« Combat frontal». C'est ce que le général-président du Pakistan a annoncé hier, après une montée des violences consécutives à l'assaut meurtrier de l'armée contre la Mosquée rouge d'Islamabad. Dans la zone tribale, l'heure est à la rébellion et les attaques suicides se multiplient. Le Pakistan, terre d'islamisme politique par excellence, connaît avec l'affaire de la Mosquée rouge un début de rupture qui semble redoutable. «C'est modérés contre extrémistes», a déclaré le président pakistanais. Voire ! Que des radicaux existent au Pakistan, c'est un fait. Mais la formule «modérés contre extrémistes» relève surtout de ces simplifications annonciatrices des conflits durs. Le Pakistan est depuis des années en état de transe, dans une situation de conflit larvé entre un président allié obligé des Etats-Unis et une bonne partie de l'opinion, y compris «modérée». Désormais, on semble entrer dans un conflit chaud. Les Américains ont ouvertement demandé à Pervez Musharraf de lancer des opérations militaires d'envergure contre la zone tribale. «Une action militaire est nécessaire», avait lancé le secrétaire d'Etat adjoint pour les Affaires d'Asie du Sud et d'Asie centrale, Richard Boucher. A l'appui de cette exigence de guerre massive, un rapport de l'armée américaine affirmant que les talibans afghans et les combattants d'Al-Qaïda sont en train d'y reconstituer leurs forces, soutenus par des fondamentalistes pakistanais. Cette pression américaine, trop visible, conforte une bonne partie des Pakistanais que leur président n'est qu'un serviteur des Américains. De là à penser qu'on le contraint à une guerre qui n'est pas la sienne, ou du moins pas celle du Pakistan, il n'y a qu'un pas que beaucoup n'hésitent pas à franchir. Le «combat frontal», inauguré à la Mosquée rouge avec déjà des répliques meurtrières - sous forme d'opérations suicides, d'appels au djihad, et une remise en cause d'un pacte de non-agression conclu entre les milices et le pouvoir central -, est une extension du domaine de la guerre. La zone tribale devenant un champ de bataille de plus dans la guerre qui se déroule en Afghanistan. Sans aller jusqu'à décréter l'état d'urgence, comme le craignait l'opposition, le président pakistanais a décidé de renforcer la présence policière dans les zones tribales. Pourtant, à moins d'une reprise de contacts politiques, c'est la guerre qui se profile et les habitants du Waziristan qui quittent leur région ne s'y trompent pas. Il est aussi plus que probable qu'elle ne sera pas circonscrite à ce «nouveau front» mais pourrait toucher tout le Pakistan. S'il est évident que Musharraf aura la caution des Américains et des Occidentaux qui fermeront les yeux sur ses grandes imperfections démocratiques, pour utiliser un euphémisme, la vraie question est de savoir s'il aura toujours celle de son armée. Car si l'on sait comment une guerre commence, on ne sait pas toujours comment elle prend fin. Voire si elle prendra fin...
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Posté Le : 19/07/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : M Saâdoune
Source : www.lequotidien-oran.com