Algérie

Clôture du festival de la musique et de la chanson amazighes : Signes de renouveau



Clôture du festival de la musique et de la chanson amazighes : Signes de renouveau
Tout festival a un point de gravité, un lieu de ralliement de ses participants. Depuis samedi dernier, c'est la maison de la culture de la capitale de l'Ahaggar qui attirait ceux qu'intéressent les différentes facettes de la culture Amazighe. Située en plein centre-ville,  si tant qu’on puisse utiliser un tel concept dans une ville tentaculaire et anarchique, elle abritait le volet compétition mais également les conférences. Celles-ci débordaient  souvent sur d’autres aspects que la musique pour interroger la poésie, la culture dans son sens le plus large.  Lors de la dernière journée, un chercheur du CNRPAH, Badi Dida a évoqué les efforts entrepris depuis 2002 pour collecter, enregistrer et transmettre la musique de l’imzad.Comme d’autres genres traditionnels de la culture nationale, ce patrimoine se perd. Beaucoup de femmes qui en jouaient ont disparu et les mutations sociales qui affectent la société touaregue  ont fait le reste. L’Algérie, signataire de la convention de 2003 de l’UNESCO relative à la sauvegarde du patrimoine immatériel, a, semble-t-il, décidé d’agir. Un concours avait été organisé à Djanet en octobre 2002.  A  en croire M. Dida,  «depuis, avec l’ouverture de trois ateliers d’apprentissage, notamment à Djanet, la naissance de plusieurs associations dont «Sauvez l’imzad» à Tamanrasset qui s’occupe aussi de l’enseignement  du targui, un processus de valorisation se serait  enclenché. Deja, l’ONDA dispose d’enregistrements numérisés déposés à la radio et un livre sur le genre a été édité.  Le festival en lui-même est un événement. Le poète Benmohamed qui fait partie du jury a raison de faire remarquer «qu’il y a une vingtaine d’années, une telle rencontre était inimaginable pour les Algériens qui commencent à découvrir que notre pays recèle des trésors qui confortent notre identité». Celui qui a écrit beaucoup de textes pour les plus grands chanteurs kabyles ne cessait de répéter lors de multiples interviews à la radio «qu’on ne peut pas aimer et apprécier ce  que font les autres si on ne connait pas ce qu’on est soi- même». Venu de Béjaia, où il avait obtenu le premier  prix du festival de la chanson kabyle, Youcef Ahfir s’est dit « content de pouvoir discuter avec des artistes venus des Aurès ou d’ailleurs. « J’ai échangé des idées et  je suis déjà invité à Tebessa ou ici». Une satisfaction qui lui fait  presque oublier qu’avec les participants de Bejaia, il a  enduré la fatigue d’un voyage par route qui a duré 36 heures. Smail Matmati, plasticien qui expose dans le hall de la maison de la culture ses calligraphies inspirées du tifinagh, s’est dit aussi ravi des contacts, de la curiosité et de l’intéret du public. Ce dernier pouvait aussi s’étirer nonchalamment ou siroter un thé dans des tentes (ihaktene), fabriquées à base de peau de mouton. Hamidou Mokhtar élément dynamique de l’association « Sauvez l’imzad» se montre tout autant ravi «d’une telle rencontre qui permet l’échange entre les locuteurs des différentes variantes amazighes et constitue l’unique occasion de se retrouver». Il déplorera par contre l’absence d’organismes étatiques  comme le HCA, l’ONDA, voire Crasc dont la mission est  de protéger le patrimoine et d’assurer la recherche sur le patrimoine populaire.  Le plaisir était aussi lors des soirées où le public pouvait découvrir des sonorités auxquelles beaucoup n’étaient pas habitué. Aucun incident n’a été signalé. L’occasion a été également donnée à de nombreux jeunes venus du nord pour travailler à Tam et d’écouter des chansons et des musiques si peu présentes au quotidien. La révélation est plutôt du côté des chanteurs targuis. Ils sont de l’aisance et de la prestance sur scène toujours revêtus de tenues traditionnelles.  Le chant kabyle ou chaoui sont médiatisés. Quelques chanteurs, Mohamed Hadjoudja du Mzab Hacene Dadi, Souad Tachawit ont marqué leur passage. Très attendu,  Ali Amrane s’est aussi montré égal à lui-même lors de la soirée de mercredi. On était loin de la variété kabyle légère mais en compagnie d’un artiste fort dans tous les sens du terme. L’orchestre composé de musiciens qui ont l’habitude de jouer ensemble a permis au chanteur d’éclater. Ce ne fut pas le cas pour d’autres à l’image de Madjid Ait Rahmane qui était en désaccord avec l’orchestre venu d’Oran. Dans ce genre de manifestation, nous dira-t-il, «il faut faire appel à l’orchestre de la radio qui maîtrise tous les  genres».Les quatre jours de compétition ont surtout révélé dans tous les genres une tentative d’ouvrir la musique amazighe aux influences et sonorités du monde. Les Chaouis ne sont pas restés à la guesba d’antan, encore moins les targuis maîtres de la guitare.  Pour autant, l’instrumentation moderne et les influences de la musique n’ont nullement altéré le fond amazigh. La parole reflète des réalités d’aujourd’hui et un attachement identitaire. Tous les groupes semblent obnubilés par la recherche d’un équilibre entre tradition et modernité qui a toujours constitué le signe d’un renouveau.


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