Le décès par surdose de produits stupéfiants, suite à des prises volontaires de drogues et des psychotropes inquiète les spécialistes de la santé, notamment ceux de la médecine légale. Certes, notre pays n'est pas au niveau de certains autres grands consommateurs de drogues. Mais même si les décès par overdose sont un fléau mondial, le passage de la consommation des drogues douces vers celui des drogues dures dans notre pays est devenu préoccupant à plus d'un titre. Le Pr Rachid Belhadj, chef de service de médecine légale et directeur des activités médicales et paramédicales au CHU Mustapha-Pacha d'Alger, a, dans une déclaration faite au Quotidien d'Oran, tiré la sonnette d'alarme et lancé un appel de détresse pour des jeunes victimes d'overdose suite à la consommation excessive des drogues dites dures. Souvent, dit-il, il s'agit de jeunes qui ne dépassent pas les 25 ans et parmi eux des filles. Le Pr Belhadj dira que nous ne sommes plus dans le cadre de la consommation des drogues douces, telles qu'une cigarette ou deux de cannabis, mais aujourd'hui, nous sommes carrément face à des jeunes qui mettent leur vie en danger.Et ce, en consommant des drogues dures telles que la cocaïne, l'héroïne et la fameuse «tchoutchna». Cette dernière est un mélange d'héroïne, de Prégabaline (Lyrica) et de l'ammoniaque. Sans parler, dit-il, du Tramadol, Temgisic et autres substances. Et d'ouvrir une parenthèse pour parler aussi de drogue synthèse introduite par des étrangers et dont on ignore la provenance. Ce fléau, précise notre interlocuteur, touche toutes les couches de la société. «Cela ne se limite pas aux couches défavorisées ou les quartiers populaires», dira-t-il, ajoutant que «nous avons enregistré deux cas d'overdose depuis le début du mois de ramadhan». «Nous avons pratiqué une dizaine d'autopsies sur des sujets jeunes, des deux sexes, victimes d'overdose, dans nos services suite à des surdoses de drogues en 2022», ajoute le Pr Belhadj. En matière de lutte contre ce phénomène, le Pr Belhadj a affirmé que les pouvoirs publics ont élaboré des programmes et des plans à la fois préventifs et curatifs. Précisant que l'approche ou l'injonction thérapeutique des toxicomanes dans la chaîne pénale et sanitaire déjà adoptée est difficilement applicable. Et ce, faute de moyens, notamment en matière de nombre de centres capables de prendre en charge et d'assurer un suivi pour les patients incarcérés. Un centre de toxicomanie à Annaba et un centre de cure à Blida, et les quelques centres intermédiaires de soins en addictologie ne suffisent pas, selon le Pr Belhadj.
Ce dernier a ainsi plaidé pour la création d'unités d'addictologie dans les hôpitaux, les polycliniques et dans les prisons. Une façon de démocratiser les soins de lutte contre la toxicomanie. Et de préciser que le ministre de la Santé est sollicité pour encourager les programmes visant la création de ces unités qui pourront être rattachées aux services de psychiatrie, ou à certains services médicolégaux ou de médecine interne. Il faut, dit-il, juste doter ces unités de moyens humains, «former des médecins généralistes dans la spécialité de lutte contre la toxicomanie, du moment que le certificat d'études spécialisées (CES) existe». Enfin, le Pr a évoqué le cas des personnes qui ne consomment pas de drogue mais qui la transportent dans leurs corps (les mules) mettant ainsi leur vie en danger, pour tromper la vigilance des services de sécurité. Le procédé consiste à avaler des capsules de drogue pour les transporter d'un pays à un autre ou d'une wilaya à une autre.
Notre interlocuteur dira que la majorité des cas qui transportent ces capsules dans leurs corps sont des étrangers, mais dit-il, dernièrement, il y a des cas d'Algériens qui l'ont fait, mettant ainsi leur vie en danger. Il a affirmé qu'avec le nombre de cas en évolution, une unité spéciale a été créée depuis quatre ans au sein de son service pour prendre en charge exclusivement ces passeurs de drogue. Et ce, tout en leur assurant un endroit médicalisé propre et adéquat à part, leur permettant ainsi d'expulser les drogues par voie naturelle, pour leur éviter des complications et parfois une mort certaine. Le Pr conclut en affirmant que la lutte contre la drogue n'est pas l'affaire seulement des services de sécurité et de la justice, mais c'est aussi l'affaire de la famille, des imams, des associations, de la société civile et les services de santé qui devront agir en amont dans une démarche, en premier lieu, préventive.
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Posté Le : 06/04/2023
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : M Aziza
Source : www.lequotidien-oran.com