Les villes retenues par les candidats à l'élection présidentielle du 17 avril pour le top-départ de leur campagne ne sont certainement pas le fruit d'un choix anodin.Ce qui ressort, à la première lecture de cette «cartographie», est d'abord le désir de l'ensemble des compétiteurs de se donner une profondeur «géo-sociale» en partant à la conquête de «l'électorat profond», la capitale accaparant l'essentiel de l'agenda de nos hommes politiques. Ainsi, au premier jour de la campagne, Abdelmalek Sellal, directeur de campagne du candidat Abdelaziz Bouteflika, a choisi Tamanrasset et Adrar comme écrin à ses premiers meetings. Il convient de rappeler que M. Sellal avait servi dans ces deux wilayas en qualité, respectivement, de chef de daïra (Tamanrasset, 1977) et de wali (Adrar, 1984). Tout porte à croire qu'il y compte, aujourd'hui encore, des amitiés et des réseaux solides.Sur le plan stratégique, la situation grandement préoccupante qui prévaut dans la zone Sahel explique le choix porté sur la capitale de l'Ahaggar. Dans le cas d'Adrar, les motivations sont, à première vue, un tantinet différentes.Il est de notoriété publique que M. Bouteflika avait toujours été un habitué des zaouïas du Touat, et en particulier celle du cheikh Belekbir. On ne dira jamais assez l'attention accordée par le président sortant au réseau des zaouïas et des notabilités locales dans ses différentes campagnes. Il est utile de se référer, à ce propos, à l'excellent ouvrage du politologue Mohammed Hachemaoui, Clientélisme et patronage dans l'Algérie contemporaine (Paris, Karthala, 2013) qui a mené une enquête, entre autres, dans le Touat, et a mis en avant les accointances et les connivences entre zaouïas, notables et personnel politique affilié au «pouvoir».Le spectre des salles videsAli Benflis, lui, a choisi comme point de départ pour sa campagne la ville ô combien symbolique de Mascara, cité traditionnellement liée au nom de l'Emir Abdelkader. Par ce choix, le candidat Ali Benflis suggère qu'il veut s'inscrire dans la lignée de celui que la culture «officielle» considère comme le fondateur de l'Etat algérien. Au-delà du caractère polémique de cette assertion, Benflis, qui a toujours fait de la «culture de l'Etat» son cheval de bataille dans sa politique de communication (comme l'illustre l'interview qu'il avait accordée récemment à la chaîne Echourouk TV), veut, manifestement, se poser en homme d'Etat plutôt qu'en «homme de pouvoir».Louisa Hanoune, quant à elle, a choisi Annaba, et là encore, cela n'a rien de fortuit. «La renationalisation du complexe sidérurgique d'El Hadjar a été un des combats menés par le Parti des travailleurs. A la demande des militants, nous avons donc choisi de lancer notre campagne de Annaba avant de partir vers Skikda», expliquait son staff de campagne à nos collègues d'elwatan2014.com.Il convient aussi de rappeler que Louisa Hanoune a passé une partie de son enfance à Annaba, ville où elle a fait, également, ses études de droit.Au-delà de la symbolique des villes, les candidats font leurs calculs sur des bases purement arithmétiques, en tenant compte du fait que, pour démarrer sa campagne sur les chapeaux de roues, il est important de faire le plein dès les premiers meetings et s'épargner le cauchemar des salles clairsemées. Moussa Touati, qui compte sillonner pas moins de 41 wilayas, sous le slogan «El Djazaïr li koulli El-Djazaïriyine», a entamé sa campagne à partir d'El Bayadh. «C'est la région où il compte le plus grand nombre d'élus locaux, soit 45 représentants du parti dans les Assemblées populaires communales (APC) et de wilaya (APW)», rapporte l'APS en citant Abdelkader Boudjoras, directeur de campagne de M. Touati.Abdelaziz Belaïd, lui, qui fait campagne sous le slogan, «L'avenir, c'est maintenant», a choisi d'étrenner son marathon électoral par Djelfa, une ville stratégique de par sa position centrale et son rayonnement dans la steppe. Il faut ajouter que Abdelaziz Belaïd, qui est originaire de Batna, y a exercé comme médecin. «De plus, le président de l'APC est membre d'El Moustakbel. Nos militants y sont nombreux et bien organisés», indiquent ses collaborateurs à elwatan2014.com.La fausse ubiquité du candidat-absentPour sa part, le président de Ahd 54, Ali Fawzi Rebaïne, a débuté sa campagne par Biskra avant d'enchaîner par Khenchela. Il convient de relever que certaines villes connaissent un véritable chassé-croisé de candidats ou leurs lieutenants. Après Sellal, Adrar recevait hier Ali Benflis. La ville de Blida a vu défiler tour à tour (selon le planning des candidats) Sellal, Benflis et Abdelaziz Belaïd, tandis que Skikda recevait Louisa Hanoune et Abdelaziz Belkhadem.Fait marquant de cette campagne 2014, comme, du reste, l'ont abondamment souligné nombre d'éditorialistes : l'absence du candidat Abdelaziz Bouteflika sur le terrain, lui qui sillonnait plusieurs wilayas d'un seul tenant du temps où il était au faîte de sa forme. Pour pallier ce lourd handicap, son équipe de campagne a opté pour une stratégie d'essaimage aux quatre coins du pays.Au premier jour de la campagne, outre Sellal qui s'évertuait à vendre le programme du président sortant dans le Grand Sud, Belkhadem a été dépêché à Sidi-Okba (Biskra), Bensalah à Oran, Amar Ghoul et Amar Benyounès dans la wilaya de Bouira, et Amar Saadani à Médéa. Les mêmes ont sillonné encore hier les wilayas de Sétif, Souk Ahras et autre Skikda. De quoi entretenir l'illusion que le «candidat-fantôme» jouirait du don d'ubiquité. Cette offensive tous azimuts portera-t-elle ses fruits, sachant que c'est surtout M. Bouteflika que les électeurs veulent voir et entendre ' Réponse le 17 avril.
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Posté Le : 25/03/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Mustapha Benfodil
Source : www.elwatan.com