Algérie

Constructions dans l’Oued Bouhanak à Tlemcen : Un Danger Permanent



Constructions dans l’Oued Bouhanak à Tlemcen : Un Danger Permanent

L’Oued Bouhanak, situé dans la région de Tlemcen, au nord-ouest de l’Algérie, est un cours d’eau qui traverse des zones résidentielles et agricoles, notamment à proximité des cités dortoirs comme Bouhanak (les 400 logements) et des quartiers périphériques de Mansourah. Cependant, cet oued, autrefois un élément vital pour l’irrigation et l’écosystème local, est aujourd’hui au cœur d’une problématique majeure : les constructions illégales et anarchiques sur ses berges, qui représentent un danger permanent pour les habitants et l’environnement.

Un Contexte Géographique et Historique

Tlemcen, surnommée « la perle du Maghreb », est une ville riche en histoire, située à 520 km à l’ouest d’Alger et à 140 km au sud-ouest d’Oran. La région est irriguée par plusieurs oueds, dont l’Oued Bouhanak, un affluent de la Tafna, qui joue un rôle crucial dans l’agriculture locale, notamment pour les oliveraies, les vignobles et les cultures céréalières. Cependant, l’urbanisation rapide de la commune de Mansourah, qui inclut des quartiers comme Bouhanak, a transformé le paysage. Autrefois une petite bourgade de 15 000 habitants il y a quelques décennies, Mansourah est devenue une zone en pleine expansion, avec des cités modernes comme Imama et des lotissements universitaires à Bouhanak, attirant une population croissante.

Cette urbanisation galopante s’est accompagnée d’une occupation illégale des terrains environnants, y compris les berges de l’Oued Bouhanak. Les habitants, poussés par le besoin de logements et la spéculation immobilière, ont construit des habitations et des infrastructures directement dans le lit mineur et majeur de l’oued, souvent sans permis ni respect des normes urbanistiques.

Les Dangers des Constructions Illégales

Les constructions dans l’Oued Bouhanak posent plusieurs risques majeurs, tant pour les habitants que pour l’environnement :

  1. Risques d’Inondations
    L’Oued Bouhanak, comme beaucoup de cours d’eau dans la région, est sujet à des crues soudaines, surtout pendant les pluies hivernales. La réduction de son lit naturel par les constructions illégales empêche l’écoulement normal des eaux, augmentant le risque d’inondations. Les habitants des quartiers comme Bouhanak (400 logements) et Haï El Badr, situés à proximité, sont particulièrement vulnérables. En cas de fortes précipitations, ces zones pourraient être submergées, mettant en danger des vies et détruisant des biens. Des événements similaires ont déjà été observés dans d’autres régions algériennes, comme à Bab El Oued en 2001, où des constructions anarchiques ont exacerbé les inondations, causant des centaines de victimes.
  2. Instabilité des Sols
    Une étude géotechnique menée sur un site proche, celui de la mosquée de Bouhanak, a révélé que le sol de la région est composé d’argile verdâtre, un matériau sensible à l’eau et sujet à des phénomènes de gonflement et de retrait. Les constructions dans le lit de l’oued, souvent bâties sans fondations adaptées, sont exposées à des risques d’effondrement ou de glissements de terrain, surtout après des pluies abondantes. Cette instabilité est aggravée par l’érosion des berges, qui s’accélère en raison de l’absence de végétation protectrice, souvent détruite pour laisser place aux bâtiments.
  3. Pollution et Dégradation de l’Environnement
    Les témoignages locaux, comme celui publié sur Vitamine DZ en 2020, décrivent l’Oued Bouhanak comme un cours d’eau pollué, où l’odeur nauséabonde oblige les passants à « se boucher le nez ». Les constructions illégales contribuent à cette dégradation en rejetant des eaux usées directement dans l’oued, faute de raccordement à un réseau d’assainissement. De plus, les déchets solides issus des chantiers ou des habitants s’accumulent dans le lit de l’oued, obstruant davantage son écoulement et transformant cet espace naturel en dépotoir à ciel ouvert. Cette pollution affecte non seulement la qualité de l’eau, mais aussi la faune et la flore locales, menaçant l’équilibre écologique de la région.
  4. Problèmes Sociaux et Sanitaires
    Les quartiers construits dans l’Oued Bouhanak souffrent souvent d’un manque d’infrastructures de base. Par exemple, à Bouhanak (les 178 logements AADL), les habitants se plaignent de l’absence d’éclairage public, ce qui favorise l’insécurité et les attaques par des chiens errants. L’insalubrité liée à la pollution de l’oued expose également les résidents à des risques sanitaires, comme les maladies d’origine hydrique ou les infections dues à l’accumulation de déchets.

Une Gestion Urbaine Défaillante

L’essor des constructions illégales dans l’Oued Bouhanak reflète un problème plus large de gouvernance et de planification urbaine en Algérie. Malgré les efforts récents de la commune de Mansourah pour améliorer le cadre de vie – comme la pose de pavés, l’aménagement de terrains de sport à Bouhanak, ou encore la création d’un nouveau cimetière de 10 hectares –, les autorités locales peinent à contrôler l’urbanisation anarchique. Les annonces immobilières sur des plateformes comme Ouedkniss.com montrent que des terrains dans la zone de Bouhanak continuent d’être vendus à des prix élevés (jusqu’à 47 000 DA/m²), souvent avec des actes notariés, ce qui suggère une complicité ou une négligence des autorités dans la régulation de ces transactions.

De plus, la pression démographique et la spéculation foncière exacerbent le problème. Bouhanak, devenu un pôle universitaire avec la proximité de l’université de Tlemcen, attire de nombreux étudiants et familles, augmentant la demande de logements. En l’absence de projets publics suffisants, les habitants se tournent vers des solutions informelles, construisant là où ils le peuvent, même dans des zones à haut risque comme les berges de l’oued.

Solutions et Perspectives

Pour faire face à ce danger permanent, plusieurs mesures pourraient être envisagées :

  1. Démolition et Relogement
    Les constructions illégales dans le lit de l’Oued Bouhanak devraient être démolies, et les habitants relogés dans des zones sécurisées. Cela nécessite un recensement précis des occupants et la mise en place de programmes de logements sociaux, comme ceux déjà initiés dans d’autres quartiers de Mansourah (cités des 500 et 1060 logements).
  2. Restauration de l’Oued
    Un projet de réhabilitation de l’Oued Bouhanak est essentiel pour restaurer son rôle écologique et prévenir les inondations. Cela inclut le nettoyage des déchets, le curage du lit de l’oued, et la plantation de végétaux pour stabiliser les berges. Des ouvrages hydrauliques, comme ceux mentionnés dans le projet de la ligne ferroviaire Oued Tlelat-Tlemcen (180 installations hydrauliques prévues), pourraient être adaptés pour mieux gérer les crues.
  3. Renforcement des Régulations
    Les autorités doivent appliquer des contrôles stricts sur les transactions foncières et les permis de construire dans les zones à risque. Une collaboration entre les services de l’urbanisme, les cadis, et les associations locales pourrait aider à sensibiliser la population aux dangers de ces constructions.
  4. Sensibilisation et Mobilisation Citoyenne
    Comme le souligne un article du Soir d’Algérie, le civisme des citoyens est crucial. Des campagnes de sensibilisation sur les risques environnementaux et sanitaires, combinées à des initiatives de reboisement, pourraient encourager une prise de conscience collective. La mobilisation des habitants pour préserver des espaces verts, comme à Haï El Badr, est un exemple à suivre.

Conclusion

Les constructions dans l’Oued Bouhanak à Tlemcen constituent un danger permanent, mêlant risques d’inondations, instabilité des sols, pollution et problèmes sociaux. Ce phénomène, exacerbé par une urbanisation anarchique et une gestion urbaine défaillante, menace la sécurité des habitants et l’équilibre écologique de la région. Si des efforts locaux ont été faits pour améliorer le cadre de vie à Mansourah, une action concertée et à grande échelle est nécessaire pour protéger l’Oued Bouhanak et ses riverains. Restaurer cet oued, tout en offrant des solutions de logement dignes, serait un pas vers un avenir plus sûr et durable pour Tlemcen, une ville qui mérite de préserver son patrimoine naturel autant que son héritage culturel.




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