L'exil a souvent été un moteur à la création. Le pays perdu est fantasmé, sublimé et réinventé sous la plume d'auteurs qui recherchent une trace du passé, de l'enfance.
Sylviane Roche, écrivaine, traductrice et enseignante vaudoise (Suisse) d'origine française, a justement décortiqué la notion de l'exil, lors de sa conférence 'Entre deux chaises", organisée mardi après-midi à l'Institut français d'Alger. Elle s'est surtout intéressée à la manière dont l'exil nourrit les rapports avec l'écriture.
Tout en signalant que 'les exilés se reconnaissent", et ayant pleinement conscience que son exil n'est pas aussi douloureux que quelqu'un qui aurait quitté son pays sous la contrainte (elle s'est installée en Suisse à l'âge de 20 ans, et la langue, par exemple, n'a pas été un frein), Sylviane Roche a expliqué que l'écriture, pour elle, était une reconstruction, une restitution des 'repères de l'enfance", car 'l'exilé ne peut se raccrocher à rien d'extérieur. Est-ce que vous imaginez l'opacité d'une ville où l'on n'a pas grandi '". Pour étayer son propos, elle lira un extrait de 'Noms de rues", son premier texte, 'un texte qui a déverrouillé le processus de l'écriture littérature et de la publication". Ce choix des noms de rues comme titre de son premier texte n'est pas anodin, parce que, selon elle, 'les noms de lieux sont un aspect métaphorique de la langue maternelle, qui font qu'on peut se sentir étranger à l'intérieur d'une langue". C'est avec ce texte que Sylviane Roche fabriquait 'son pays" et 'sa légende", car 'en partie j'écris pour reconstruire, pour faire reculer le sentiment de l'irrémédiable".
En outre, l'auteure relèvera que 'tout exilé porte en lui une culpabilité sans pardon".
La culpabilité d'être parti, d'avoir survécu, de s'en être sorti, etc. ''J'ai trahi' est la dernière phrase de mon livre, et j'écris pour qu'ils me pardonnent."
Ce 'ils" renvoie à des lieux, à des espaces peuplés autrefois par des êtres, des voix, des odeurs, et qui ne s'expriment aujourd'hui que dans le souvenir et le texte littéraire. Sylviane Roche relèvera également dans sa conférence l'incapacité de l'exilé de s'intégrer dans son nouvel environnement, ou de revenir aux lieux d'autrefois.
'Petit à petit, j'ai construit mon monde de l'entre-deux", souligne-t-elle, tout en exprimant son sentiment d'insécurité qui se traduit par une conscience que tout pourrait arriver dans la vie, que tout est éphémère ou provisoire.
Elle abordera également la vieillesse, qui est une forme d'exil intérieur. Et de faire un parallèle entre l'exil au sens propre du terme et la vieillesse, en soulignant que l'exil est une acceptation du fait de vieillir avant l'heure.
S. K.
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Posté Le : 21/03/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Sara Kharfi
Source : www.liberte-algerie.com