Cinéma. Festival de Locarno : Standing et grand public
Le 63e Festival du film de Locarno doit remettre un Pardo d'honneur, pour toute sa carrière, au cinéaste napolitain Francesco Rosi, Palme d'or également à Cannes en 1972 pour L'affaire Mattei. Locarno. De notre envoyé spécial Une puissante enquête sur la mort, peut-être un assassinat, du patron de l'ENI, la Sonatrach italienne, dont l'avion dans lequel il voyageait a fait un crash. Rosi s'est spécialisé dans des enquêtes retentissantes qu'il tourne en fiction. Il a réalisé aussi l'inoubliable Main basse sur la ville en 1963 avec Rod Steiger où l'on voit l'entrepreneur mafiosi Nottola payer la municipalité de Naples pour lui accorder des terrains agricoles pour ses constructions. La longue 'uvre de Francesco Rosi comprend aussi notamment Salvatore Giuliano (succès mondial), Lucky Luciano, Chronique d'une mort annoncée, adapté du roman de Gabriel Garcia Marquez.Largement ouvert au public payant, le Festival de Locarno, qui fonctionne avec un budget de 12 millions de francs suisses grâce à l'appui de l'Etat et aux sponsors (marques de boissons, banques, grands magasins...), ne cherche pas à devenir un événement mondain. 8000 spectateurs achètent leurs tickets et remplissent la Piazza Grande certains soirs où sont projetés des films attendus, surmédiatisés déjà à la télévision. Les films en compétition et ceux d'autres sections passent dans cinq salles différentes, chacune pouvant accueillir entre 200 et 5000 spectateurs. Il faut se pointer tôt avant chaque séance pour avoir la chance de trouver une place. Le taux d'occupation étant maximum et le Festival de Locarno, au fil des ans, est devenu l'événement culturel le plus populaire de la Suisse. Olivier Père, le nouveau directeur artistique, entend donner sa touche personnelle à Locarno, en poursuivant ses recherches entreprises quand il était responsable de la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes. Il veut donner leur chance aux jeunes cinéastes, aux talents futurs. La manifestation doit refléter ce travail de recherche, de découverte. Du sérieux, mais pas du glamour. Standing, tout en restant grand public. Tom Cruise est de ce fait privé de baignade dans les eaux cristallines du lac Majeur... Locarno cherche surtout à investir dans l'originalité et l'innovation. Parmi les 40 premières mondiales cette année, la moitié sont des premiers films. Fictions traditionnelles, mais aussi vidéos, documentaires, toutes les formes, tous les formats sont permis. Le film Karamay du Chinois Xu Xin est un documentaire de 6 heures, sans parole, ni musique, une chronique minutieuse des conséquences tragiques d'un grand incendie, comme il s'en produit souvent dans cet immense pays.Septembre 12Autre documentaire saisissant : Septembre 12, réalisé par le Turc Ozlem Sulak, qui revient à travers divers témoignages sur le coup d'Etat militaire du 12 septembre 1980, de triste mémoire turque. Débats, forums s'ajoutent au programme des projections et attirent aussi la foule. Paradoxalement, cette région du Tessin, la plus belle partie de la Suisse, avec son ambiance de détente, de vacances et d'exceptionnelle convivialité sur les rives fleuries du lac, voit débarquer en août des voyageurs pas comme les autres, se bousculant aux portes des salles, oubliant le beau soleil et ses joyeux reflets dans l'eau, car poussés désespérément par le seul désir de voir le maximum de films du Festival, comme si pour rien au monde il ne faudrait les rater.
Posté Le : 08/08/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Azzedine Mabrouki
Source : www.elwatan.com