En ces temps de jeûne notre pensée solidaire est pour les
palestiniens et tous ceux qui souffrent de l'occupation et de la violence. Les
nouvelles du Moyen-Orient ne sont toujours pas bonnes. Malgré des tentatives
d'actes symboliques de solidarité qui arrivent au compte-gouttes, Ghaza et la
Cisjordanie restent assiégées, presque complètement isolée du reste du monde.
Le type d'apartheid d'Israël se mêle à un colonialisme féroce de peuplement.
L'immense majorité de la population de la bande de Ghaza, considérée comme des
aborigènes, sont des victimes du nettoyage ethnique de 1967, et interdite de
revenir dans les villages d'où ils furent chassés.
C'est un bantoustan et la
plus grande prison à ciel ouvert du monde, dont les puissants de ce monde
détournent les yeux, complices. Même durant l'apartheid en Afrique du Sud, les
forces racistes n'ont pas utilisé toute la force de l'armée contre la
population civile des ghettos. Par contre, Ghaza a été agressée par des bombes
aux phosphores, interdits internationalement, des F16, des hélicoptères de
combat, des navires de guerre, des chars d'assaut.
L'Autorité palestinienne, qui n'est que l'ombre d'elle-même, vient
de plier sous les pressions américaines pour reprendre la parodie de
négociations directes avec le gouvernement israélien d'extrême-droite qui pavoise
et continue à coloniser, à détruire les maisons et à assassiner les
Palestiniens. Dans ce contexte, rien ne doit occulter que juifs et musulmans
sont frères Abrahamiques. Le problème au moyen Orient est politique. Le lien
entre le Juif et l'Arabe, l'être sémite, juif-arabe, doit être préservé et au
nom duquel il faudra lutter contre tous les extrémismes. Aucun amalgame ne doit
être fait. Islamophobie et judéophobie sont les deux faces d'une seule et même
stratégie de la haine, tantôt l'une tantôt l'autre mis en avant par les
racistes. Il ne faut pas se tromper et tomber dans le piège.
La pression américaine
Analysons la situation politiquement, sans passion et travaillons à
l'amitié. Au lieu d'informer l'opinion publique internationale, favorable à la
cause palestinienne, en mettant l'accent sur les similitudes existantes entre
le régime sioniste extrémiste et le régime d'apartheid, l'absence de stratégie,
la peur de l'épouvantail « islamiste » et les divisions internes précipitent la
faillite de l'Autorité palestinienne.
C'était prévisible faute de soutien arabe conséquent. Le
négociateur en chef palestinien Saeb Ereikat, lui-même a déclaré: «Les
Américains pratiquent l'intimidation pour que nous rejoignions de façon
inconditionnelle et pour une durée indéterminée des négociations qui pourraient
conduire nulle part. Le Président Abbas a dit «non» mais il peut ne pas être en
mesure de maintenir cette position pendant une longue période sans véritable
soutien palestinien, arabe et islamique.» Le combat pour la libération
nationale de la Palestine est en train de se transformer en revendication pour
des bantoustans et querelles politiciennes.
Sauf sursaut, les sionistes extrémistes vont réussir à obtenir une
pseudo-trêve illusoire de 20 ans pour enterrer la question. Les sionistes
extrémistes ne reculent devant rien. Pourtant, les peuples arabes continuent à
préférer la paix comme option stratégique, refusent l'extrémisme et rêvent même
d'une nouvelle Amitié. La puissance médiatique du lobby pro-israélien cherche à
faire croire le contraire. Il arrive à faire rentrer dans les esprits les
thèmes scélérats du «choc des civilisations» et du nouvel ennemi en la figure
du musulman. Pourtant, l'idéologie sioniste extrémiste n'est pas unanime dans
les communautés juives à travers le monde, même si des institutions juives ont
basculé dans un appui inconditionnel à la politique coloniale.
Qu'est devenue la proposition arabe de paix ?
Des médias et des centres de décision influents servent de courroie
de transmission à l'idéologie sioniste, pendant que le discours arabe est
dénigré. Pourtant, la proposition de paix, saoudienne, qui est devenue arabe à
l'unanimité depuis 2002, est une vraie et solide proposition constructive.
Reprise à chaque sommet arabe, elle est restée lettre morte. L'opinion
occidentale ne la connaît pas bien, voire l'ignore. Sur le plan culturel le
monde arabo-musulman, malgré des courants obscurantistes, ne cesse de proclamer
son attachement au dialogue des religions et des civilisations, mais faute de
rapport de force conséquent, il n'y a pas de réel progrès.
Les forces contre la paix élèvent toujours un mur de silence face
aux bonnes volontés. Pour les sionistes extrémistes et leurs alliés, une
critique d'Israël équivaut à de l'antisémitisme. Les deux peuples israéliens et
palestiniens ont le droit à la paix et à la sécurité. Cela n'exclut pas de
critiquer les extrémistes de deux bords.
Aujourd'hui en Europe, il est de moins en moins admissible
d'exprimer une critique de la politique de l'Etat d'Israël. Le terrorisme
intellectuel et la propagande sont tels que des citoyens européens et juifs
succombent au chantage affectif et développent un second nationalisme hors du
commun. Un chercheur juif, Jacob Cohen, parmi les justes, engagé pour la cause
palestinienne, vient de publier chez l'Harmattan un ouvrage, roman fort
significatif sur les méfaits des lobbys tentaculaires à ce sujet, intitulé: Le
printemps des sayanim, dédié «à tous ceux qui se battent pour la justice en
Palestine».
Il vise selon l'auteur, à ouvrir les yeux sur une force puissante
et insidieuse mise au service d'une idéologie de domination, afin de permettre
un décryptage des événements et favoriser l'émergence de contre-pouvoirs.
Contribuer à la paix et à la justice entre les peuples passe par le souci
d'informer.
Des propagandistes islamophobes, pour faire diversion aux impasses
de la société consumériste, alimenter la peur et le rejet de la religion,
délirent et prétendent que «la talibanisation» des sociétés musulmanes est en
passe de se généraliser.
Certes, des attitudes obscurantistes injustifiables sont visibles
en rive Sud, mais elles restent minoritaires et sont le produit des
contradictions de notre époque. «Le choc des civilisations», que les
islamophobes et les extrémistes prônent, représente le grand mensonge du
siècle. Il ne doit pas devenir une réalité cauchemardesque. Cela signifiera que
l'humanité éprouve les limites extrêmes de sa tendance au vivre-ensemble, et
que la pulsion de vie et le besoin de partage qui poussent les hommes à s'unir,
se sont épuisés, abdiquant face à la pulsion de mort et d'isolement.
Nous refusons d'imaginer un monde libéralo-fasciste, où rien ne
s'échange, rien d'humain ne circule, rien de sage ne se dit, sauf ce qui
favorise des relations conflictuelles. L'élargissement de notre sentiment
d'appartenance à l'humanité toute entière et l'attachement à la résistance
pacifique et à l'amitié entre les peuples doivent l'emporter, sur le repli et
les murs des apartheids, que certains élèvent en Palestine, entre les deux
rives de la Méditerranée et partout dans la tête des gens. L'avenir est
incertain, si des hommes de bonne volonté, juifs, chrétiens, musulmans,
humanistes, ne s'unissent pas. L'avenir du monde se joue au Moyen Orient.
* Philosophe
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 04/09/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Mustapha Cherif *
Source : www.lequotidien-oran.com