Trois jurés égyptiens du festival français du film du Caire ont démissionné ; ils étaient opposés à la sélection d'un court-métrage réalisé par une Israélienne. Malgré la normalisation politique , celle culturelle n'est pas acquise.
31 ans après la signature d'un accord de paix entre Israël et l'Egypte, la paix en matière d'échange culturel n'est pas d'actualité. Si le rapprochement politique a beaucoup été décrié, notamment par l'Algérie et son « front du refus », politiquement, il a servi à Moubarak qui deviendra médiateur du conflit palestino-israélien. Culturellement en revanche, la normalisation des relations entre les deux pays ' et par extension avec l'ensemble du monde arabe ' est loin d'être acquise. Les élites intellectuelles et artistiques égyptiennes la conditionnent à la signature d'un accord de paix équilibré entre Israël et l'Autorité palestinienne.Rencontres de l'image, le festival français du film du Caire, qui se déroule du 8 au 15 avril, en est le dernier exemple en date. Il s'est soldé par une mini-crise diplomatique entre l'Egypte et la France. Dans sa programmation, le festival a prévu la projection de Presque normal, un court-métrage réalisé par l'Israélienne Karen Ben Rafael. Trois membres égyptiens du jury s'en sont ému et ont démissionné à quelques jours du lancement de la manifestation. Si le sujet du film n'est clairement pas mis en cause, les jurés démissionnaires considèrent en revanche que leur participation au festival, en la présence de cette réalisatrice, équivaudrait à une « normalisation culturelle » avec Israël. Malgré la paix conclue en 1979 entre Israël et l'Egypte, les milieux culturels égyptiens restent majoritairement hostiles à toute normalisation et s'opposent à la présentation de toute 'uvre israélienne en Egypte.Tensions entre Paris et le CaireL'Egypte a jugé « inacceptables » les « remarques » du ministère français des Affaires étrangères qui a regretté le retrait de membres égyptiens du jury. Le Quai d'Orsay a indiqué regretter « le départ des membres égyptiens du jury » et estimé que le festival devait représenter « un espace de dialogue et de compréhension mutuelle » permettant « de vrais débats et non des polémiques vaines et inutiles ».« Les artistes égyptiens ont exercé leur droit à la participation ou non dans tout événement culturel, sur la base de leurs positions et de leurs opinions », a affirmé dans un communiqué Hossam Zaki, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères. « Ce droit leur est garanti d'après la Constitution égyptienne et, par conséquent, il est inacceptable qu'une partie étrangère fasse des remarques à ce sujet. De notre côté, nous ne faisons pas de remarques sur les positions des cinéastes français », a-t-il ajouté. Cette polémique arrive après de nombreuses controverses similaires. En septembre dernier par exemple, les organisateurs du festival de Toronto avaient choisi Tel-Aviv pour thème de City to City, un zoom sur la production cinématographique d'une ville du monde proposé chaque année dans le cadre de la manifestation. Un choix dont s'étaient émus une cinquantaine d'intellectuels et de cinéastes arabes, mais également canadiens, américains et britanniques, qui y voyaient une tribune offerte à « la machine de propagande israélienne », quelques mois seulement après l'offensive de l'armée israélienne sur Gaza qui avait fait 1400 morts, en décembre 2008 et janvier 2009. Un an et demi plus tôt encore, une vive polémique était née, en France cette fois, lors de l'ouverture du Salon du livre de Paris, dont l'édition était consacrée à la littérature israélienne. Intellectuel libanais et directeur du service culturel du journal Al Akhbar, Pierre Abi Saab considère ces boycottages comme des « actes de résistance ». Selon lui, les accords de paix signés par l'Egypte et la Jordanie avec l'Etat hébreu donnent raison à la politique expansionniste israélienne. « On nous vend un slogan de paix pompeux et creux, qui implique une soumission des pays arabes, explique le journaliste. Imposer un film israélien en Egypte est une façon homéopathique de nous obliger à accepter la paix d'Israël. Nous refusons la normalisation des rapports culturels avec lui tant que les questions plus graves ne seront pas réglées. » La jeune réalisatrice israélienne, déprogrammée puis reprogrammée, reconnaît que même si elle est très loin de cette polémique, son film n'étant qu'une comédie, cette crise diplomatique lui fait une publicité
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Posté Le : 09/04/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ahmed Tazir
Source : www.elwatan.com