Algérie

Cohabiter avec le drapeau israélien



L'immeuble rappelle beaucoup le film à succès de Adel Imam : Essifara fil imara (l'ambassade est dans l'immeuble). De fait, l'ambassade israélienne au Caire est bel et bien nichée dans un immeuble. Celui-ci est situé à chari Ennil, à Gizah.

La représentation diplomatique israélienne occupe les deux derniers étages d'une tour qui en compte 22, un bâtiment lugubre et gris, hérissé d'antennes paraboliques comme n'importe quel immeuble d'habitation des classes moyennes au Caire. Il faut faire un effort pour apercevoir le drapeau israélien, déployé tout en haut de l'immeuble. Un petit drapeau discret, presque en berne. Deux simples barrières condamnent l'accès à l'immeuble de part et d'autre d'une petite ruelle perpendiculaire à la grande avenue Charles de Gaulle. Nous nous sommes approchés de l'immeuble problématique pour voir, en ces moments de haute tension avec Israël, si d'aventure l'ambassade fonctionnait encore et comment la rue égyptienne réagissait-elle face à ce « corps étranger » ' D'abord, oui, l'ambassade fonctionne le plus normalement du monde, et reçoit quelques (rares) visiteurs. Il n'y a pas de renforts particuliers aux abords de l'ambassade ; en revanche, il nous a été donné de remarquer des camions des forces anti-émeutes stationnés sur la grande avenue jouxtant l'ambassade, et parés à toute éventualité. Au reste, une petite faune de policiers en civil veille sur la sécurité de l'antenne diplomatique.Aussi, dès que nous nous sommes présentés devant le poste d'entrée, nous avons été « convenablement » pris en charge. Un jeune policier en civil nous conduisit immédiatement dans un bureau de sécurité donnant sur le Nil, sur le trottoir d'en face, et un interrogatoire en règle nous a été infligé par un officier. Assisté d'un subalterne, il passe au crible le contenu de nos affaires personnelles avant de fouiller nos carnets de notes. « Qui est ce Ahmed Hilmi », maugrée-t-il, intrigué par l'indication d'une rue portant ce nom. Ensuite, il scanne notre passeport. Aussitôt, il est ulcéré d'y trouver le visa iranien. « Il a été en Iran », susurre-t-il à son acolyte. Et un questionnaire de suivre sur les raisons de notre présence céans. Nos explications ne lui feront pas enlever de la tête que notre présence ici est suspecte, à croire que nous avions une ceinture d'explosifs autour du tronc. Il nous confie ensuite aux bons soins de son subalterne qui nous installe dans un poste de contrôle ouvert aux quatre vents. Sur une table dépareillée, il dispose des feuilles A4 pliées et se met un devoir de dresser un procès-verbal en prenant nos dépositions, après avoir pris le soin de noter toutes nos références d'état civil, il nous demande même :« Avez-vous la clé de votre chambre d'hôtel ' » Force est de convenir que l'homme ne manque pas d'humour, par moments (à moins que cela ne relève de la curiosité policière crétine) : « Avez-vous déjà été en Israël ' Que recherchez-vous exactement ' Pourquoi venir ici alors que vous auriez-pu aller à l'ambassade d'Israël en Jordanie ' » A un moment donné, il reçoit un coup de téléphone de l'un de ses supérieurs à qui il explique notre cas d'un débit volubile. Au terme d'une heure de faux palabres, l'officier reçoit un autre coup de fil et se résout à nous relâcher non sans nous avoir préalablement seriné le sermon d'usage : « Ce que vous dites ne tient pas la route. Faites attention la prochaine fois, c'est pour votre sécurité. » L'argument international de tous les hommes en uniforme' Les policiers égyptiens semblaient ainsi plus agacés par la présence d'un journaliste algérien devant l'ambassade israélienne que par celle du drapeau d'un pays qui vient d'exterminer 1300 Palestiniens ! Il faut reconnaître cependant que l'homme de la rue, lui, vit ce curieux voisinage avec un profond malaise. « Si ça ne tenait qu'à moi, j'aurais brûlé cette ambassade, mais que voulez-vous, c'est la politique », chuchotait le chauffeur de taxi qui nous y avait emmenés.




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