Commentaire du caillou sur sa rivière sèche

Au départ, il y avait bien deux ou trois histoires valables,hautement significatives et dont la teneur de sens permettait d'en fabriquersoit des livres sacrés, soit des paraboles pour capter le sens de Dieu ou unebonne entame de discours assis. Durant la journée d'hier, on pouvait apprendreque le premier Chinois va marcher dans le vide de l'espace, relié par une cordeau vaisseau Shenzou VII, soutenu en bas par sonmilliard de compatriotes et surveillé de près par les Blancs. On pouvait aussis'attarder avec étonnement sur le geste épique des habitants d'un village deSouk Ahras qui ont coupé la route pour protestercontre l'état de la route qui les coupe du monde, les bloquant à l'entrée del'indépendance et les empêchant d'avoir des voitures, de l'avenir, des loisirs,des liens goudronnés et des mouvements de va et vient avec le reste de l'espèce.On pouvait aussi revenir sur les audiences ramadanesquesdu Président de la RADP,discutailler de leur titanesque déconnection du pays fourbe et mou qui lesentoure comme une langue de boeuf devenue vicieuse et convertie à la cupidité. Onpouvait, enfin, fabriquer sa blague quotidienne ou son verdict non négociable àpartir de la polémique sur la date du jour de l'Aïd, et succomber à laplaisanterie attendue sur des gens qui ne marchent pas sur la lune mais lasurveillent, offrant à diagnostiquer un rapport trouble au temps incarné par uncalendrier lunaire trouble. Cela aurait suffi pour la dose de rouille du jour, maisil y a des moments où cela ne fonctionne pas. On a beau aligner les dominos lesuns après les autres, il n'y a pas d'effet. Le sens se dérobe, n'arrive pas àdécoller ses omoplates pour en faire des ailes et on reste là, assis comme sarace à attendre le jugement dernier pour se faire compenser son énorme attente.L'homme ne fait pas en effet tout le temps l'Histoire et son historicité. Parfois,il cède à sa végétation intime et ne fait plus que lemort ou le crocodile au ras des eaux. On se lève dès le matin, déjà fatigué, conséquenced'un sommeil vécu comme des heures supplémentaires dans une gare astrale, pourrencontrer et porter sur son dos, le pays qui vous porte sur le sien pour allervoir si le soleil s'est levé de l'ouest ou si c'est seulementObama qui a gagné ou s'il y a des choses qu'on aoublié d'acheter, ou si dans le tassement de la RADP lestée par ses martyrs et aplatie par lemanque de sens, il y a une possibilité de se fabriquer un Everest individuelrien qu'en fermant les yeux et en se donnant un nom en savon parfumé.