Algérie

Constitution et dictature



Constitution et dictature
Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), qui semble déjà connaître les contours de la Constitution que "le peuple" va bientôt se choisir, en a annoncé ce grand principe : "Un président qui gouverne et non pas qui règne, car nous avons besoin d'être gouvernés et d'aller de l'avant."Or, justement, jusqu'ici, Bouteflika a fait les deux, régner et gouverner. Il a même révisé la Constitution pour "clarifier" la confusion des deux fonctions : depuis, il est le chef du gouvernement, et le Premier ministre est là pour "mettre en ?uvre le programme du président et, à cet effet, coordonner l'action du gouvernement" et pour, éventuellement, "présenter la démission de son gouvernement" si le Parlement le lui refuse. Constitutionnellement, donc, le président gouverne déjà. Et seul. C'est-à dire qu'il règne.Aussi, depuis que le Président souffre de problèmes de santé qui l'éloignent de la scène publique, le Premier ministre et les ministres s'appliquent invariablement à préciser, à l'occasion de chacune de leurs activités, qu'ils agissent sur instruction du président de la République. Certes, la référence, devenue incontournable, sert surtout à écarter les soupçons de carence qui pèsent sur la fonction présidentielle. Mais, ce faisant, ils confirment cette omnipotence. Le dictionnaire définit ainsi l'acte de régner : gouverner à la manière d'un souverain, d'un monarque.Avant même que Bouteflika ne soit élu pour la quatrième fois à la présidence de la République, Sellal annonçait-il la couleur, au début du mois d'avril, en pleine campagne électorale : "Bouteflika mérite le statut de roi." Bien sûr, une Constitution n'est pas conçue en fonction des dispositions d'un chef d'Etat. Il nous reste à savoir si ce statut de président-régnant, ou président-gouvernant sera officialisé au cours de l'actuel mandat, ou s'il sera institutionnalisé pour le cinquième mandat.Pour l'heure, et si l'on se réfère aux récentes expériences politiques, il n'y a eu qu'une seule manière de "régner sur une république" : la dictature. Et les plus grands despotes de l'Histoire n'ont pas été des rois, mais des chefs d'Etat "élus" !Quand, il y a quelques jours, John Kerry tançait les présidents africains et leurs représentants au sujet de leur manie consistant à "modifier les constitutions" pour ne pas se soumettre au principe d'alternance politique, il ignorait peut-être ? ou feignait d'ignorer ? qu'il se heurtait à un mur d'incompréhension : en Afrique, les présidents règnent ! Et quand on règne, c'est le règne total, et pour la vie ! Si la gouvernance est un moyen d'atteindre un objectif de progrès, de développement, de prospérité, etc., le règne, lui, fait du pouvoir une fin en soi. Le pouvoir pour le pouvoir. Et c'est cette fin que visent nos Constitutions. D'ailleurs, elles sont conçues par les "concernés", autrement dit les pouvoirs régnants. Et sont donc condamnées à être adaptées par les pouvoirs leur succédant.On parle, d'ailleurs, de la Constitution de Chadli, de la Constitution de Zeroual... Et bientôt, de la Constitution de Bouteflika. Il n'y a donc pas de raison pour que le prochain ne se taille pas la sienne... tant que ce n'est pas la Constitution des Algériens.M. H.musthammouche@yahoo.frNomAdresse email




Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)