamal Allam qui, avec le regretté Brahim Izri, ont été les premiers à avoir chanté avec ce groupe Mugar à sa création.Quant à Nacereddine Dali, qui a joué dans de nombreux orchestres et accompagné les plus grands noms de la chanson algérienne en général, et kabyle en particulier, comme Gosto, Djamel Allam, Malika Domrane, Khaled, etc., s'est contenté, comme il nous le dira, de reprendre quelques notes relevées dans les médias français qu'il a soigneusement conservées dans son calepin : « Mugar, c'est en fait la fusion entre deux cultures si éloignées et si proches à la fois et qui se fait dans une cohérence stupéfiante. Une fusion, un métissage ou un patchwork où la musique traverse les montagnes du Djurdjura, de l'Aurès et les déserts de sable et les escarpements rocheux des côtes océanes pour jaillir au pays des Celtes, et où la cornemuse, le gumbri et le bendir font cause commune pour une musique célébrée et festive ». Enfin, il est à noter que le groupe Mugar, composé de 11 musiciens, compte à son actif deux albums « Kabily-Touseg » avec douze chansons et « Penn ar Bled »qui comporte 11 morceaux.


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