Algérie

Colloque international de Skikda : Mehri rend hommage à Si El Haouas



On devrait envier Skikda d’avoir une personnalité historique comme Si El Haouas Boukadoum. C’est une figure historique qui a vécu toutes les formes de la lutte pour l’indépendance de l’Algérie. C’est lui qui a instauré les véritables bases de la diplomatie algérienne.

On est très fiers de sa présence parmi nous et on ne peut que le saluer en ce jour dans la ville du 20 Août 1955. » C’est en ces termes que Mehri Abdelhamid tiendra à entamer une courte et émouvante allocution prononcée à l’occasion de l’ouverture du premier colloque international sur la Révolution algérienne organisé par l’université de Skikda. M. Mehri évitera, d’ailleurs, toute dissertation politique ou commémorative pour consacrer son intervention à rendre hommage à l’homme qui l’a initié aux tribunes. « C’était à Oued Zenati, il y a déjà plus de cinquante ans. Je me rappelle, j’étais alors jeune militant de la cause nationale et on se remettait à peine des horreurs du 8 mai 1945. On accueillait alors Si El Haouas qui devait prononcer un discours. Je me rappelle très bien, une fois réunis et alors qu’on s’attendait à ce qu’il commence son discours, il m’a regardé et m’a dit : vas-y, le peuple t’écoute. Je me suis levé et j’ai prononcé un discours alors que je n’avais rien préparé », rapportera-t-il, avant de témoigner que c’est « Si El Haouas qui a instauré les premières bases de la diplomatie algérienne ». Le geste de Mehri, qui est allé embrasser Si El Haouas et l’a ensuite accompagné, n’est pas un simple acte protocolaire. Sa portée est ailleurs, elle est à chercher dans la mémoire collective de la guerre de libération. Mehri semble même s’être déplacé à Skikda pour rencontrer l’homme. Agé aujourd’hui de plus de 90 ans et discret, cet épris d’astronomie reste aussi l’un des rares hommes à n’avoir pas trop parlé de son militantisme. L’a-t-on invité à le faire ? Condamné en mai 1945 à deux années de prison par le tribunal militaire de Constantine, Si El Haouas mérite aujourd’hui de la reconnaissance, bien qu’il est admis que nul n’est prophète en son pays. M. Bouhara, qui connaît la grande valeur de l’homme et comme pour témoigner son hommage à Si El Haouas, a accepté de remettre à El Watan le manuscrit d’un discours prononcé par Messaoud Boukadoum devant l’Assemblée nationale française alors qu’il était député de Constantine et représentait le MTLD. C’était le 20 août 1947. Pour se faire une idée de ce tribun et militant hors pair, voici un passage de son discours basé dans son intégralité sur des faits scientifiques et historiques pour évoquer, avec courage et sans démagogie, les tentatives coloniales de détruire la personnalité algérienne. « La colonisation française ne s’est pas contentée de s’approprier toutes les richesses économiques de l’Algérie et de les exploiter à son unique profit. Elle s’est attaquée également au patrimoine moral et intellectuel de notre peuple. » Il citera, par la suite, la transformation des mosquées en églises, en apportant plusieurs exemples. « Beaucoup de mosquées furent détruites… La plus belle mosquée d’Alger, Djamaâ Ketchaoua, fut affectée au culte catholique… Egalement à Constantine, Djamaâ Souk El Ghezel datant de 1730… Mais je n’insiste pas. » Sur ce, M. Louvel, du Sénat français, l’apostrophe : « Cela vaut mieux. » Si El Haouas réplique alors : « Surtout pour vous. Quand on vous dit la vérité, cela vous choque. Je le conçois. Nous sommes venus ici, non pour faire des déclarations de loyalisme, mais pour dire ce que nous pensons. » C’était en 1947, en pleine euphorie coloniale et au cœur même du Sénat français.




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