Cinéma et jeu vidéo, en voilà une histoire d'amour-haine compliquée, d'ailleurs bien documentée et commentée dans le documentaire «La Guerre des écrans». Si le jeu vidéo s'est beaucoup inspiré du cinéma, celui-ci ne le lui a pas forcément, ni souvent, rendu, avec les films «Super Mario Bros», «Street Fighter, Doom», Assassin's Creed», sans oublier «Uwe Boll», «Le pire réalisateur du monde» et ennemi juré des adaptations de jeux vidéo. Reste quelques adaptations fidèles «Silent Hill», «réappropriations officieuses» (Hyper Tension 2) et une meilleure représentation, doublée d'une reconnaissance, avec les récents «Les Mondes de Ralph» de Disney et «Ready Player One» de Steven Spielberg.Les joueurs et joueuses en terrain connu
«Free Guy» de Shawn Levy (La Nuit au musée, Real Steel) s'inscrit dans la même veine, et met en scène un monde dans le monde, monde virtuel dans le monde réel. Dès les premières images où un personnage est parachuté sur une carte comme dans «Fortnite», les spectateurs et joueurs sont en terrain connu. Les courses-poursuites, braquages de banque, explosions régulières, items à collecter et autres bugs de la matrice renvoient à de nombreux jeux d'aujourd'hui, Grand Theft Auto en tête.«Free City», le jeu dans le film, est ainsi un jeu de tir en open world, dont le spectateur devine le fonctionnement, le gameplay, mais qu'il ne verra jamais vraiment en action. Et pour cause, et c'est la bonne idée du film, Free Guy n'épouse pas le point de vue du joueur et de son avatar comme Ready Player One, mais celui d'un PNJ, un personnage non jouable.
Le soulèvement des PNJ
«C'est la prémice du film, commente le réalisateur Shawn Levy. Quelle est la vie de ces personnages, de ces gens en arrière-plan' Ils servent souvent de victimes, décors, mais chacun a une existence, une conscience, potentielle. Pourquoi ne pas mettre de côté le héros du jeu et explorer les vies intérieures de ces PNJ. D'autant plus qu'ils ont beaucoup évolué ces dernières années, et sont devenus, ainsi que leur intelligence artificielle, une composante incontournable des jeux open world et de leur réussite.»
Guy, c'est le nom du PNJ interprété par Ryan Reynolds, est ainsi un simple employé de banque, qui répète les mêmes quelques gestes et dialogues chaque jour, en boucle. «C'était très intéressant de créer un personnage volontairement pas fini, explique le production designer Ethan Tobman. Tous les détails de sa vie, de son appartement, de son apparence se sont comme arrêtés à mi-chemin, car ce serait trop long, trop coûteux de le faire pour tous les PNJ d'un jeu. Or, je pense que l'on peut, d'une certaine manière, se retrouver dans cette impression d'être à moitié accompli dans nos vies, comme coincé dans une roue de hamster.»
Une critique de certains jeux vidéo
«Free Guy» se révèle ainsi être, comme son titre l'indique, une histoire de libération comme Hollywood a l'habitude d'en raconter, et proche d'un The Truman Show ou La Grande aventure Lego. Mais il n'en a pas moins des choses à dire sur le jeu vidéo. Si les héros et joueurs n'ont pas le premier rôle, ils sont pourtant bien présents et souvent présentés comme méchants ou minables. Un message subliminal à faire passer, Monsieur Levy' «Il n'y a pas de débat sur le fait que notre jeu, comme beaucoup de vrais jeux, appuient sur certains aspects de la nature humaine... les plus chaotiques dirais-je. C'est aussi une partie du fun, de pouvoir exprimer une partie de soi, de son humanité, que l'on ne pourrait pas exprimer dans la vraie vie.» Et tant mieux'
Une lettre d'amour à la communauté
Si Free Guy commente, voire critique le jeu vidéo, il n'en reste pas moins une lettre d'amour à la communauté de gamers, à l'image de l'émotion que le film fait naître entre ses personnages, PNJ ou pas, et de la réalité des rapports virtuels. «La pandémie et les confinements ont mis en exergue pour le grand public quelque chose que les joueurs savaient déjà, déclare Shawn Levy. À savoir que les jeux et le virtuel offrent une connexion passionnante avec tes amis, des étrangers, une communauté. Le tout à travers un avatar, un autre toi, peut-être même des comportements que tu n'aurais pas dans ton quotidien. C'est une dynamique fascinante de la culture jeu vidéo. D'un côté, il y a l'artifice, mais de l'autre, il y a une authenticité. Ces connexions sont réelles.»
«La survie du divertissement est dans l'originalité»
Shawn Levy avoue avoir été moins subtil avec le personnage de grand méchant patron de studio interprété par Taika Waititi, par ailleurs réalisateur des Thor: «Je voulais pointer du doigt l'industrie du jeu vidéo, et même du cinéma, et cette croyance aveugle dans les franchises, les suites, les spin-off. Il faut savoir que «Free Guy» est le seul blockbuster original de l'été 2021. Tous les autres sont basés sur une propriété intellectuelle existante. C'est de plus en plus rare, or je pense que la survie du divertissement est dans l'originalité.» Ses propos prennent une autre saveur (ironique'), lorsque l'on sait que Free Guy est l'un des premiers films Fox à sortir depuis le rachat par Disney... et ça se voit
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Posté Le : 18/08/2021
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : L'Expression
Source : www.lexpressiondz.com